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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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statue.
    Si Henri de Guise tenait de sa mère la beauté du visage et la noblesse outrée des attitudes, il tenait de son père la froide cruauté, la stupide férocité du reître rué sur le monde comme un fléau.
    François de Lorraine, duc de Guise et d’Aumale, prince de Joinville et marquis de Mayenne, avait été l’un de ces fléaux. Calculateur sans scrupule, professant pour la vie humaine un effroyable mépris, résolu à se couvrir de sang pour se couvrir de gloire, incapable des plus primitifs sentiments de justice et de pitié qui peuvent vagir au fond de la conscience humaine capable de mettre un royaume à feu et à sang pour la satisfaction des plus basses vanités, tuant quelquefois pour le seul plaisir de tuer – comme à Vassy [26] – sans cœur, sans esprit, sans entrailles, tel avait été l’illustre, le magnanime, le brave et glorieux François de Guise que les écrivains se sont toujours efforcés de nous présenter comme un modèle de vertu civique et guerrière.
    La reine, ayant essayé de faire baisser les yeux de son redoutable interlocuteur, résolut d’abattre au moins pour un temps ses espérances.
    – Monsieur le duc, dit-elle d’une voix glaciale, on vous a sans doute appris que le roi votre maître s’est décidé à débarrasser le royaume de hérétiques qui l’encombrent.
    – Je connais cette résolution, et vous m’en voyez tout heureux, madame, bien qu’elle soit un peu tardive…
    – Le roi est maître de choisir son heure. Mieux que les intrigants et les brouillons, il sait l’heure propice pour frapper les ennemis de l’Eglise… et ceux du trône.
    Guise ne sourcilla pas et continua de sourire.
    – Le roi, reprit la reine, le roi peut-il compter sur votre concours ?
    – Vous le savez bien, madame ! Mon père et moi nous avons assez fait pour le salut de la religion pour que je puisse reculer au dernier moment.
    – Bien, monsieur. De quelle besogne spéciale voulez-vous vous charger ?
    – Je prends Coligny, dit froidement Guise. Je prétends envoyer sa tête à mon frère le cardinal.
    Catherine pâlit. Cette tête, c’est elle qui avait promis de l’envoyer aux inquisiteurs ! Guise lui arrachait le meilleur morceau ! Pourtant, elle ne laissa rien paraître de ses craintes et de sa haine.
    – Soit ! dit-elle. Vous agirez au signal convenu : le tocsin de Saint-Germain-l’Auxerrois.
    – Est-ce tout, madame ?
    – C’est tout, dit Catherine. Pourtant, comme vous êtes le rempart du trône, comme vous êtes le fils chéri de l’Eglise, je prétends vous montrer les précautions que j’ai prises pour le cas où le Louvre serait attaqué… par les damnés parpaillots… Nancey !…
    Le capitaine des gardes de la reine parut aussitôt.
    – Nancey, demanda la reine, combien avons-nous d’arquebusiers en ce moment dans le Louvre ?
    – Douze cents, madame.
    Guise sourit.
    – Et puis ? reprit Catherine en le regardant de côté.
    – Et puis, continua Nancey, nous avons deux mille suisses, quatre cents arbalétriers et mille cavaliers logés comme nous avons pu.
    Cette fois, le front de Guise devint soucieux.
    – Et puis ? reprit la reine. Vous pouvez tout dire devant M. le duc, qui est un fidèle serviteur du roi.
    – Et puis, enfin, nous avons douze canons…
    – Les bombardes des jours de fête ? insista Catherine.
    – Non pas, madame : douze canons de bataille qui sont entrés secrètement au Louvre la nuit dernière.
    Guise pâlit. Il ne souriait plus. D’instinct, il se leva et prit une attitude où commençait à paraître une nuance de respect.
    – Achevez de rassurer M. le duc, dit Catherine. Que nous ont annoncé les messagers qui nous arrivent depuis trois jours ?
    – Mais, fit Nancey d’un air étonné, ces messagers annoncent simplement que les ordres du roi s’exécutent, et que chaque gouverneur a mis des troupes en marche sur Paris…
    – En sorte que ?…
    – En sorte que six mille cavaliers nous ont été signalés ce matin, et seront dans la journée à Paris ; en sorte que huit à dix mille fantassins doivent arriver ce soir ou demain matin au plus tard ; en sorte que sous trois jours, il y aura dans Paris ou sur les murs de Paris une armée de vingt-cinq mille combattants aux ordres du roi.
    Cette fois, Henri de Guise ne dissimula plus : il était atterré.
    – La partie est perdue ! gronda-t-il.
    Et il s’inclina devant la reine avec un respect qu’il ne lui avait jamais témoigné : il était

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