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Les émeraudes Du Prophète

Les émeraudes Du Prophète

Titel: Les émeraudes Du Prophète Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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appellation pas lady Dawson. Ce titre-là appartient à sa mère.
    Un énorme soupir déchaîna une tempête dans l’écouteur :
    — Monsieur le prince a raison mais cette illusion me consolait un peu. Depuis que Monsieur est rentré je n’entends parler que de cette dame. Entre-temps, il n’arrête pas de lui téléphoner. J’ai peur qu’il ne soit bien atteint…
    — Ne vous tourmentez pas trop, Théobald. Monsieur n’est pas encore marié.
    — Monsieur le prince est bien bon de m’encourager et je l’en remercie du fond du cœur. Y a-t-il un message pour Monsieur ?
    — Oui. Dites-lui que je rencontrerai après-demain soir la personne qui nous intéresse. Je le rappellerai.
     
    En pénétrant, à l’heure indiquée sur l’invitation, dans le magnifique hôtel de la rue de Monceau d’où la lumière rayonnait par toutes ses fenêtres, Morosini pensait qu’en dépit de la guerre, le faste et l’élégance des grandes maisons françaises étaient toujours au rendez-vous. Le couple princier – lui un peu pâle mais souriant, elle superbe en Chantilly noir avec d’admirables bijoux anciens – recevait ses invités avec une grâce qui n’excluait pas une dignité toute royale. La princesse Cécile, surtout, était impressionnante. Le noir mat du deuil qu’elle ne quittait plus depuis que son fils Napoléon était tombé au champ d’honneur en 1916 rehaussait l’éclat de ses diamants, sans doute, mais aussi une beauté blonde dont elle conservait plus que des traces… Elle accueillit son adversaire de l’avant-veille en lui offrant une main parfaite et scintillante sur laquelle il s’inclina, le présenta à son époux et le laissa aller prendre sa place dans la salle de bal où une scène avait été aménagée. Là se produiraient la fameuse basse Fédor Chaliapine et les balalaïkas de Tchernoyarov.
    Dans la grande salle où tout portait la marque des deux empires français – la princesse Murat était en effet la première dame du monde impérial sur le territoire national – se réunissait lentement une bonne partie du Tout-Paris, celle qui pouvait payer très cher le droit de s’asseoir sur l’une des multiples chaises dorées dont la maison Catillon s’était fait une spécialité. Seul, le premier rang offrait des fauteuils aux hôtes les plus illustres égrenés aux côtés de celle qui allait présider la soirée : la grande-duchesse de Hohenburg-Langenfels qui, bien sûr, arriverait sans doute la dernière.
    Morosini salua quelques têtes connues, serra des mains, en baisa d’autres sans cesser de guetter, du coin de l’œil, l’entrée de celle qu’il attendait. Enfin, elle parut et il crut que son cœur allait s’arrêter. Ses yeux ne la quittèrent plus. Elle était d’une beauté à couper le souffle dans l’enroulement de velours vert allongé d’une petite traîne qui étreignait sa longue et mince silhouette depuis les petits pieds chaussés d’or jusqu’à la blancheur des épaules nues dont aucun bijou ne venait déparer la ligne douce. Peut-être pour mieux mettre en valeur les boucles d’oreilles qui tremblaient contre le long cou gracieux : deux magnifiques émeraudes, simplement serties d’or ? Elles étaient du même vert, exactement, que les grands yeux légèrement étirés vers les tempes dénonçant chez cette magnifique créature une trace de sang mongol. Elles signaient la splendeur orgueilleuse de la belle Mingrélienne dont le visage au teint pâle semblait tiré en arrière par le poids d’une somptueuse chevelure d’un blond fauve nouée en torsades supportant un diadème d’or et d’émeraudes. Comme les épaules, les bras étaient nus, sans le moindre bracelet et, seule, une énorme émeraude écrasait plus qu’elle ne l’ornait une main fine et délicate.
    Un murmure d’admiration avait salué son entrée et la suivait tandis que d’un pas nonchalant, un peu las même, elle se laissait guider par ses hôtes jusqu’à son fauteuil. Cette allure particulière était pleine de grâce sans doute mais si l’on y ajoutait la blancheur du visage et les cernes, légers et très émouvants, qui marquaient les beaux yeux on pouvait se demander si la grande-duchesse était en parfaite santé.
    De tout le concert, Morosini n’entendit pas grand chose tant son esprit se concentrait sur cette femme. Sans l’avoir approchée, il était certain que ses joyaux étaient l’Ourim et le Toummim et il devait serrer ses mains sur le

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