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Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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police de Sa Majesté, les portes ne claquaient pas comme au Quai des Orfèvres mais les brouillards extérieurs étaient renforcés par la fumée des pipes – dont chacun sait qu’elles sont propices à la réflexion – ou des cigarettes. Un planton qui ne fumait pas, lui, ouvrit devant le visiteur une porte matelassée et celui-ci put constater que la pièce où travaillait son ami était toujours la même avec ses classeurs d’un brun presque noir, ses lampes à opalines vertes, son fauteuil de cuir noir usagé et ses chaises inconfortables. L’unique changement – et il était de taille ! – venait de Gordon Warren lui-même : tous les souvenirs qu’en conservait Aldo étaient gris. Or, il arborait ce jour-là un complet bleu marine admirablement coupé comme d’habitude, agrémenté en outre d’un bleuet à la boutonnière. L’inévitable macfarlane était cependant pareillement présent et pendait à un porte-manteau comme un drapeau en berne.
    — Heureux de vous voir, Morosini, fit Warren venu à sa rencontre. J’espère que votre visite est purement amicale ?
    Au physique il n’avait pas changé : long, maigre, chauve, l’œil bouton d’or et la lèvre mince, il tendit à son visiteur une main osseuse mais forte qui broya joyeusement ses aristocratiques phalanges. Le ton était calme, uni mais à la petite étincelle dans l’œil et au léger frémissement des lèvres bien rasées on pouvait déduire une joie extravagante qu’Aldo eût vivement regretté de ternir :
    — Si j’ai fait le voyage depuis Paris, c’est uniquement pour vous voir, dit-il. J’avoue que j’ai une ou deux questions à vous poser mais j’aurais pu vous écrire. Je n’ai pas résisté. Mais d’abord comment allez-vous ?
    — Bien, je suppose. C’est une question que je ne me pose jamais. En revanche, donnez-moi des nouvelles de Lisa mais si vous étiez à Paris peut-être n’en avez-vous pas de fraîches ?
    « Sacré policier ! pensa Morosini, tu veux savoir ce que je faisais en France ? » Cela ne le gênant pas de répondre il s’exécuta :
    — Elle a profité de mon voyage pour venir faire le tour des couturiers et elle est en forme. Moi j’avais été appelé en consultation par votre confrère Langlois au sujet d’une affaire assez vaseuse…
    — Les curieuses collections de ce vicomte qui s’est octroyé une mort présidentielle, je suppose ?
    — Décidément on ne peut rien vous cacher, dit Aldo en riant. Nous avons réussi à rendre certains bijoux à leurs véritables propriétaires.
    — Si vous pensez que quelques-uns d’entre eux étaient anglais, c’est non.
    — Je le savais et je n’aurais pas affronté un Pas-de-Calais grincheux pour ça. Ce qui m’amène est une histoire bien plus ancienne qui remonte à un temps où nous ne nous connaissions pas. Vous souvenez-vous de la mort tragique de la cantatrice Teresa Solari ?
    — Tuée au Covent Garden en décembre 21 ? Pas facile à oublier. La femme était fort belle et sa voix exceptionnelle… mais comment en êtes-vous venu à vous y intéresser ? À cause des bijoux qu’on a volés sur son cadavre ?
    — Naturellement. Eux aussi étaient exceptionnels, ou plutôt le sont toujours car je suppose qu’ils doivent être quelque part. Vous n’en auriez pas une petite idée par hasard ?
    — Aucune. Les journaux en auraient fait état… Mais comment cette histoire est-elle venue jusqu’à vous ? À l’époque votre notoriété était encore… jeune ?
    — Elle n’est pas encore si vieille. C’est le peintre Boldini qui m’a renseigné. Un vrai conte fantastique mais il vaut d’être rapporté et en venant je n’avais pas l’intention de vous cacher quoi que ce soit.
    Avec sa précision habituelle, Morosini évoqua le portrait de Madame d’Ostel sans se perdre dans les détails et sans céder à un lyrisme dont il savait que Warren avait horreur. Celui-ci l’écouta avec une attention soutenue, tout en prenant quelques notes.
    — Des joyaux Médicis ? Peste ! soupira-t-il quand Aldo eut fini. Votre Boldini ne me l’avait pas dit. Je me demande pourquoi d’ailleurs ?
    — Je crois qu’il avait l’impression de ne pas vous intéresser et aussi que vous redoutiez de le voir se mêler à votre enquête.
    — Il n’a pas entièrement tort. Je me souviens qu’il m’avait un peu agacé avec le lamento dont il m’a régalé à l’époque. En plus il ne me lâchait pas et trouvait

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