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L’impératrice lève le masque

L’impératrice lève le masque

Titel: L’impératrice lève le masque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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dissimuler son embarras – le même que celui qui l’empêche d’ouvrir les yeux.
    Finalement, sans lui prêter attention, elle refait le lit comme une vraie infirmière et remet l’oreiller dans la bonne position. Puis elle s’assoit et commence d’un ton qu’il aurait souhaité plus chaleureux : — Je sais que vous êtes réveillé, comte. Alessandro me l’a dit. En outre, je m’en rends compte à votre respiration. Vous pouvez ouvrir les yeux.
    Tout en parlant, elle a pris sa main et Tron trouve qu’elle la serre assez fort, comme s’il fallait qu’elle l’empêche de s’enfuir, ce qui est pourtant assez peu probable.
    — Comment allez-vous ?
    — Mieux que je n’en ai l’air.
    Il ouvre alors les yeux et en a le souffle coupé. La princesse est légèrement penchée au-dessus de lui. Il peut voir chacune des taches de rousseur sur son nez à la Botticelli. Ses cheveux blonds sont remontés en chignon. Une mèche s’est défaite et pend sur sa joue. Ses yeux verts le fixent avec une expression qu’il n’arrive pas à définir.
    — Vous avez en effet bien meilleure mine qu’il y a encore quelques jours, confirme-t-elle avec un souci d’impartialité.
    — Quelle mine est-ce que j’avais il y a quelques jours ?
    Elle esquisse un petit sourire.
    — Affreuse ! Vous étiez encore plus pâle et vous aviez le nez encore plus pointu. Vous déliriez et racontiez n’importe quoi. Le docteur Wagner avait l’air assez préoccupé.
    — Mes souvenirs s’arrêtent au palais Da Mosto. Je me vois par terre… perdant du sang.
    La princesse hoche la tête. Ses paupières battent très vite, comme si elle avait une poussière dans l’œil.
    — Vous avez bien failli vous vider, confirme-t-elle. J’avais du mal à vous bander le bras car la balle vous était entrée dans l’épaule. J’ai fini par vous garrotter avec un lacet. Mais vous aviez déjà perdu beaucoup de sang. Le sol était tout rouge et la plaie n’arrêtait pas de couler.
    À ce moment-là, elle ôte le lorgnon qu’elle avait sur le nez et renifle. Puis elle ajoute : — J’ai bien cru que tu allais mourir, Alvise.
    Elle se mouche. On aurait dit un coup de trompette plein de colère.
    Là, il devrait saisir l’occasion pour lui dire ce qui le démange depuis le début, mais il hésite – surtout qu’il ne sait pas s’il doit continuer à la voussoyer ou s’il peut aussi passer au tutoiement. En même temps, il se demande s’il a vraiment bien entendu ou – c’est possible – s’il ne s’est pas endormi un instant et n’a pas rêvé cette histoire de « tu » et d’« Alvise ».
    En tout cas, il voit maintenant que la princesse se remet de son accès de sentimentalité. Son visage, encore tendre et franc à l’instant, se tire et se referme. Pour rompre le silence gênant qui s’est installé, il demande donc, quoique cela ne l’intéresse pas vraiment : — Pourquoi n’y a-t-il pas de sentinelle devant ma porte ? Je pensais que je serais sous surveillance.
    La princesse secoue la tête.
    — Non. Tu es réhabilité.
    — Que s’est-il passé ?
    — Les documents que Pergen cherchait ont refait surface. Ensuite, l’impératrice a écrit en ta faveur. Bruck a aussitôt rédigé un rapport à l’intention de Toggenburg et envoyé une copie à Spaur et à Sa Majesté. Le commandant de place n’avait plus moyen de déguiser les faits. Il voulait quand même te conduire à l’hôpital militaire, mais au dernier moment, il a reçu des instructions d’en haut.
    — De l’impératrice ?
    — De tout en haut. L’ordre est arrivé de Vienne par télégraphe.
    — Comment sais-tu tout cela ?
    — Par Spaur. C’est lui qui dirige l’enquête. Je suis allée hier à la questure. Il s’est montré très prévenant. Et incroyablement résigné au sujet de son neveu. Cela lui a beaucoup plu que tu te sois enfui d’une prison militaire. Dans tout Venise, on raconte que tu t’es échappé des Plombs.
    — Ce n’est pas vrai ! C’est juste une rumeur.
    — Peut-être, mais la rumeur va te coller à la peau. Tu es l’homme qui s’est échappé des piombi . En pleine tempête de neige par le toit du palais des Doges.
    — C’est absurde. Qu’est-ce qu’il y a encore comme rumeur ?
    — Que l’impératrice est venue à votre bal et que tu as dansé avec elle.
    — Il n’aurait pas été correct de ma part de ne pas l’inviter.
    — Elle te plaît ?
    Il réfléchit un instant.
    — Oui, je crois.
    — Et qu’est-ce

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