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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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du
Palais-Royal.
    Déjà, le comte de Nissac remettait l’épée en
son fourreau et, se baissant, ramassait sa cape noire et son chapeau marine à
plumes blanches et rouges.
    Ému, le cardinal donna l’accolade au comte et,
le regardant droit dans les yeux :
    — Demandez, monsieur, il sera fait selon
votre désir.
    Le comte de Nissac esquissa un sourire poli.
    — Votre Éminence… J’appartiens à l’armée
de monsieur le prince de Condé et venais à sa demande faire rapport sur la
situation de…
    Il hésita, comme si sa réponse lui semblait
sans rapport avec la situation, puis acheva :
    — … l’artillerie royale.
    — J’entends bien, comte, mais ce n’est
point là ce que je vous demande. Que voulez-vous ?
    — Je ne veux rien, votre Éminence.
    Incrédule, Mazarin l’observa.
    — Comment ? Risquant la vôtre, vous
sauvez la vie de l’homme le plus haï du royaume, là où tant d’autres se
seraient joints aux assassins, et vous ne demandez rien ?
    Depuis quelques instants, le comte de Nissac, les
yeux baissés et l’air tourmenté, caressait les jolies plumes rouges et blanches
de son chapeau marine.
    Lorsqu’il leva les yeux, ceux-ci parurent bien
sombres au cardinal qui, s’y connaissant en hommes, sentait chez son sauveur
sourde colère qui montait à grande vitesse.
    Mais lorsqu’il parla, la voix fut calme et le
cardinal admira, chez Nissac, cette manière de dominer ses sentiments.
    — Votre Éminence comprendra sans doute
que j’ai satisfait aux exigences de l’honneur, et au goût de la justice. Dès
alors, nous pourrions tomber d’accord pour admettre que mon comportement, loin
d’être de quelque façon remarquable, relève du plus grand naturel chez un
gentilhomme…
    Il hésita et reprit :
    — Ou chez n’importe quel homme.
    La remarque frappa le cardinal en ce qu’elle
lui sembla tout à fait inhabituelle pour un noble, à moins qu’il ne fût
philosophe.
    Mais, déjà, Nissac reprenait, implacable :
    — Si Votre Éminence récompense de quelque
façon le naturel, où trouvera-t-elle suffisamment de trésors pour combler ceux
qui se dépassent ?
    Mazarin s’aperçut que Nissac chancelait
légèrement.
    — Êtes-vous blessé, comte ?
    L’autre eut un pâle sourire.
    — Le voyage depuis les armées fut long, et
je me crois atteint de dysenterie.
    — Je vais vous faire soigner !
    — Non point, Votre Éminence. Mon officier
d’escorte, le lieutenant Sébastien de Frontignac, y a pourvu.
    Il montra une boîte de vermeil et reprit :
    — J’ai besoin de sommeil, dès que j’aurai
rendu compte à monsieur le prince de Condé.
    Intrigué, Mazarin demanda :
    — Et qu’est-ce que votre officier d’escorte
a caché dans cette boîte mystérieuse ?
    Le comte de Nissac eut un franc sourire qui le
rajeunissait et, outre la reconnaissance, lui valut sur l’instant et à jamais
la sympathie du Premier ministre :
    — Du sang de lièvre séché au soleil en un
mélange de vin vermeil à quoi s’ajoute… que Votre Éminence veuille bien me
pardonner… de la fiente de chien qui trois jours durant n’a rongé que des os. Je
dois boire ce mélange en le même temps que je verse en ma bouche contenu d’une
fiole de lait qu’on fit bouillir puis refroidir et bouillir de nouveau en y
jetant cailloux de rivière fort échauffés à feu ardent.
    Il hésita un instant et continua, toujours
souriant :
    — Deux fois par jour, matin et soir.
    Le cardinal, proche du fou rire, lança :
    — Mais votre homme est un sorcier ! Et
de la pire espèce qu’on vit jamais !
    — Il fréquente l’église avec piété mais
en ces choses, il est assez surprenant ! répondit Nissac en riant.
    — Et vous y croyez ?
    — Cet homme fait des merveilles, Votre
Éminence.
    — Soignez-vous vite, comte de Nissac, ainsi…
ou autrement. Et ne repartez point à la guerre sans me venir voir.
    Pourtant, le comte
était reparti aux armées sans faire ses adieux au cardinal, attitude que celui-ci
attribua à la pudeur de son sauveur, et qu’il respecta.
    Mais, aujourd’hui, les choses prenaient
tournures mauvaises et c’est aux armées que le cardinal avait fait chercher le
comte de Nissac.
    Au reste, on l’attendait d’un instant à l’autre,
Mazarin ayant désigné le marquis d’Almaric pour lui ouvrir la route.

4
    Le maître verrier avait accepté les termes du
marché et, depuis six mois qu’il « travaillait pour eux », il
parvenait enfin à ne

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