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Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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a commencé par des fêtes qui illuminèrent de mille cierges Notre-Dame et le palais royal, et jusqu’aux quais de la Seine. On célébrait la venue à Paris d’Isabelle, fille de Philippe le Bel, épouse du roi d’Angleterre Édouard II, venu en vassal du roi de France pour le duché de Guyenne.
    J’ai admiré la beauté de la reine Isabelle :

    La belle Isabelot
    Hardiment bien dire ose
    Que c’est des plus belles la rose
    Le lis, la fleur et l’exemplaire,

    récitaient les trouvères.
    Mais il y avait, dans la moue dédaigneuse de la reine, l’expression d’une méchanceté qui m’avait inquiété, et je m’étais tenu à distance, craignant que son regard implacable ne me foudroie.
    J’entendais les chuchotements des chevaliers de la Cour qui assuraient que le roi d’Angleterre était, bien plus qu’un mari, un sodomite et qu’Isabelle s’en était plaint à Philippe le Bel.

    Après les fêtes de Paris, elle avait séjourné à Pontoise, et la première nuit, le feu avait pris dans le logis du roi et de la reine d’Angleterre ; ils avaient dû se sauver en chemise.
    On dit que les épouses des frères d’Isabelle s’étaient moquées d’elle.
    Elles étaient toutes trois les « brus » du roi :
    Marguerite de Bourgogne, mariée en 1305 au fils aîné de Philippe le Bel, Louis le Hutin.
    Jeanne d’Artois, mariée en 1307 à Philippe le Long, deuxième fils de Philippe le Bel.
    Blanche d’Artois, soeur de Jeanne, qui avait épousé en 1308 le plus jeune fils de Philippe, Charles le Bel.

    J’ai connu et côtoyé les fils du roi et leurs épouses.
    J’ai succombé en leur compagnie à l’ennui qui les étouffait.
    Je n’ai donc pas été surpris quand j’ai appris que Marguerite de Bourgogne et Blanche d’Artois avaient succombé à la tentation et commis le péché d’adultère.
    Et l’effroi m’a saisi lorsque les sergents du roi ont arrêté les deux épouses et leurs amants, les frères Philippe et Gautier d’Aunay.
    Je connaissais ces deux jeunes chevaliers de l’hôtel royal, insouciants et joyeux.
    Et j’ai prié pour que la mort à laquelle ils étaient destinés les prenne vite, car j’imaginais que la vengeance du roi serait cruelle.

    J’ai vu la fureur du roi se peindre sur son visage.
    C’était sa fille Isabelle qui avait dénoncé ses belles-soeurs. Elle leur avait offert deux bourses de cuir rehaussé de pierreries, puis les avait aperçues à la ceinture de Philippe et de Gautier d’Aunay.
    Elle avait averti Philippe le Bel, qui fit surveiller les deux chevaliers.
    Le premier était l’amant de Blanche d’Artois.
    Le second, celui de Marguerite de Bourgogne.
    Quant à Jeanne d’Artois, elle était coupable de ne pas avoir dénoncé sa soeur et Marguerite, les coupables.

    J’avais imaginé que le pire châtiment s’abattrait sur les deux chevaliers dont la liaison avec des femmes qui pouvaient être
de futures reines capétiennes jetait un doute sur la pureté de sang de la lignée royale.
    Le pire fut donc pire.
    Les deux frères d’Aunay, qui avaient avoué, furent châtrés, et leurs sexes jetés aux chiens. Ils furent écorchés vifs sur la place du Martrai, à Pontoise, écartelés, décapités et suspendus au gibet public.
    Leurs biens furent confisqués. Ceux qui les avaient aidés dans leur entreprise, favorisant les rencontres avec les épouses des fils du roi, ceux qui connaissaient l’existence de ces relations adultères parce qu’ils étaient au service des deux chevaliers ou des deux épouses furent noyés.
    On traîna Marguerite et Blanche, tondues, vêtues d’une robe grossière, dans des cachots de Château-Gaillard.
    Puis Marguerite fut placée dans une geôle ouverte aux vents d’hiver, et elle mourut de froid en quelques semaines.
    Blanche d’Artois, au moment où j’écris, sept ans après le constat d’adultère, est encore enfermée à Château-Gaillard et son voeu est d’être autorisée à se cloîtrer, peut-être à prendre l’habit si l’annulation de son mariage est prononcée.
    Quant à Jeanne, l’épouse de Philippe le Long, elle fut conduite à Dourdan dans un chariot couvert d’étoffes noires. Elle se lamentait, pleurait, criait à ceux qui s’arrêtaient pour la regarder passer :
    « Pour Dieu, dites à Monseigneur Philippe que je meurs sans péché ! »
    Je l’ai vu reine de France lorsque Philippe le Long monta sur le trône, comme Philippe V, succédant à son frère Louis le Hutin qui

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