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Le Journal D'Anne Frank

Le Journal D'Anne Frank

Titel: Le Journal D'Anne Frank Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Frank
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congés de Noël et du Nouvel An, nous sommes ici comme des parias, et pourtant je n’ai en fait pas le droit d’écrire ces mots parce que je donne l’impression d’être ingrate, mais peu importe leur opinion, je ne peux pas tout garder pour moi et répéterai une fois de plus les mots, de mon introduction, « le papier a de la patience ».
    Quand quelqu’un vient de l’extérieur, les vêtements pleins de vent et le visage encore froid, j’ai envie de me cacher la tête sous les couvertures pour ne pas penser : « Quand aurons-nous le droit de respirer l’air frais ? » Et comme je ne peux pas cacher ma tête sous les couvertures, mais dois au contraire la tenir droite et digne, ces pensées me viennent malgré tout, et pas seulement une fois mais plusieurs, des milliers de fois. Tu peux me croire, quand on est enfermé pendant un an et demi, certains jours, on en a assez. Au mépris de toute justice ou de toute ingratitude, il est impossible de chasser ce sentiment. Faire du vélo, danser, siffler, découvrir le monde, me sentir jeune, savoir que je suis libre, voilà à quoi j’aspire et pourtant je ne dois rien en montrer parce que, imagine un peu, si nous nous mettions tous les huit à nous plaindre ou à prendre des airs malheureux, où en serions-nous ?
    Il m’arrive de me demander parfois si quelqu’un pourra jamais comprendre ce que je ressens, si quelqu’un pourra voir, au-delà de mon ingratitude, au-delà du fait d’être juive ou non, la petite gamine qui a tant besoin de s’amuser comme une folle ? Je n’en sais rien et je ne voudrais en parler à personne car je sais que je me mettrais à pleurer. Pleurer peut apporter un tel soulagement, si seulement il y a quelqu’un auprès de qui on peut pleurer et en dépit de tout, en dépit de mes théories et de mes efforts, il me manque chaque jour et à chaque instant la mère qui me comprendrait. Et c’est pourquoi je me dis, à chacun de mes gestes et à chaque chose que j’écris, que je voudrais être plus tard, pour mes enfants, la mams (1) à laquelle je rêve. La mams qui ne prend pas tant au sérieux tout ce que l’on dit, et qui au contraire prend très au sérieux ce que je deviens. Je m’aperçois que je n’arrive pas à le décrire, mais en disant « mams », on a déjà tout dit. Tu sais ce que j’ai imaginé pour tout de même appeler Maman d’un petit nom comme « mams »  ? Je l’appelle souvent Mansa, et de là vient Mans. C’est pour ainsi dire la mams imparfaite, que j’aimerais tant gratifier d’un autre jambage au n, qui ne s’en rend pas compte, car sinon elle serait malheureuse. Assez parlé de cela, en écrivant, mon « attristée à en mourir » m’est un peu passé !
     
    Bien à toi,
    Anne
     
    Ces derniers temps, alors que nous n’en sommes qu’au premier jour de Noël (2), je ne cesse de penser à Pim et à ce qu’il m’a dit l’année dernière. L’année dernière, quand je ne comprenais pas le sens de ses paroles comme je les comprends aujourd’hui. Si seulement il venait me parler à nouveau, peut-être pourrais-je lui montrer que je le comprends ! Je crois que Pim en a parlé parce que, lui qui sait tant de choses sur les secrets du cœur des autres, n’a pas pu s’empêcher, pour une fois, de se confier ; car d’habitude, Pim ne parle jamais de lui et je ne crois pas que Margot se doute de ce qu’il a pu endurer. Pauvre Pim, il ne pourra pas me convaincre qu’il l’a oublié. Jamais il ne l’oubliera. Il est devenu indulgent, car lui aussi voit les erreurs de Maman. J’espère que je lui ressemblerai un peu, sans que j’aie à endurer les mêmes choses !
     
    Anne
     
     
    1 Petit nom affectueux donné par certains enfants néerlandais à leur mère.
    2 Aux Pays-Bas, on parle du premier et du second jour de Noël. Ces jours correspondent respectivement au 25 et au 26 décembre.
     
     
     
    LUNDI 27 DÉCEMBRE 1943
     
    Vendredi soir, j’ai eu pour la première fois de ma vie un cadeau de Noël. Les filles, Kleiman et Kugler nous ont préparé une délicieuse surprise. Miep nous a confectionné un gâteau de Noël, sur lequel était écrit : « Paix en 1944 ». Bep a offert une livre de galettes au beurre d’une qualité d’avant-guerre. Pour Peter, Margot et moi, il y avait une petite bouteille de yaourt et pour les adultes, une bière chacun. Tout était si joliment emballé et de belles images étaient collées sur les différents paquets. Sinon, pour

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