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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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prière de sa mère.
    Peut-être espérait-il que sans lui on n’oserait prendre les décisions suprêmes. Peut-être voulait-il simplement s’étourdir. Quoi qu’il en soit, jamais il ne s’était montré aussi aimable avec ses hôtes…
    A huit heures du soir, il y eut dans l’hôtel du duc de Guise une réunion de tous ceux qui avaient placé en lui toutes leurs espérances et déjà le considéraient comme le roi de France – depuis Damville jusqu’à Cosseins, depuis Sorbin de Sainte-Foi jusqu’à Guitalens.
    – Messieurs, leur dit-il, cette nuit nous sauvons la religion de la Messe. Vous savez tous ce que vous avez à faire…
    Un profond silence accueillit ces paroles : on en attendait d’autres…
    – Quant à nos projets, continua Guise, ils sont remis à plus tard. La reine est sur ses gardes. Messieurs, montrons ce soir que nous sommes des sujets fidèles… et pour le reste, nous attendrons. Allez, messieurs.
    C’est ainsi qu’Henri de Guise donna contre-ordre aux conjurés. Il paraissait troublé, inquiet, furieux. Nul n’osa lui demander compte de ce brusque changement qui remettait à date inconnue la réalisation de tant d’ambitions.
    A partir de neuf heures et jusqu’à onze heures, le duc reçut les curés des diverses paroisses et les capitaines de quartier, qu’on alla chercher par groupes de huit à dix.
    A chaque groupe, il tint en termes brefs, d’une voix saccadée, le même langage :
    – Messieurs, la bête est prise au piège ; il faut se soûler de son sang… le roi le veut !
    – A mort ! A mort ! répondaient prêtres et capitaines.
    Et à mesure que chaque groupe se retirait, on lui donnait les dernières instructions ; le signal devait être donné par le tocsin de toutes les églises ; les fidèles serviteurs de la religion porteraient un brassard blanc, ceux qui n’auraient pas le temps de confectionner un brassard mettraient un mouchoir autour du bras.
    – Le roi le veut ! répétait Guise avec une rage concentrée.
    Puisqu’il était obligé de se courber, puisque cette royauté qu’il croyait tenir lui échappait, il voulait au moins qu’une part de responsabilité de ce qui allait sans doute se passer retombât sur Charles IX.
    A minuit, un lourd silence pesait sur la ville.
    La nuit était claire ; le ciel rayonnait de toutes ses constellations ; l’immensité paisible et sereine toute parsemée de diamant donnait la profonde, l’émouvante impression de la beauté immuable dans l’infini.
    O nuit d’été !… ô tranquille et majestueuse nuit d’été !… Comme tu étais douce, et quels rayons de suave bonté tombaient de tes étoiles d’or sur Paris recueilli dans un grave sommeil !…
    q

Chapitre 29 ETONNEMENT DE MONTLUC : SUITE DES AMOURS DE PIPEAU ET NOUVELLE RUINE DE CATHO
    O r, en cette soirée, trois scènes bien différentes, mais également étranges, des scènes de rêve et de fantasmagorie qu’on eût dites combinées par des gnomes poètes ivres de folie se déroulèrent sur les points divers de Paris.
    La première, au Temple.
    La deuxième, dans le repaire de Damville, aux Fossés-Montmartre.
    La troisième, dans le cabaret des
Deux morts qui parlent
.
    Vers neuf heures, deux femmes couvertes de grands manteaux furent mystérieusement introduites dans la prison du Temple et conduites à l’appartement du gouverneur : c’étaient Pâquette et La Roussotte.
    Montluc les attendait devant une table chargée de mets et de vins. Et, pour avoir liberté complète dans l’orgie, il avait donné congé à ses trois valets et à sa servante, lesquels, heureux de cette aubaine, qui leur arrivait toutes les fois que leur maître se voulait divertir, s’étaient empressés d’aller respirer au dehors un autre air que celui de la prison.
    – Vous voilà, mes tourterelles ! s’écria Marc de Montluc en éclatant de rire. Venez çà, que je vous embrasse !
    Mais Pâquette et La Roussotte, au lieu d’obéir, dégrafèrent leurs manteaux et les laissèrent tomber.
    Montluc ouvrit des yeux énormes et demeura bouche bée. Les deux ribaudes lui apparurent vêtues de satin, le cou enfoncé dans de vastes collerettes, la taille pincée et amincie sur le devant en pointe ; des costumes, non de bourgeoises, mais de princesses. Elles étaient chargées de bijoux au cou, aux oreilles, aux poignets, aux doigts ; elles étaient fardées comme des grandes dames.
    Dans son ingénuité, Catho avait cru devoir faire les choses en grand

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