Louis XIV - Tome 1 - Le Roi soleil
Bohèmes ou Égyptiens, leurs femmes, enfants et autres de leur suite, de faire attacher les hommes à la chaîne des forçats pour être conduits dans nos galères et y servir à perpétuité ; et à l’égard de leurs femmes et filles ordonnons de les faire raser les premières fois qu’elles auront été trouvées menant la vie de Bohémienne, et faire conduire dans les hôpitaux les plus prochains des lieux les enfants qui ne seront pas en état de servir dans nos galères, pour y être nourris et élevés comme les autres enfants qui y sont enfermés. »
Il faut nettoyer le royaume, et faire que chaque sujet soit tenu au serment de fidélité au roi.
Et donc continuer de réduire cette hérésie huguenote, qui est une rébellion.
Il interdit aux protestants de se réunir ailleurs que dans leurs temples et en présence de leurs pasteurs.
Il faut que les « missions armées » continuent. Qu’aucune issue autre que la conversion ne soit offerte aux huguenots. Il faudra désormais une autorisation royale pour quitter le royaume.
Les huguenots sont des empoisonneurs de l’âme, qu’il faut pourchasser comme doivent l’être les devins, les magiciens, les enchanteurs, les alchimistes et autres corrupteurs des corps.
Il a la certitude qu’il prépare ainsi une nouvelle période de son règne, quand la gloire et la grandeur doivent naître de la vertu.
Fini, le temps des poisons et de la débauche !
Que les jeunes seigneurs, les mignons de Monsieur, ceux qui ont corrompu le pauvre comte de Vermandois, ne se pavanent plus insolemment à la Cour.
Il sait bien que Philippe d’Orléans continuera de pratiquer le vice italien, mais il faut dissoudre ces « confréries » qui capturent et séduisent les plus beaux et les plus titrés des jeunes gens.
Ne murmure-t-on pas que le Dauphin lui-même se serait laissé pervertir ?
Louis observe son fils.
Il a voulu que Monseigneur, qui régnera sur le royaume, apprenne à gouverner. Et il a écrit pour lui ces Mémoires pour lui enseigner cet art difficile.
Mais ce Dauphin au corps lourd, obèse, semble ne se soucier que de chasse au loup, de conquête facile et de bonne chère.
Ce fils légitime le déçoit. Il apprécie au contraire le duc du Maine, son bâtard, le fils qu’il a eu avec Mme de Montespan et sur lequel a veillé Mme de Maintenon.
Il l’a légitimé. Il voudrait en faire un homme fortuné.
Il suffirait pour cela que la Grande Mademoiselle lui lègue une partie de ses domaines, de son immense fortune. Et puisqu’elle est amoureuse du comte de Lauzun, toujours emprisonné, on lui promettra de libérer ce vieil impertinent, ce séducteur, si elle renonce à une partie de sa fortune en faveur du duc du Maine.
Il met ainsi de l’ordre dans le royaume et autour de lui. Il lui reste à rejeter ces châteaux, ces palais, Saint-Germain, Fontainebleau, les Tuileries, le Louvre, qui sont comme les habits de pierre de la première partie de son règne.
Il y a festoyé ! Il y a gouverné, dansé et séduit. Il allait de l’un à l’autre dans ces cortèges de carrosses enrubannés.
C’en est fini.
Versailles, qu’il a créé, est encore en travaux. Marly et le Grand Commun viennent à peine d’être entrepris. Partout des gravats, des décorations inachevées. Mais c’est là que, désormais, il veut vivre, y rassemblant la Cour pour les nouveaux temps.
Cela fait plus de dix ans qu’il y songe. Mais le moment est enfin venu. Ce château sera le trône de sa gloire, de sa grandeur, le château de l’ordre et de la vertu.
Il s’installe le mercredi 6 mai 1682 dans son carrosse rouge tiré par six chevaux bais. Derrière lui roule le carrosse de la reine Marie-Thérèse mené par six chevaux blancs. La voiture de Mme de Maintenon et de Mme de Montespan, puis celles des courtisans, suivent.
Il regarde les mousquetaires et les gendarmes qui chevauchent autour de son carrosse.
À Versailles, les gardes-françaises et suisses présentent leurs armes, cependant que les roulements des tambours et les sons aigres des fifres résonnent dans la cour.
Les ouvriers, la domesticité, la foule venue de Versailles, et plus loin les milliers d’ouvriers des chantiers du château, l’acclament.
Il descend du carrosse.
Il regarde les bâtiments majestueux.
Voilà son palais, le cœur du royaume.
Il ne se lasse pas de parcourir les galeries où les ouvriers s’affairent.
Il s’arrête devant les statues et les fontaines, se
Weitere Kostenlose Bücher