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L'Enfant-Roi

L'Enfant-Roi

Titel: L'Enfant-Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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méticuleusement il continua à la resserrer,
interdisant que ses enfants, les seigneurs de la Cour, et les ambassadeurs
étrangers fussent admis à la voir. Le duc et Grand d’Espagne, Monteleone, se
dirigeant vers l’appartement de Marie, Vitry roidement l’interpella :
« Où allez-vous, Monsieur ? Ce n’est pas là qu’il faut aller
maintenant ! C’est au roi ! »
    Belle lectrice, qui eût pensé qu’un jour j’éprouverais
quelque pitié pour celle que dans notre hôtel du Champ Fleuri nous appelions
l’Araignée ? Quand on lui apprit qu’on avait tué son mari, elle ne versa
pas une larme, mais plus généreuse que sa maîtresse, elle plaignit la
reine : « Pauvre femme, dit-elle, je l’ai perdue ! » Puis
elle mit ses diamants dans sa paillasse et se coucha dessus, feignant d’être
malade. On ne se contenta pas de l’arrêter et de l’alléger du fruit de ses
rapines. Le Parlement, qui n’aurait jamais osé montrer tant de zèle du vivant
de Conchine, se revancha de sa couardise sur une femme seule et sans appui. Il
l’accusa de sorcellerie, lui fit un procès inique et la condamna au bûcher.
    Le lendemain du vingt-quatre avril, le peuple, apprenant que
Conchine avait été enterré sous le chœur de Saint-Germain l’Auxerrois, alla cracher
sur la dalle qui recouvrait son corps, et cet outrage ne suffisant pas à
assouager son ressentiment, il descella ladite dalle, déterra le cadavre, et le
traînant dans les rues, l’alla pendre par les pieds à la potence du Pont Neuf.
Là, tous se ruèrent sur lui, le couteau à la main, et se mirent à le dépecer.
Ce qui demeura alors du maréchal d’Ancre n’étant plus qu’un tronc informe, les
furieux, comme déçus que cette masse n’eût plus forme humaine, et sentant
toutefois leur haine encore inassouvie, se consultèrent entre eux et décidèrent
de brûler ses pauvres restes. Louis, à ouïr cette nouvelle, fut marri que le
guet eût été impuissant à arrêter ces impiétés dès leur commencement.
    Les trois ministres créatures de Conchine furent, comme j’ai
dit, destitués dès la première heure, mais ils n’eurent pas le même sort, loin
de là. Mangin fut jugé et condamné au bannissement perpétuel, et mourut pauvre
et délaissé. Mangot fut laissé en liberté, et végéta.
    Mais au jeu des épingles que jouent les petites filles en ce
royaume, Richelieu tira la sienne avec une émerveillable adresse. Fort mal
accueilli de prime par le roi, il ramentut à Luynes la promesse qu’en son nom
Pont de Courlay avait faite à Sa Majesté de le renseigner sur toutes affaires
venant à sa connaissance. Il obtint alors de Louis de s’attacher à la personne
de la reine-mère en son probable exil, afin de servir d’intermédiaire entre
elle-même et son fils. En même temps, il promit à Déagéant d’échanger avec lui
des lettres chiffrées, par lesquelles il l’instruirait des intrigues qui se
pourraient nouer autour de la reine déchue. S’étant ainsi couvert des deux
côtés, Richelieu envisagea l’avenir avec la confiance que ses grands talents et
son peu de droiture l’autorisaient à nourrir.
     
    *
    * *
     
    Dans les jours qui suivirent, Louis, qui gardait une fort
mauvaise remembrance des visites protocolaires qu’il avait dû faire pendant
sept ans, et deux ou trois fois par jour, à une mère hautaine et rebéquante,
jouit tout à plein de son neuf privilège d’être débarrassé de cet humiliant
devoir. Aussi demeura-t-il inflexible, et dans sa résolution de ne voir Marie
qu’au jour et à l’heure qu’il aurait décidés, et dans sa décision de ne laisser
aucun ambassadeur étranger la visiter. Mais par ailleurs, il se relâcha prou de
ses rigueurs premières, étant attentif à la traiter plus humainement qu’elle
n’avait fait à son endroit. Il lui permit de voir ses filles, mais sans
accepter toutefois qu’elles la suivissent en sa retraite, non plus que Gaston,
de peur qu’elle ne se servît un jour de ses enfants comme otages pour prendre
barre sur lui.
    Il autorisa aussi ses amies intimes, son secrétaire,
Philipeaux de Villesavin, son premier écuyer, Monsieur de Bressieux et, bien entendu,
Richelieu, devenu chef du Conseil de la reine, de l’entretenir autant qu’ils le
voudraient.
    La retraite de la reine-mère en province ne fut pas à
proprement parler un exil, mais y ressemblait fort, en raison du fait qu’elle
n’avait guère eu le choix. Plutôt que de demeurer

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