Marilyn, le dernier secret

raisons. La première, la plus évidente, basique même, confirme le discours des héritiers des droits de la star : Monroe demeure une formidable machine à gagner de l'argent. La seconde touche aux mécanismes mêmes de cette vogue qui, près d'un demi-siècle plus tard, ne cesse de prospérer. Pour survivre dans nos mémoires, pour rester au panthéon du glamour made in Hollywood, pour continuer à vendre, Marilyn a besoin de voir son mythe entretenu. Des braises que, pages après pages, une bonne centaine de livres continuent à attiser. Quand elles ne les créent pas.
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    David Marshall est un auteur installé à San Francisco. À en croire ses parents, sa passion pour Marilyn remonte à sa petite enfance puisque, avec celui du président Eisenhower, c'est le nom de l'actrice qu'il a reconnu en premier. Cette ferveur pour la Blonde l'a poussé à rejoindre les rangs de Forever Marilyn, un fan-club dédié à l'entretien de la mémoire de l'actrice. Car, évidemment, il existe toujours des associations réunissant des inconditionnels de la star décédée. Forever Marilyn se détache cependant du lot en préférant l'éducation à l'idolâtrie. Ici, on étudie Marilyn comme d'autres se penchent sur leurs éprouvettes. Avec sérieux, les membres du club dissèquent, observent et analysent minutieusement le parcours de l'étoile.
    Marshall a poussé cette démarche à son paroxysme en se focalisant presque exclusivement sur sa mort. Comme une sorte de spécialisation dans un champ déjà très étroit. Mais, parce qu'il fait preuve d'une réelle ouverture d'esprit, son travail se révèle de qualité.
    À ce titre, lui-même a été confronté, comme tout chercheur critique, à l'opacité entourant ces heures dramatiques, créée par l'élaboration du mythe. « Le meilleur exemple reste la dimension apportée par les Kennedy, raconte-t-il. Est-ce que Marilyn Monroe tiendrait une place toujours aussi importante dans notre conscience nationale si elle n'avait pas été liée à la mystique Kennedy [1]  ? »
    La star la plus sexy du monde, le président le plus jeune de la planète… Los Angeles, 5 août 1962, Dallas, 22 novembre 1963… Tout était en effet lié pour attiser les passions. De quoi alimenter le rêve de n'importe quel auteur. Destinées brisées, sexualité, tragédies et, pour l'éternité, deux sourires figés sur papier glacé, quoi de plus attirant et vendeur ?
    Mais au-delà de l'aspect « glamoureusement » noir des choses, la question de Marshall n'est pas innocente. Or, comme nous le verrons, y répondre revient à s'approcher de la solution.
    Mais David, lui, préfère y opposer une remarque rhétorique : « Aujourd'hui, on peut très bien retourner la question, avance-t-il. Est-ce que John Kennedy occuperait une telle place dans nos mémoires s'il n'avait pas été lié à la légende de Marilyn [2]  ? »
    À titre personnel, je n'irai pas jusque-là, pensant plutôt que la présence de Marilyn et de John dans nos esprits est surtout liée à la soudaineté de leurs disparitions. Il est peut-être difficile de l'accepter, mais les coups de feu de Dealey Plaza ont plus largement contribué à la légende Kennedy que n'importe quelle décision politique prise par lui durant son mandat présidentiel. Et la mort de Marilyn, cocktail mariant vapeurs d'alcool, mélanges médicamenteux et rumeurs d'affaire d'État, a plus compté dans la survie du mythe que l'ensemble de sa filmographie.
    David Marshall poursuit : « L'union entre les destins posthumes de Marilyn et de John Kennedy a pris une dimension essentielle au milieu des années 1970 et n'a depuis jamais cessé de se renforcer. Un peu comme si les deux avaient conçu un pacte post mortem  : reste avec moi et personne ne t'oubliera [3] . »
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    Peut-être David Marshall a-t-il raison. Peut-être la popularité de l'un se nourrit-elle de celle de l'autre. Peut-être chaque livre, chaque documentaire, chaque article ressassant la légende du couple maudit renforce-t-il l'immortalité du souvenir du président et de l'actrice. Mais c'est un autre aspect de cette déclaration de David qui m'interpella. Sans vraiment s'en rendre compte, il venait de mettre à jour un élément essentiel de la vérité Marilyn.
    Lui, le spécialiste de la vie et « des morts » de l'actrice ne reconnaissait-il pas que la relation de JFK et Marilyn avait pris une dimension nouvelle au milieu des années 1970 ?
    Or pourquoi le milieu des années