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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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même dans les dents de mon rechignement.
    — Ho Madame ! dit Zara qui
voyait en cet aveu une trahison de son sexe.
    — Zara ! Zara ! dit
Dame du Luc, havre du ciel ! Ne me picagne pas ! Et fais ta paix avec
M. de Siorac ! Je ne veux plus t’ouïr l’appeler « méchant » et
« bête brute », comme tu as osé faire.
    — Madame, dit Zara avec une de
ces petites moues qui, parties de ses mignonnes lèvres, l’agitaient toute,
gagnant de proche en proche, en une sorte d’ondulation, jusqu’à ses hanches et
ses orteils, si M. de Siorac requiert de moi quelques excusations…
    — Que nenni, belle Zara,
dis-je, ta beauté, qui est sublime, est toute l’excusation qu’il te faut, et
quelques poutounes, là, sur ta suave joue et ton col si gracieux (quoi disant,
je la baisai à vif bec) me bailleront toute la réparation que j’exige pour tes
impertinences.
    — Mon frère, je vous ai ouï
dire, dit Gertrude tout soudain se levant, soit qu’elle n’aimât point trop voir
sa dame d’atour louée et baisotée, soit plutôt qu’elle jugeât toute mignoterie
perdue qui n’était pas à elle-même adressée, je vous ai ouï dire que Samson et
vous aviez été convertis à la religion réformée à l’âge de dix ans.
    — Et j’ai de fort bonnes raisons
de m’en ramentevoir, mon père ayant pris querelle à moi en cette occasion pour
ce que je n’y allais que d’une fesse.
    — Ha ! dit Gertrude en
levant le sourcil, et pourquoi donc ?
    — J’aimais Marie. Et je trouvai
qu’une religion sans femme à adorer ne me remplissait pas le cœur.
    — Oyez, Madame, dit Zara en
souriant, comme M. de Siorac, en ses maillots et enfances, aimait jà notre
suave sexe.
    — Avec lequel pourtant, quand
il s’agit d’autre que de lui, il est fort imployable, dit Gertrude. Mais
laissons cela, poursuivit-elle sitôt sa flèche décochée, vous fûtes donc, mon
frère, baptisé dans la vraie religion.
    — S’il vous plaît la nommer
ainsi, dis-je en lui faisant un petit salut froidureux.
    — Adonc Samson aussi, qui est
d’une autre mère, mais du même âge.
    — Samson aussi.
    — Mon Pierre, dit-elle tirant
vers moi son œil vert très adouci, peux-je vous prier de quérir du curé de
Marcuays qu’il atteste par écrit que Samson fut baptisé selon le rite romain et
qu’il oit la messe ?
    — Qu’il oit la messe ?
dis-je, béant.
    — Il l’orra ce dimanche qui
vient, et avec moi, en la chapelle de Mespech, Monsieur votre père ayant mandé
votre curé de l’y venir dire pour moi, pour Zara et le maestro Giacomi.
    — Ha Gertrude ! dis-je,
c’est merveille ce que vous avez de mon père obtenu !
    — À vrai dire, dit Gertrude,
baissant son bel œil, Zara m’y a aidée.
    — Ho Madame ! dit Zara.
    À quoi je ris.
    — Toutefois, repris-je, le curé
Pincettes ne vous mariera pas à Samson sans obtenir de lui abjuration haute et
claire. Il est trop sous le pouce de son évêque de Sarlat.
    — Mon bon curé de Normandie,
dit Gertrude, ne nous cherchera pas tant de puces. Il se satisfera de
l’attestation que j’ai dite, pour peu que vous consentiez à l’aller quérir à
Marcuays.
    J’y étais jà résolu, m’apensant
qu’il ne serait point mauvais que j’obtinsse moi aussi de Pincettes
l’attestation qu’elle avait dite et qui me pourrait être de grande usance, si
M. de Montcalm me laissait à la parfin marier mon Angelina, laquelle était
papiste aussi, comme peut-être on s’en ramentoit. Mais trouvant un très grand
charme à l’heure qui passait, pour ce que je n’avais jamais vu cette chambre où
j’étais si bellement illuminée, tant par le feu pétillant que par la profusion
des chandelles, ni les vieux murs de Mespech, comme disait mon père, tant
égayés par la blondeur de Gertrude et la beauté, les brocarts et les atours de
ces deux galantes dames – lesquelles, à n’en douter point ramentevaient à
mon père, comme à moi, ma défunte mère – je fis quelques difficultés à
acquiescer à la prière de Gertrude, ayant appétit à prolonger cette mignonne
scène et me voulant faire par elles deux prier et caresser plus outre. À quoi
elles ne faillirent point, m’enveloppant de leurs enchériments et me donnant le
plaisir d’y céder.
    Porteur, au surplus, d’un message de
mon père, je fus voir le curé Pincettes le lendemain, à la nuitée, non sans
quelque déploiement de force que je voulais d’autant montrer que j’étais

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