Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Rapines Du Duc De Guise

Les Rapines Du Duc De Guise

Titel: Les Rapines Du Duc De Guise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
Vom Netzwerk:
maintenant
dans toutes les églises. Par moment, il reconnaissait le son de la Babillette
et de la Muette, les deux des grandes cloches de Notre-Dame. La bande du
gentilhomme à l’armure brillante s’était éloignée pour s’occuper d’une autre
famille d’hérétiques. Les voisins déshabillaient les victimes afin de rapiner
leurs vêtements. Des pillards vidaient la maison, d’autres découpaient les
têtes des cadavres avec des tranchoirs pour les accrocher aux fenêtres, d’autres
encore attachaient les corps par des cordes et les tiraient vers la Seine, sans
doute pour les jeter à l’eau.
    Toujours en regardant la rivière et les corps
qui flottaient, Olivier se souvint des odeurs âcres de chairs grillées, du feu,
de la fumée, des ombres qui couraient, des éclairs rouges des épées et des
poignards, des cris incessants : « Vive Jésus ! Vive la messe ! »
    En bas de la rue, une autre troupe armée était
apparue. Sous son morion, Olivier avait reconnu le dizainier de leur quartier ;
un brave homme qui venait souvent chez eux parler avec son père. Il y avait
aussi plusieurs bourgeois de sa connaissance.
    — Il y a des hérétiques ici ! avaient
crié des voisins en désignant une porte.
    Aussitôt la troupe s’était dirigée vers la
maison. Quelques minutes plus tard, on jetait les corps d’une femme et de son
fils par les fenêtres. Le garçon était son ami et il n’avait pu détacher son
regard du petit corps ensanglanté.
    — Que fais-tu encore là ! avait crié
son père. Va dans la cuisine et n’en bouge plus !
    Jamais, il ne l’avait vu ainsi. Son père ne
maîtrisait plus ses gestes et son visage était secoué de tremblements
convulsifs tant il avait peur. Il avait poussé le volet de bois intérieur, fermé
le verrou, et l’avait saisi par le bras pour l’emmener. Ensemble, ils avaient
dévalé l’escalier. En bas, son père avait vérifié que la grille qui doublait la
porte était baissée.
    Tout le monde s’était retrouvé dans la cuisine.
La gouvernante, les servantes, le commis de son père. Tous étaient terrifiés, livides.
Du dehors, des cris assourdis leur parvenaient : des hurlements, des
supplications, et surtout le fracas continuel des arquebuses et des pistolets. La
gouvernante s’était mise à prier, aussitôt imitée par tous.
    Son père avait tenté de les rassurer.
    — Que risquons-nous ? Ils ne s’attaquent
qu’aux huguenots et nous sommes bons catholiques. Nous n’avons pas à nous en
mêler !
    La gouvernante l’avait regardé, les yeux
emplis de larmes et de tristesse.
    — Et s’ils croient qu’on est des
hérétiques ?
    — Nous sommes de bons catholiques ! avait
crié son père d’une voix étranglée, tout en frappant du poing sur la table. Nous
allons à la messe et à confesse. Tout le monde le sait dans le quartier !
    Il devait pourtant penser que cette protection
était insuffisante, car il avait ajouté au bout d’un instant :
    — Et puis la maison est solide, c’est une
forteresse imprenable.
    Le tocsin sonnait de façon continue, sans pour
autant couvrir les bruits du massacre, les hurlements d’agonie et les coups de
feu.
    Alors que le bruit faiblissait, son père était
retourné dans l’escalier pour observer la rue par une meurtrière.
    — Alors ? avait demandé la
gouvernante, en le voyant revenir.
    — Tout est rouge de sang, Margotte, avait-il
dit en cachant mal sa détresse. Le bijoutier qui habite en face de l’épicier du Drageoir Bleu est pendu à sa fenêtre avec sa femme. Il y a des bandes de
gueux dans la rue qui dépouillent les cadavres.
    Olivier se souvenait encore que Margotte l’avait
serré dans ses bras en priant.
    — Il y a d’autres pillages vers la rue de
Venise, avait-il ajouté. L’auberge du Porcelet Blanc est saccagée. Il ne
faut pas sortir, il suffit d’attendre. Le roi va forcément envoyer des Suisses
ou des gardes françaises pour rétablir l’ordre.
    Ils avaient mangé le pain sec qui restait. La
cuisinière avait préparé une épaisse soupe, mais en montrant les récipients
alignés contre le mur, elle les avait prévenus qu’elle n’avait presque plus d’eau.
    L’eau était rare. Chaque matin, la cuisinière
allait à la fontaine pour remplir les quinze seaux indispensables pour la boisson
et la cuisine. Seule une petite quantité était utilisée pour se laver les mains
lorsqu’elles étaient trop sales, et aux beaux jours, ils se les

Weitere Kostenlose Bücher