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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Que votre élan soit pareil à la poussée d’un arbre ou d’un clocher : vers le ciel.
    — Vous parlez divinement, ricana Briatexte. Êtes-vous un maçon ou bien quelque ancien clerc ?
    Bressolles s’abstint de répondre et Norbert, une nouvelle fois, s’ébaudit.
    Ils avancèrent une lieue encore à l’ombre du ciel gris. Les bois devant eux s’épaissirent ; leurs feuillages mouchetés d’or et de pourpre devinrent une toison crépue, sauf à mi-hauteur d’une colline couronnée d’un château.
    — Augignac, dit Ogier. Je n’y suis jamais monté.
    C’était une enceinte d’un brun violacé ; cinq ou six tours, un donjon carré, le tout d’apparence rébarbative sous la sombre caresse des nuages.
    — Hâtons-nous, compagnons… Il est vrai que Renaud veut ma mort et qu’il faillit me la donner à deux reprises… Envieux, falourdeur [14] et sachant qu’il me faut passer par ici, il peut avoir embûché des garçons en des lieux propices… Eh bien, nous déjouerons ses desseins… Venez : là-bas nous serons en sûreté.
    Ils avancèrent le long de grandes roncières en direction d’un pan de forêt débordant largement sur des friches où les chevaux s’engluèrent jusqu’aux boulets. Marchegai hennit et se regimba.
    — Nos bêtes sont à bout.
    — Eh oui, messire Ogier. Sommes-nous loin de cette cité qu’on appelle Oradour ?
    — Sans doute pas, Thierry.
    Et les arbres furent là, inévitables et superbes. Sous leur voûte ruisselante, la chanson des sabots devint plus doucereuse.
    Le chemin s’éleva, s’encombra de racines. Nulle parole ne fut plus échangée. Ils allaient, soucieux, attentifs, entre les fourrés feuillus, hauts et ténébreux, où pouvait se musser tout ce qui tue : l’homme et le sanglier. Parfois un oiseau criait en tombant de ce haut plafond de ramures où le ciel de moins en moins affleurait. Et soudain, les sabots crépitèrent sous un long rocher livide, dentelé d’ombres et glissant comme du verglas.
    — Doucement, compagnons. Je crois que si l’on nous suit, c’est ici qu’on perdra nos traces : la nuit vient et les fers, là-dessus, ne laisseront aucune marque.
    — Messire, dit Thierry, Veillantif est hodé. Nous avons dû couvrir quinze lieues !
    Quinze lieues. Tancrède et Jean avaient-ils trouvé, dans le val de Verdeney, les chevaux qu’ils avaient laissés à leur intention ? Blessé comme il l’était, Jean ne supporterait jamais une aussi longue chevauchée…
    — Voyez ! s’écria Bressolles.
    Il désignait, dans l’échancrure d’un coteau, une clairière où s’élevait un toit de chaume. Une sorte de falaise en limitait deux côtés.
    — Une jarrissade [15] et une grange !… Allons-y, dit Ogier. Viens, Thierry. Laisse Passavant à Raymond.
    — Gardez-vous ! leur recommanda Bressolles. Elle appartient peut-être aux Augignac.
    — Qu’elle soit ou non leur bien, nous n’avons pas le choix !
    Ogier tira son épée du fourreau et son écuyer l’imita. Devant eux, les troncs musculeux se raréfièrent ; les feuillages s’ouvrirent sur un ciel bourrelé d’ombres stagnantes. Précédés de Saladin, ils entrèrent dans le pré herbu et, méfiants, contournèrent le bâtiment.
    — Personne ! s’exclama Thierry. On ne saurait souhaiter meilleur asile. C’est solide et bien coiffé.
    — Tout près, dit Ogier, il y a de quoi boire.
    À l’angle des rochers, un filet d’eau fluait dans une vasque de pierre, puis coulait, s’élargissait, devenait ruisseau. On entendait au loin le chant d’une cascade. Ogier rengaina son épée ; Thierry en fit autant et mit pied à terre.
    — Un bel endroit, pas vrai, messire ?
    Ogier sourit en lui tendant son écu. Ensuite, quittant sa selle, il entraîna Marchegai jusqu’à l’abreuvoir. Saladin vint laper cette eau ridée par le souffle du destrier.
    — Quelle paix, messire ! dit Adelis en s’approchant. Pendant ces quinze jours de siège, nous avions oublié les sources, les oiseaux et les feuilles…
    Elle caressait Titus, immobile sous son chaperon : il commençait à la connaître.
    — Donnez-le-moi.
    Ogier défit, au poignet de la jeune femme, la longe qui la reliait au rapace. Bientôt, les serres grises, acérées, s’incrustèrent dans les mailles de son poing, tandis qu’Adelis retirait son gant et le coinçait dans sa ceinture. Elle remua, frotta son bras engourdi, puis elle but une jointée d’eau claire [16] . La pénombre et le vert

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