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Le Huitième Péché

Titel: Le Huitième Péché Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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nuit. Alberto luttait contre la fatigue. Le but de leur voyage lui revint tout à coup à l’esprit. Une entreprise absurde, que seuls lui et le secrétaire du cardinal, le monsignor Soffici, connaissaient. Après un long silence, le cardinal s’adressa de nouveau à Soffici :
    — Voilà un mot de passe chargé de sens. Vous connaissez le texte de l’Apocalypse.
    — Naturellement, Éminence.
    — Y compris le verset 7 du livre 20 ?
    Soffici bredouilla :
    — Je ne me souviens pas précisément de celui-ci ; en revanche, je peux vous citer tous les autres de mémoire.
    — Ce ne sera pas nécessaire. Soffici, ceci explique que vous ne soyez à ce jour que monsignor.
    — Si je peux me permettre une remarque, Éminence, j’accepte en toute humilité ce titre que ma fonction me confère !
    Gonzaga excellait dans l’art d’humilier constamment et perfidement son jeune secrétaire. Soffici ne jouissait que d’une seule liberté : celle de penser.
    Dans le véhicule, l’air empestait le Pour Monsieur de Chanel, un parfum pour homme auquel il n’était pas facile de s’habituer. Le cardinal l’achetait à un prix défiant toute concurrence dans une jolie boutique de la gare du Vatican.
    Il avait pris l’habitude de frictionner sa calvitie rose avec cette eau de senteur depuis que le bedeau de Santa Maria Maggiore lui avait confié, sous le sceau du secret, après un office pontifical, que ce traitement favorisait la repousse des cheveux.
    Même de sa place à l’arrière, dans l’obscurité de la nuit, le cardinal ne perdait pas une miette des mouvements convulsifs de la tête qui accompagnaient chacune des pensées de son secrétaire.
    — Je vais vous dire ce qui est écrit dans le livre 20, au verset 7.
    — Ne vous donnez pas cette peine, l’interrompit Soffici. Ce n’était qu’un trou de mémoire passager. Je vous cite la phrase en question : « Quand les mille ans seront accomplis, Satan sera relâché de sa prison. »
    — Vous m’impressionnez, monsignor, répondit Gonzaga. Mais je dois avouer que je ne vois pas le rapport avec notre mission.
    Alberto, qui était depuis le début initié aux secrets de l’affaire, réprima un ricanement embarrassé. Il reporta son attention sur la voiture qui collait à leur pare-chocs arrière depuis au moins trente kilomètres. Lorsqu’il accélérait, le véhicule importun le rattrapait, et lorsqu’il ralentissait, l’autre s’adaptait à sa vitesse.
    Décidé à semer ce poursuivant désagréable, Alberto fit une pointe de vitesse. La Fiat se trouvait alors quelque part entre Mantoue et Vérone. Le véhicule qui les suivait déboîta soudain dans un hurlement de moteur, les doubla pour se rabattre juste devant leur capot, ce qui obligea Alberto à donner un violent coup de frein, suivi par une bordée de jurons que le secrétaire tenta d’enrayer par des toussotements discrets. Il vit sortir de la fenêtre un bras prolongé par un bâton muni d’un clignotant rouge : Police.
    — Il ne manquait plus que cela, soupira Alberto qui obtempéra de mauvaise grâce aux sommations du policier.
    Les représentants de l’ordre avaient bien préparé leur coup. Une aire de stationnement plongée dans l’obscurité se trouvait à quelque trois cents mètres de là. Ils firent signe à Alberto de les y suivre.
    À peine Alberto avait-il immobilisé la voiture que trois hommes armés de mitraillettes bondirent du véhicule de police et encerclèrent la Fiat.
    Soffici garda les mains jointes et se mit à réciter ses prières, cette fois tout haut. Le cardinal, raide, immobile, comme mort sur la banquette arrière, ne broncha pas. Et c’est plutôt avec flegme que son chauffeur envisageait la situation délicate où ils se trouvaient.
    Il baissa sa vitre sans dire un mot. Aveuglé par la torche braquée sur lui, il cligna des yeux.
    — Descendez !
    Alberto se plia à l’injonction, lentement et avec une mauvaise volonté manifeste. À peine était-il sorti que deux carabiniers l’empoignaient sous les aisselles, un à droite et l’autre à gauche, et lui plaquaient les mains sur le toit de la voiture. Alberto, dont le flegme en toutes circonstances était légendaire et témoignait d’un tempérament tout sauf italien, poussa un cri de douleur pour le moins incongru au vu de la situation.
    Néanmoins, lorsqu’il sentit dans son dos le canon de la mitraillette du troisième carabinier, il se calma.
    — Écoutez ! s’écria-t-il quand

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