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Les émeraudes Du Prophète

Les émeraudes Du Prophète

Titel: Les émeraudes Du Prophète Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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nuit, il mourrait là, dans ce trou à rats, ou dans la cour de la prison, sans que quiconque sût ce qu’il était devenu. Les régimes totalitaires s’entendent si bien à faire disparaître ceux qui les gênent ! Et, à ce propos, il en vint à se demander si l’appel à l’ambassadeur italien serait une bonne chose : Aldo savait depuis longtemps qu’il était mal vu à Rome, même si la reine avait été l’amie de sa mère, parce que le véritable maître ce n’était plus Victor-Emmanuel III mais Benito Mussolini et qu’un diplomate établi par lui n’avait rien à faire du prince Morosini. En fait, le prisonnier pensait qu’il ne lui restait à accomplir qu’un seul geste digne de lui et de sa maison : mourir la tête haute, avec sa fierté et son élégance habituelles, et même si personne rien savait jamais rien.
    Et le temps continua de couler : la fin de la journée, la nuit, un nouveau jour, une nouvelle nuit… Rien ne bougeait. Le silence à nouveau, étouffant, angoissant…
    Pourtant, alors que tout semblait dormir, la porte de la cellule s’ouvrit, laissant fuser la lumière d’une lampe électrique. Deux hommes entrèrent et le cœur d’Aldo manqua un battement : venait-on le chercher pour un jugement nocturne suivi d’une discrète exécution ? Alors, en dépit du froid qui le faisait trembler et de son aspect minable, le moment était venu de montrer quel homme il était et entendait être jusqu’au bout, il se leva, froid, calme, très droit, hautain même tel qu’il voulait être en face de la mort qu’on lui réservait.
    — Vous venez me chercher, messieurs ?
    — Nullement, fit une voix qu’il avait déjà entendue. Je viens seulement parler un peu avec vous…
    Dans le faisceau de lumière il reconnut alors la figure madrée d’Ibrahim Fahzi, son confrère du Grand Bazar. Ce qui ne laissa pas de le surprendre mais il se garda bien de le montrer :
    — J’ignorais, se contenta-t-il de laisser tomber du bout des lèvres, que vous aviez accès si facilement aux prisons de votre ville.
    — Facilement non, mais avec de l’argent on obtient sans trop de peine ce que l’on désire…
    — Je croyais cependant votre gouvernement sévère ?
    — Il l’est, certes, mais à cinq cents kilomètres. Et moi, il fallait que je vous parle.
    D’un geste de la main Ibrahim Fahzi fit signe au geôlier de s’éloigner. Ce que celui-ci fit en lâchant quelques mots qui devaient indiquer la limite de l’entretien et que le visiteur approuva de la tête.
    — Eh bien, je vous écoute, soupira Morosini. Cela me fera toujours passer un moment…
    — Ceci aussi, peut-être ? dit Fahzi en sortant d’une de ses poches une flasque de voyage. Il y a là un excellent cognac qui devrait vous réchauffer. On gèle ici…
    — J’aurais préféré un sandwich ou un café chaud. L’alcool ne vaut rien sur un estomac vide…
    — On ne vous nourrit pas ?
    — Voyez vous-même ! fit Aldo en désignant le quignon de pain dont il n’avait mangé que la partie encore indemne de moisissure. Je suppose que chez vous l’on espère amener les prévenus aux aveux en les affamant ?…
    — Je suis désolé et croyez que je vais faire le nécessaire pour que vous soyez mieux traité. Si… toutefois vous décidez de rester ici ?
    — Parce que cet agréable séjour dépendrait de ma volonté ?
    — Peut-être…
    — En ce cas, partons ! Je me suis suffisamment amusé…
    — N’exagérons rien ! Mais vous pourriez recouvrer la liberté assez rapidement si vous montrez quelque sagesse.
    Morosini n’avait jamais aimé, en affaires comme dans la vie courante, que l’on tourne autour du pot :
    — Si vous éclairiez ma lanterne ? Cela veut dire quoi ?
    — Que je possède assez d’influence pour que votre cas soit examiné avec plus de sérieux et que la police consente à chercher le vrai coupable du meurtre. Ce qu’elle ne fera pas puisqu’elle en tient un des plus convenables…
    — Convenables ? Et la Justice dans tout cela ?
    — Oh !…
    Le geste qui accompagnait l’exclamation en disait beaucoup plus long.
    — Je vois ! En ce cas, dites-moi en quoi consisterait pour moi la sagesse ?
    — À me confier ce que la voyante vous a révélé.
    Le sourire à la fois ironique et nonchalant de Morosini reparut pour la première fois depuis longtemps :
    — Vous voulez connaître mon avenir ? C’est affectueux !
    — Le moment est mal choisi pour

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