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Les cochons d'argent

Les cochons d'argent

Titel: Les cochons d'argent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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empereurs, mais acceptait de servir l’État à sa façon…

Première partie
    Rome
     
    été – automne, 70 ap. J.-C.

1
    En voyant la jeune fille gravir les marches quatre à quatre, je me suis dit qu’elle était bien trop vêtue.
    L’été touchait à sa fin. Les Romains grésillaient comme des beignets dans une poêle à frire. Les gens avaient délacé leurs sandales, mais n’avaient d’autre choix que de les garder – même un éléphant se serait brûlé les pattes en traversant la rue. Dans mon quartier, les ruelles étroites situées au pied de l’Aventin, certaines femmes avaient cherché refuge à l’ombre, dans l’embrasure d’une porte, où elles se tenaient avachies sur un tabouret, jambes écartées et torse nu… Je préfère ne pas vous décrire les hommes !
    Je me trouvais au Forum. Elle était en pleine course. Couverte comme elle l’était, elle risquait un coup de chaleur. Mais, elle n’avait encore succombé ni à l’insolation ni à l’asphyxie. Luisante comme une plaque de pâtissier bien graissée, elle escaladait à toute vitesse les marches menant au temple de Saturne. Elle fonçait droit sur moi, mais je ne fis pas le moindre geste pour m’écarter. Elle m’évita de justesse.
    Certains hommes naissent chanceux, les autres s’appellent Didius Falco…
    De plus près, je persistai à penser qu’elle aurait gagné à ne pas porter toutes ces tuniques. Ne vous méprenez surtout pas, j’aime les femmes légèrement vêtues – l’espoir est alors permis de les déshabiller. J’ai tendance à déprimer si je les trouve d’emblée sans la moindre parure, car soit elles viennent de se déshabiller pour un autre, soit j’ai affaire à un cadavre, vu mon secteur d’activité.
    Celle-ci débordait de vie. Au cœur d’une villa raffinée tout en marbre, près d’une fontaine, dans un jardin intérieur ombragé, une jeune fille oisive aurait sans doute conservé une impression de fraîcheur, même emmaillotée dans de délicates étoffes brodées, les chevilles et les poignets chargés de bracelets noirs et ambre. Si elle venait à sortir précipitamment, elle le regretterait sur-le-champ. Dans une telle canicule, elle fondrait sur place. Sa tenue légère ne tarderait pas à lui coller au corps, épousant chacune de ses formes délicates. Des boucles de sa belle chevelure colleraient délicieusement à son cou. Ses pieds glisseraient sur les semelles moites de ses sandales. La sueur coulerait à profusion le long de son cou, vers les recoins intrigants dissimulés sous une toilette recherchée.
    — Pardon… fit-elle, essoufflée… Pardon !
    Elle fit mine de me contourner. Le plus poliment du monde, je fis un écart dans le même sens. Elle esquiva. J’en fis autant.
    J’étais venu au Forum pour un rendez-vous avec mon banquier. J’avais le cafard. J’accueillis cette apparition provocante avec le vif intérêt d’un homme ayant besoin de se changer les idées.
    C’était une petite chose fragile. Je les préfère plus grandes, mais j’étais prêt à faire une exception. Elle était diablement jeune. À l’époque, j’avais un faible pour les femmes mûres. Celle-ci finirait bien par grandir, et je pouvais toujours patienter. Sautillant toujours sur les marches, elle jeta un regard paniqué en arrière. Je glissai un coup d’œil par-dessus son épaule – au demeurant fort élancée. Je ne m’attendais pas à une telle surprise.
    Ils étaient deux. Deux gibiers de potence, aussi larges que hauts, se frayaient un chemin dans la foule. Deux masses hideuses à la cervelle ramollie. Ils n’étaient plus qu’à une dizaine de marches. Naturellement, la gamine était terrorisée.
    — Poussez-vous, implora-t-elle.
    J’hésitai.
    — En voilà des manières ! trouvai-je le temps de me moquer.
    Les deux affreux n’étaient plus qu’à cinq pas.
    — Monsieur, laissez-moi passer, lança-t-elle, l’air méchant.
    Quelle trempe !
    Le Forum avait son air habituel. Dans notre dos, légèrement sur la gauche, se trouvaient le Capitole et le Tabularium, siège des archives. À notre droite, j’apercevais les tribunaux et, plus loin sur la via Sacra, le temple de Castor. En face, au-delà des Rostres en marbre blanc, se dressait le Sénat. Les banquiers et les bouchers s’agglutinaient sous les portiques et une foule transpirante, principalement masculine, occupait le moindre espace libre. Des jurons retentissaient, lancés à la cantonade par les

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