Les Amours qui ont fait la France
la nuit suivante, il la fit étrangler, pendant son sommeil, par un serviteur [16] .
Huit jours après, Chilpéric épousait Frédégonde qui devenait, cette fois, officiellement reine de Neustrie.
Comme bien on pense, le meurtre de Galswinthe ne plut pas à Brunehaut. Elle alla trouver son mari, le roi Sigebert, et lui demanda de déclarer la guerre à Chilpéric, ce qu’il fit sans discuter.
Gontran, roi de Burgondie, intervint alors comme médiateur et proposa un arrangement qui fut accepté par ses deux frères : Sigebert et Brunehaut renonçaient à leur droit de vengeance en échange des villes de Bordeaux, Limoges, Cahors, Lescar et Tarbes que Galswinthe avait apportées en dot à Chilpéric.
La paix était sauvée. Pas pour longtemps. En 573, le roi de Neustrie, qui ne pouvait se consoler de la perte de ses cités, envahit brusquement le territoire austrasien. De terribles combats eurent lieu. Finalement, Sigebert, ayant appelé à son secours des troupes barbares d’outre-Rhin, écrasa l’armée de Chilpéric. Épouvanté, celui-ci alla se réfugier avec Frédégonde à Tournai, tandis que Sigebert entrait dans Paris où Brunehaut vint le retrouver avec son fils Childebert et ses deux filles gracieusement prénommées Ingonde et Clodosinde.
Après quelques jours de repos, il se rendit à Vitry, près d’Arras, où la grande assemblée des Francs devait le proclamer roi de Neustrie après avoir prononcé la déchéance de Chilpéric. Hélas ! son règne fut court. À peine avait-il été, selon la coutume, élevé sur le pavois que deux hommes envoyés par Frédégonde se précipitèrent sur lui et le tuèrent au moyen de couteaux « dont la reine elle-même avait empoisonné les pointes ».
La mort de Sigebert renversait la situation. Immédiatement les Austrasiens qui assiégeaient Chilpéric à Tournai rentrèrent chez eux, libérant le roi de Neustrie ; lequel s’empressa de gagner Paris où Brunehaut, qui attendait son mari, fut bien étonnée de le voir surgir.
Elle se croyait reine : elle était prisonnière. Tout de suite, elle chercha à sauver son fils, Childebert, âgé de cinq ans. Une nuit, elle parvint à le faire sortir de la ville en le mettant dans une corbeille d’osier qui fut descendue par une corde le long des remparts. Un fidèle ami, le duc Gondwald, emporta l’enfant jusqu’à Metz où il fut proclamé roi aussitôt pour empêcher que Chilpéric ne mît la main sur l’Austrasie.
En apprenant cette évasion, le roi de Neustrie entra dans une grande fureur et, sur les conseils de Frédégonde, fit conduire la reine captive à Rouen où il pensa que, désormais, elle ne lui causerait plus aucun souci.
Or, pendant son séjour à Paris, la blonde et capiteuse Brunehaut avait fortement ému un petit jeune homme qui était tombé amoureux d’elle. La chose ne vaudrait pas la peine d’être mentionnée ; mais le destin qui, on le sait, a toutes les malices, voulut que ce soupirant fût précisément l’un des fils de Chilpéric : le jeune Mérovée que le roi avait eu de la malheureuse Audovère [17] .
Tourmenté par un désir qui ne tarda pas à être gênant, un beau matin, l’adolescent quitta le palais et alla retrouver la veuve de Sigebert en Normandie. Elle le connaissait peu et fut étonnée de le voir surgir dans ses appartements.
— Que voulez-vous ? demanda-t-elle.
Il se jeta à genoux.
— Je vous aime ! dit-il.
Puis il la porta sur un lit et lui fit oublier sous des caresses expertes le souvenir de Sigebert, mort quelques semaines plus tôt…
Cette idylle nouée à la hussarde prit rapidement un tour plus sérieux. Et, un jour, un émissaire arriva essoufflé à Paris. Il venait de Rouen en courant.
— Votre fils vient d’épouser sa tante, dit-il à Chilpéric.
Puis il tomba mort.
Cette nouvelle rendit le roi furieux, on s’en doute, mais réjouit Frédégonde. Depuis longtemps, elle cherchait à se débarrasser des fils que son époux avait eus d’Audovère, afin que ses propres enfants pussent, un jour, hériter du trône de Neustrie. Déjà, elle avait fait tuer Théodebert, l’aîné. Maintenant, elle tenait le moyen d’éliminer Mérovée.
Elle conseilla à Chilpéric de l’enfermer dans un couvent et de le faire tondre, sachant que le malheureux ne pourrait supporter cette marque infamante. En effet, lorsqu’on lui eut coupé ses longs cheveux blonds, Mérovée, désespéré, supplia son plus fidèle ami de le tuer
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