Marie Leszczynska
défaite suédoise de Charles XII à Poltava, contre les armées russes de Pierre I er , annonce la chute prochaine du malheureux Stanislas
; d’autant qu’Auguste II dénonce aussitôt les clauses du traité d’abdication pendant que ses armées reprennent pied en Pologne. Pour échapper aux hommes du tsar, Charles XII, blessé, se réfugie avec les rescapés de son armée à Bender, en Bessarabie, où les Turcs les font prisonniers.
Cachée dans un four à pain
Stanislas
juge la situation désespérée. Se sachant piètre guerrier, il déclare vouloir abdiquer afin d’épargner à sa patrie les malheurs de la guerre civile. Sous la protection d’officiers dévoués, Catherine Opalinska et les princesses Anna
et Marie fuient vers Szczecin, dans de lourdes voitures sur des routes défoncées.
Les étapes sont longues et éprouvantes pour les fillettes, ballottées d’auberges en asiles de fortune, avec la menace incessante de tomber nez à nez avec l’ennemi. C’est arrivé une fois et Marie n’a dû son salut qu’à la présence d’esprit d’un domestique. En quelques secondes, il l’empaqueta et s’enfuit avec son précieux fardeau jusqu’au hameau voisin, où il confia l’enfant à une paysanne. La brave femme eut l’idée de cacher la petite princesse dans un four à pain toute la durée de l’alerte. Déjà rompue à ce genre d’équipée malgré son jeune âge, Marie sut retenir son souffle et ses pleurs. Bien des années plus tard, elle avouait en avoir tremblé de terreur…
Roi fugitif, Stanislas
I er rejoint la reine et les princesses à Szczecin. À peine arrivé, il doit à nouveau fuir pour se réfugier à Stockholm. En Suède, les exilés sont traités en souverains. Pendant que Catherine Opalinska pleure sa fortune perdue, Stanislas
s’occupe de l’éducation de ses filles. Enfin sereines, les princesses Anna
et Marie font son bonheur en se comportant en délicieuses petites filles modèles. Mais il croit toujours en sa bonne étoile. En 1713, il prend le chemin de la Turquie sous le déguisement d’un officier français. Les échanges de lettres n’ayant rien donné, il veut informer Charles XII des négociations qu’il a entamées avec Auguste II en vue de son abdication.
Le stratagème est grotesque. Les Turcs découvrent très vite son identité et le font prisonnier. À Bender, Stanislas
est assigné à résidence mais traité en roi. Sa maison se compose de domestiques et d’une garde qui lui rend les honneurs chaque fois qu’il sort. Il touche même une pension et le pacha de Bender, chargé de veiller sur ce prisonnier moins encombrant que le roi de Suède, lui confie un cheval arabe caparaçonné d’or ! Dans sa prison de rêve, Stanislas
meuble sa solitude de musique, de lectures et de promenades. Il prend plaisir à découvrir ce pays qui lui ouvre les portes d’un Orient inconnu. Un seul regret : il aimerait tant faire partager ses découvertes à ses deux filles chéries.
Pendant ce temps, Charles XII rend la vie de ses geôliers impossible et refuse toutes les propositions de Stanislas
. Mais l’obstination du Polonais finit par toucher le Suédois qui lui propose une solution de repli : « En attendant que je vous ouvre les portes de Varsovie, installez-vous dans mon duché de Deux-Ponts. Vous y serez traité en roi. »
Un minuscule royaume près de la France
Il n’en faut pas davantage pour tranquilliser Stanislas
. Il prend (à regret) congé de ses hôtes turcs et se dirige vers son nouveau royaume : le duché de Zweibrücken [8] que les francophiles appellent Deux-Ponts. Stanislas
ignore tout de ce minuscule territoire germanique enclavé entre la Sarre, la Lorraine et l’Alsace, tout proche de la France mais rattaché à la couronne de Suède depuis 1654.
Cette fois, il a choisi de voyager sous le pseudonyme de comte de Cronstein, en compagnie de trois gentilshommes polonais bientôt rejoints par Michel Tarlo
et par son ami d’enfance Stanislas Poniatowski qui est au service de Charles XII. Les voyageurs traversent la Hongrie puis l’Autriche, avant de pénétrer sur les terres du duc de Lorraine, Léopold I er . À Lunéville, ils s’installent à l’auberge La Croix de Lorraine, tandis que le fidèle Tarlo
tente de négocier quelques bijoux du roi de Pologne auprès d’un usurier local, car Stanislas
est toujours à court d’argent. La nouvelle de la présence du malheureux monarque se répand jusque dans les
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