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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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Hernando.
    Malgré la saleté, Hernando crut sentir la douceur du voile.
Il tomba à genoux et pleura, le visage enfoui dans le tissu. Toutefois, ces
sanglots étaient différents de ceux qui l’avaient assailli jusque-là : ils
étaient libérateurs. Ubaid était mort, pas de ses mains, mais sa misérable
existence avait pris fin.
     
    Aisha ne trouva pas la tranquillité qu’elle recherchait
quand, cachée parmi la foule, elle regarda Hernando, le voile fortement serré
dans une main, saisir de l’autre les rênes d’Azirat que lui ramena le garde.
Elle l’avait vu arriver et, à chaque pas qui rapprochait son fils du cadavre,
elle avait souffert au plus profond de son être. Comme si Dieu était intervenu,
elle avait éclaté en larmes au moment précis où Hernando avait caressé le
délicat tissu.
    « Je veillerai sur toi, mon fils »,
sanglota-t-elle en l’observant traverser à pied la porte du Colodro, tirant son
cheval derrière lui.
    À partir de ce moment, en effet, Hernando laissa sa mère
veiller sur lui. Son obsession des journées précédentes laissa place à la
mélancolie et à la tristesse. Pourquoi chercher les corps des siens après tant
de jours ? Si on les avait abandonnés dans la montagne, ils avaient déjà
été dévorés par les charognards. Il l’avait constaté lors de ses cavalcades
dans les bois : rien n’était laissé à l’abandon ; des milliers
d’animaux étaient à l’affût de la moindre erreur, du plus petit aliment, pour
se jeter dessus. Cependant, il continua à venir voir les bancs en pierre du
couvent de San Pablo.
    Quelques jours après la découverte du cadavre d’Ubaid,
Hernando reçut un message de don Diego qui l’enjoignait de reprendre le
travail : bien que le troupeau de juments fût à Séville, il restait encore
des poulains dans les écuries.
    Aisha crut percevoir chez son fils un changement d’attitude
lorsqu’il rentra à la maison après s’être occupé des animaux, et elle reprit
espoir. Mais elle ne se doutait pas à quel point ses désirs étaient loin de la
réalité.

 
42.
    — Tu vas devoir céder ton cheval au comte d’Espiel,
annonça un matin don Diego López de Haro à Hernando, alors que ce dernier
venait juste d’arriver aux écuries.
    Hernando secoua la tête pour repousser ses paroles.
    — Le roi le lui a offert, entendit-il pourtant
continuer l’écuyer royal.
    — Mais… je… Azirat…
    Sa tentative de protestation se réduisit en absurdes
gesticulations.
    — Je sais tout ce que tu as donné à cet animal et je sais
aussi que, malgré sa robe, c’est l’un des meilleurs exemplaires nés dans ces
écuries. Je t’autoriserai à en choisir un autre, même un non rejeté, du moment
qu’il ne soit pas destiné au roi…
    — Mais c’est celui-ci que je veux ! Je veux
Azirat. Il est à moi… !
    Aussitôt, il regretta ses paroles. Don Diego se tendit,
fronça les sourcils et laissa passer quelques instants avant de répondre :
    — Il n’est pas à toi et il ne le sera jamais. Peu
importe ce que tu veux ou peux vouloir. Tu savais quel était le marché quand tu
as choisi un cheval en échange d’une partie de ton salaire : il serait
toujours à disposition du roi. Le comte a réussi à obtenir de don Philippe ce
cheval, qu’apparemment il a demandé avec insistance. Il faut exaucer les désirs
de Sa Majesté.
    — Il le détruira ! Il ne sait ni monter ni
toréer !
    Don Diego le savait parfaitement. Hernando l’avait lui-même
entendu le dire. Il l’avait entendu se moquer de l’obèse comte d’Espiel,
toujours avachi sur sa monture.
    — Tu n’es pas en mesure de juger la manière dont un
noble monte à cheval, lui répondit néanmoins brusquement l’écuyer. Un seul de
ses brodequins contient plus d’honneur et de services rendus à ces royaumes que
n’en rendra jamais toute ta communauté. Tais-toi.
    Décomposé, le jeune homme laissa retomber ses bras le long
de son corps devant l’écuyer royal.
    — Pourrais-je… ? bredouilla-t-il.
    Que voulait-il lui demander ?
    — Pourrais-je le monter une dernière fois ?
    Don Diego hésita.
    — Je ne sais pas… si je mérite cette faveur. J’aimerais
le sentir sous mes jambes une fois encore, Excellence. La dernière chevauchée.
Vous êtes un grand cavalier. Vous connaissez les épreuves terribles que je
viens de subir…
     
    « Changer le nom d’origine d’un cheval porte
malheur. » Comme Abbas avait eu raison quand il lui

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