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Le Prince

Le Prince

Titel: Le Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Machiavel
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côté, le prince
pense à son ministre, s'il veut le conserver toujours fidèle ;
il faut qu'il l'environne de considération, qu'il le comble de
richesses, qu'il le fasse entrer en partage de tous les honneurs et
de toutes les dignités, pour qu'il n'ait pas lieu d'en souhaiter
davantage ; que, monté au comble de la faveur, il redoute le
moindre changement, et qu’il soit bien convaincu qu'il ne pourrait
se soutenir sans l'appui du prince.
    Quand le prince et le ministre sont tels que
je le dis, ils peuvent se livrer l'un à l'autre avec
confiance : s'ils ne le sont point, la fin sera également
fâcheuse pour tous les deux.

Chapitre 23 Comment on doit fuir les flatteurs
    Je ne négligerai point de parler d'un article
important, et d'une erreur dont il est très difficile aux princes
de se défendre, s'ils ne sont doués d'une grande prudence, et s'ils
n'ont l'art de faire de bons choix ; il s'agit des flatteurs,
dont les cours sont toujours remplies.
    Si, d'un côté, les princes aveuglés par
l'amour-propre ont peine à ne pas se laisser corrompre par cette
peste, de l'autre, ils courent un danger en la fuyant : c'est
celui de tomber dans le mépris. Ils n'ont effectivement qu'un bon
moyen de se prémunir contre la flatterie, c'est de faire bien
comprendre qu'on ne peut leur déplaire en leur disant la
vérité : or, si toute personne peut dire librement à un prince
ce qu'elle croit vrai, il cesse bientôt d'être respecté.
    Quel parti peut-il donc prendre pour éviter
tout inconvénient ? Il doit, s'il est prudent, faire choix
dans ses États de quelques hommes sages, et leur donner, mais à eux
seuls, liberté entière de lui dire la vérité, se bornant toutefois
encore aux choses sur lesquelles il les interrogera. Il doit, du
reste, les consulter sur tout, écouter leurs avis, résoudre ensuite
par lui-même ; il doit encore se conduire, soit envers tous
les conseillers ensemble, soit envers chacun d'eux en particulier,
de manière à les persuader qu'ils lui agréent d'autant plus qu'ils
parlent avec plus de franchise ; il doit enfin ne vouloir
entendre aucune autre personne, agir selon la détermination prise,
et s'y tenir avec fermeté.
    Le prince qui en use autrement est ruiné par
les flatteurs, ou il est sujet à varier sans cesse, entraîné par la
diversité des conseils ; ce qui diminue beaucoup sa
considération. Sur quoi je citerai un exemple récent. Le prêtre
Lucas, agent de Maximilien, actuellement empereur, disait de ce
prince « qu'il ne prenait jamais conseil de personne, et qu'il
ne faisait jamais rien d'après sa volonté ». Maximilien, en
effet, est un homme fort secret, qui ne se confie à qui que ce
soit, et ne demande aucun avis ; mais ses desseins venant à
être connus à mesure qu'ils sont mis à exécution, ils sont aussitôt
contredits par ceux qui l'entourent, et par faiblesse il s'en
laisse détourner : de là vient que ce qu'il fait un jour, il
le défait le lendemain ; qu'on ne sait jamais ce qu'il désire
ni ce qu'il se propose, et qu'on ne peut compter sur aucune de ses
déterminations.
    Un prince doit donc toujours prendre conseil,
mais il doit le faire quand il veut, et non quand d'autres le
veulent ; il faut même qu'il ne laisse à personne la hardiesse
de lui donner son avis sur quoi que ce soit, à moins qu'il ne le
demande ; mais il faut aussi qu'il ne soit pas trop réservé
dans ses questions, qu'il écoute patiemment la vérité, et que
lorsque quelqu'un est retenu, par certains égards, de la lui dire,
il en témoigne du déplaisir.
    Ceux qui prétendent que tel ou tel prince qui
paraît sage ne l'est point effectivement, parce que la sagesse
qu'il montre ne vient pas de lui-même, mais des bons conseils qu'il
reçoit, avancent une grande erreur ; car c'est une règle
générale, et qui ne trompe jamais, qu'un prince qui n'est point
sage par lui-même ne peut pas être bien conseillé, à moins que le
hasard ne l'ait mis entièrement entre les mains de quelque homme
très habile, qui seul le maîtrise et le gouverne ; auquel cas,
du reste, il peut, à la vérité, être bien conduit, mais pour peu de
temps, car le conducteur ne tardera pas à s'emparer du pouvoir.
Mais hors de là, et lorsqu'il sera obligé d'avoir plusieurs
conseillers, le prince qui manque de sagesse les trouvera toujours
divisés entre eux, et ne saura point les réunir. Chacun de ces
conseillers ne pensera qu'à son intérêt propre, et il ne sera en
état ni de les

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