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Le Journal D'Anne Frank

Le Journal D'Anne Frank

Titel: Le Journal D'Anne Frank Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Frank
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fougueux.
    Je me suis réfugiée en moi-même, je n’ai regardé que moi, et toute ma joie, mon ironie et mon chagrin, je les ai décrits dans mon journal sans aucune gêne. Ce journal a pour moi de la valeur car, souvent, il est un répertoire de souvenirs, mais sur beaucoup de pages, je pourrais écrire « Dépassé ». J’étais furieuse contre Maman (comme il m’arrive souvent encore), elle ne me comprenait pas, c’est sûr, mais je ne la comprenais pas non plus. Comme elle m’aimait, elle me montrait de la tendresse, mais comme je la mettais souvent dans des situations désagréables et que cela, en plus d’autres circonstances aussi affligeantes, la rendait nerveuse et irritable, on comprend qu’elle m’ait souvent rabrouée.
    Je prenais sa réaction beaucoup trop au tragique, me sentais vexée, devenais insolente et difficile avec elle, ce qui augmentait encore son chagrin. C’était donc en fait une alternance d’attitudes blessantes et de chagrin. Ce n’était sûrement pas drôle, ni pour l’une ni pour l’autre, mais cela passe. Mais je ne voulais pas le voir, et j’éprouvais une grande pitié pour moi-même, ce qui se comprend également.
    Les phrases trop violentes ne sont que l’expression d’une colère que, dans la vie normale, j’aurais soulagée en trépignant deux ou trois fois dans une chambre fermée ou en jurant derrière le dos de Maman.
    La période où, les larmes aux yeux, je condamnais Maman est terminée, je suis devenue plus raisonnable. Le plus souvent, je me tais quand je suis irritée, elle de même, et de ce fait nos relations sont apparemment bien meilleures. Car aimer Maman de l’amour innocent d’un enfant, j’en suis incapable.
    Je tranquillise ma conscience en me disant qu’il vaut mieux laisser des injures sur le papier plutôt que d’obliger Maman à les porter dans son cœur.
     
    Bien à toi,
    Anne
     
     
     
    JEUDI 6 JANVIER 1944
     
    Chère Kitty,
     
    Aujourd’hui, je dois t’avouer deux choses que je vais mettre un certain temps à écrire, mais que je dois raconter à quelqu’un et, après tout, tu es la mieux placée pour les entendre parce que je suis sûre que tu les garderas pour toi, toujours et en toutes circonstances. La première concerne Maman. Tu sais que je me suis souvent plainte d’elle et que, pourtant, je me suis toujours donné beaucoup de mal pour être gentille avec elle. Tout d’un coup, je sais exactement ce qui cloche chez elle. Maman nous a dit elle-même qu’elle nous considérait davantage comme des amies que comme ses filles ; c’est bien joli, mais une amie ne peut pas remplacer une mère. J’ai besoin de prendre ma mère en exemple et de la respecter, et ma mère me sert effectivement d’exemple dans la plupart des choses, mais me donne justement l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. J’ai l’impression que Margot a des idées totalement différentes sur tous ces sujets et ne comprendrait jamais ce que je viens de te raconter. Quant à Papa, il évite toutes les discussions qui pourraient concerner Maman. Ma conception d’une mère, c’est une femme qui avant tout montre beaucoup de tact, particulièrement vis-à-vis d’enfants de notre âge, contrairement à Mansa, qui me rit au nez quand je pleure, pas parce que je me suis fait mal, mais pour d’autres choses.
    Cela peut paraître ridicule, mais il y a une chose que je ne lui ai jamais pardonnée. Un jour, je devais aller chez le dentiste, Maman et Margot m’accompagnaient et m’avaient permis de prendre mon vélo. En sortant de chez le dentiste, Margot et Maman m’ont dit d’un air tout enjoué qu’elles allaient en ville pour voir ou acheter quelque chose, je ne sais plus exactement. Évidemment, j’avais envie de les accompagner, mais elles ne voulaient pas parce que j’avais mon vélo. De colère, j’en ai eu les larmes aux yeux, et Margot et Maman ont éclaté de rire. J’étais tellement furieuse que je leur ai tiré la langue en pleine rue juste au moment où une petite dame passait qui m’a jeté un regard horrifié. Je suis rentrée en vélo à la maison et j’ai sans doute pleuré encore longtemps. Il est curieux que parmi les innombrables blessures que Maman m’a infligées, ce soit justement celle-ci qui me brûle lorsque je repense à ma colère du moment.
    La deuxième m’est très pénible à raconter car elle me concerne. Je ne suis pas pudibonde, Kitty, mais quand ils se mettent à parler en détail de ce qu’ils

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