Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
expulsés de toutes les villes du royaume. L’ordonnance royale ne leur laisse que trois mois pour vendre leurs biens meubles, et le roi s’arroge la propriété de leurs immeubles.
    Eudes de Thorenc raconte :
    « Emporté par un saint zèle pour la foi, Philippe arriva à l’improviste au château de Brie-Comte-Robert et livra aux flammes plus de quatre-vingts Juifs qui s’y trouvaient réunis. »
    On brûle les Juifs, on jette les blasphémateurs à la rivière, cependant que dans de nombreuses villes du royaume – Chartres, Sens, Noyon, Senlis, Laon et Paris –, on bâtit des cathédrales. Le légat pontifical consacre le maître-autel de Notre-Dame, cathédrale de Paris vouée à la Vierge, célébrant par sa magnificence la gloire royale.

    Philippe, qui livre au feu purificateur hommes, femmes et enfants juifs, s’agenouille devant l’autel et prie avec ferveur.
    Le soir, après le repas, il écoute les chansons du trouvère Elinand, ou bien la lecture des romans du poète Chrétien de Troyes qui raconte l’aventure des chevaliers Lancelot et Perceval, la quête du Graal.
    « Perceval vit les hauberts frémissants et les heaumes clairs et luisants, et les lames et les écus que jamais encore il n’avait vus, et il vit le vert et le vermeil reluire contre le soleil, et l’or et l’azur et l’argent », conte Chrétien de Troyes, évoquant la rencontre entre Perceval le Gallois et cinq chevaliers.
    Philippe Auguste est bien, lui aussi, un roi chevalier.

    Bon roi ? Ou prince perfide et cruel – couard, dit même le troubadour Bertrand de Born ?
    Qui est à même de juger un roi ?
    Il ne peut être pesé que par Dieu qui sait tout et charge les plateaux de la balance divine au Jugement dernier.
    Pourtant, mon aïeul Eudes de Thorenc s’est confié à son parchemin :
    « Philippe est un bel homme, écrit-il, bien découplé, d’une figure agréable, chauve avec un teint coloré et un tempérament très porté vers la bonne chère, le vin et les femmes. Il est généreux envers ses amis, avare pour ceux qui lui déplaisent, fort entendu dans l’art de l’ingénieur, catholique dans sa foi, prévoyant, opiniâtre dans ses résolutions. Il juge avec beaucoup de rapidité et de droiture. Aimé de la fortune, craintif pour sa vie, facile à émouvoir et à apaiser, il est très dur pour les Grands qui lui résistent, et se plaît à nourrir entre eux la discorde. Jamais, cependant, il n’a fait mourir un adversaire en prison. Il aime à se servir de petites gens, à se faire le dompteur des superbes, le défenseur de l’Église et le nourrisseur des pauvres. »

    Eudes de Thorenc a écrit ces lignes au mitan du long règne de Philippe Auguste qui dure quarante-trois années, de 1180 à 1223.
    Eudes, mon aïeul, est mort avant le roi, en 1209, et c’est son fils Henri qui, peu avant la disparition de Philippe Auguste, sans doute vers 1220, dessine un nouveau portrait du roi avec la main fidèle d’un vassal, mais l’esprit libre comme doit l’être celui d’un noble chevalier :
    « Oui, sans doute, écrit Henri de Thorenc, personne, à moins d’être un méchant et un ennemi, ne peut nier que pour notre temps Philippe ne soit un bon prince. Il est certain que sous sa domination le royaume s’est fortifié et que la puissance royale a fait de grands progrès. Seulement, s’il avait puisé à la source de la mansuétude divine un peu plus de modération, s’il s’était formé à la douceur paternelle, s’il était aussi abordable, aussi traitable, aussi patient qu’il se montre intolérant et emporté, s’il était aussi calme qu’actif, aussi prudent et circonspect qu’empressé à satisfaire ses convoitises, le royaume n’en serait qu’en meilleur état. Lui et ses sujets pourraient sans trouble et sans tumulte recueillir les fruits abondants de la paix. Les rebelles que l’orgueil dresse contre lui, ramenés par la seule raison, obéiraient à un maître juste et ne demanderaient qu’à se soumettre au joug. »

    Et comme si Henri de Thorenc s’adressait à ses descendants Denis de Thorenc et moi, Hugues de Thorenc, comte de Villeneuve, comme s’il craignait que son portrait du roi Philippe Auguste parût trop sombre, il ajoute :
    « Ô France tourmentée par les agents financiers de ton prince, tu as eu à supporter de dures lois et de terribles moments… Mais regarde cependant partout ailleurs : les autres rois qui gouvernent à leur guise sont encore de pire

Weitere Kostenlose Bücher