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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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vaincu les Gallois au cours d’une
grande bataille. Les nouveaux venus chantaient le combat et racontaient que
nous avions abreuvé les corbeaux du sang des étrangers. Cela mit mon père de
bonne humeur ; nous étions proches d’Eoferwic et, le lendemain, nous
devions retrouver Osbert et Ælla avant, le jour suivant, de nourrir de nouveau
les corbeaux. Nous étions assis devant l’un de nos feux allumés dans les
champs. Au sud, de l’autre côté de la vaste plaine, je voyais le ciel
s’illuminer des innombrables feux indiquant où s’était rassemblé le reste de
l’armée de Northumbrie.
    — Le corbeau est une créature de Woden, n’est-ce pas ?
demandai-je avec inquiétude.
    — Qui t’a dit cela ? demanda aigrement mon père.
    Je haussai les épaules sans répondre.
    — Ealdwulf ? devina-t-il, sachant que le forgeron
de Bebbanburg, resté à la forteresse avec Ælfric, était secrètement païen.
    — Je l’ai simplement entendu dire, répondis-je,
espérant m’en tirer sans prendre de coups. Et je sais que nous descendons de
Woden.
    — C’est exact, admit mon père. Mais nous avons un
nouveau Dieu, dorénavant. (Il fixa d’un œil noir le campement où buvaient les
hommes.) Sais-tu qui remporte les batailles, mon garçon ?
    — Nous, père.
    — L’armée qui est la moins ivre, répondit-il, avant de
poursuivre : mais cela aide d’être ivre.
    — Pourquoi ?
    — Parce que c’est affreux d’être derrière un mur de
boucliers, dit-il en contemplant le feu. Je m’y suis trouvé à six reprises,
continua-t-il, et j’ai prié chaque fois que ce soit la dernière. Ton frère,
lui, aurait adoré cela. Il avait du courage.
    Il se tut, but une rasade et se renfrogna.
    — L’homme qui a apporté sa tête… Je veux la sienne. Je
veux cracher dans les yeux de son cadavre et dresser sa tête sur une pique
au-dessus de la Porte Basse.
    — Tu l’auras, répondis-je.
    Il ricana.
    — Qu’en sais-tu ? Je t’ai emmené, mon garçon,
parce que tu dois voir une bataille. Parce que nos hommes doivent te voir ici.
Mais tu ne combattras point. Tu es comme un jeune chiot qui regarde les vieux
molosses tuer un sanglier, mais qui ne mord point. Regarde et apprends sans
relâche, et peut-être qu’un jour tu te rendras utile. Mais pour l’instant tu
n’es encore qu’un chiot, conclut-il avant de me congédier d’un geste.
    Le lendemain, la voie romaine traversa une plaine le long de
digues et de fossés, puis nous arrivâmes enfin au lieu où s’étaient établies
les armées alliées d’Osbert et Ælla. Au-delà, à peine visible à travers les
arbres, s’étendait Eoferwic, la ville occupée par les Danes.
    Eoferwic était et demeure la capitale de l’Anglie du Nord.
Elle possède une grande abbaye, un archevêque, une forteresse, de hautes
murailles et un vaste marché. Elle se trouve le long de la rivière Ouse et les
navires peuvent rejoindre Eoferwic depuis la mer, et c’est ainsi que les Danes
étaient arrivés. Sachant sans doute que la Northumbrie était affaiblie par une
guerre civile et qu’Osbert, le roi lige, était parti à l’ouest affronter son
rivalÆlla, ils avaient pris la ville en l’absence du roi. La querelle
entre Osbert et Ælla couvait depuis des semaines, et Eoferwic grouillait de
marchands, venus pour la plupart de l’autre côté de la mer, qui devaient
connaître l’âpre rivalité régnant entre les deux hommes. Les Danes étaient
passés maîtres dans l’art d’espionner. Les moines chroniqueurs rapportent
qu’ils sont venus de nulle part, que leurs navires à proue de dragon
surgissaient du bleu du néant, mais c’était rarement le cas. Les équipages
vikings attaquaient peut-être sans prévenir, mais les grandes flottes, les
flottes de guerre, allaient là où existaient déjà des troubles. Elles se
précipitaient sur ces blessures ouvertes et y festoyaient comme des asticots.
    Mon père m’emmena aux abords de la ville avec une troupe de
cavaliers vêtus de cottes de mailles ou de cuir. Nous aperçûmes l’ennemi sur
les remparts. Ceux-ci étaient parfois en pierre – c’était l’œuvre des Romains
–, mais la plus grande partie de la ville était défendue par un talus de terre
surmonté d’une haute palissade de bois, dont un pan manquait à l’est. Il avait
brûlé et nous pouvions discerner ses restes calcinés au sommet du talus de
terre où des pieux avaient été apportés pour dresser une nouvelle palissade.
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