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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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noble.
    — Allons donc ! s’était exclamé don Diego sans
pouvoir se retenir de rire. Si l’un de ses domestiques commet une faute, et les
serviteurs du comte en commettent un grand nombre, il lui attache un coussin
sur les fesses et l’oblige à courir et à sauter partout dans sa chambre pendant
que lui, de son lit, essaie de l’atteindre d’une flèche dans le cul.
    Tous les cavaliers avaient explosé de rire. Même Hernando
avait souri en imaginant le comte en chemise de nuit, obèse et en sueur,
nerveux et excité, tâchant de viser avec son arbalète un serviteur n’arrêtant
pas de bondir par-dessus chaises et meubles, un coussin attaché au cul. Mais
son sourire s’était effacé dès que son regard avait croisé celui de José
Velasco qui, en tant que serviteur de don Diego, s’agitait nerveusement sur sa
monture.
    — On dit…, avait bafouillé don Diego entre deux éclats
de rire, qu’il est devenu le plus sévère des majordomes de sa propre maison et
qu’à tout moment… – l’écuyer royal dut marquer une pause avant de se
redresser, une main sur le ventre – … il enquête sur le travail de tous
ses domestiques et esclaves, à propos d’éventuelles fautes qu’ils auraient
commises, afin de pouvoir les lâcher ensuite dans sa chambre comme des lièvres.
    — Et la comtesse ? était parvenu à articuler entre
deux gloussements l’un des hommes.
    — Hou ! Très inquiète !
    Don Diego était à nouveau plié de rire.
    — Elle a donné aux malheureux des coussins en coton, à
la place de ceux en soie, pour ne pas se retrouver sans domestiques… et sans
mobilier !
    Les rires avaient éclaté une nouvelle fois au sein du groupe
de cavaliers.
    Tel était l’homme qui allait monter son cheval ! pensa
Hernando, croyant entendre encore les rires des nobles bourdonner à ses
oreilles.
    Il stimula Azirat d’un simple claquement de langue, et le
cheval partit au galop. C’était une magnifique journée d’automne. Il pourrait
s’enfuir ! Il pourrait galoper jusqu’à… où ? Et sa mère ? Elle
n’avait plus que lui ; il n’avait plus qu’elle. Il galopait tranquillement
depuis une demi-lieue, sans but précis, quand il sentit Azirat se raidir :
à leur droite s’étendait un pâturage où paissaient des taureaux. Le cheval
semblait vouloir jouer avec eux, comme tant d’autres fois.
    Hernando ne réfléchit pas davantage. Il raccourcit les
rênes, baissa les talons et serra les genoux afin d’être bien fixé à sa
monture. Il entra dans le pâturage et, pendant un bon moment, goûta de nouveau
au bonheur. Il cria et rit en caracolant devant les cornes des taureaux,
s’autorisant même à effleurer leurs pointes de ses doigts lors des esquives.
Azirat était agile et rapide, freinant doucement, soumis à ses jambes et à ses
mouvements comme il ne l’avait jamais été. C’était le meilleur ! Malgré sa
couleur rouge, c’était le meilleur cheval parmi les centaines passées par les
écuries du roi. Et ce magnifique exemplaire allait tomber entre les mains du
pire cavalier, du plus prétentieux de toute l’Andalousie.
    À un moment précis, Azirat s’arrêta face à un immense
taureau noir zain ; les deux bêtes se mesurèrent de loin, le taureau
baissant la tête et le cheval piaffant sur place.
    Alors Hernando crut entendre les sifflets et les huées des spectateurs
à l’encontre du comte d’Espiel, sur la place de la Corredera.
    Le cheval donnait des coups de tête et de pattes, comme si
lui-même appelait son ennemi. C’est étrange, pensa Hernando. Il sentait entre
ses jambes la respiration accélérée d’Azirat.
    Soudain, le taureau chargea, furieux. Hernando tira sur les
rênes et pressa les flancs d’Azirat afin de le tenir prêt à bondir. Mais il
remarqua que le cheval ne répondait pas. En une fraction de seconde, les huées
qui résonnaient encore dans sa tête se transformèrent en applaudissements et en
hourras de la foule. Alors, devant les yeux enragés du taureau zain, il lâcha
les rênes d’Azirat pour le laisser choisir son destin. Le cheval se cabra sur
ses pattes avant et offrit sa poitrine aux cornes du taureau.
    L’impact fut mortel et Hernando se retrouva projeté à
plusieurs mètres tandis que le taureau, au lieu de s’acharner sur le cheval
étendu par terre, se retirait fièrement, obéissant peut-être à la loi qui régit
les animaux, en hommage à celui des siens qui avait décidé de ne pas fuir
devant ses

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