Odyssée
femmes, dirigeant leurs beaux travaux.
Et Hektôr, ayant regardé P‚ris, lui dit ces paroles outrageantes :
- Misérable ! la colère que tu as ressentie n'était point bonne. Nos troupes périssent autour de la Ville, sous les hautes murailles. Gr‚ce à
toi, les clameurs de la guerre montent avec fureur autour de cette ville, et tu bl‚merais toi-même celui que tu verrais s'éloigner de la rude bataille. Lève-toi donc, si tu ne veux voir la Ville consumée bientôt par la flamme ardente.
Et le divin Alexandros lui répondit:
- Hektôr, puisque tu ne m'as point bl‚mé avec violence, mais dans la juste mesure, je te répondrai. Je ne restais point dans ma chambre nuptiale par colère ou par indignation contre les Troiens, mais pour me livrer à la douleur. Maintenant que mon épouse me conseille par de douces paroles de retourner au combat, je crois, comme elle, que cela est pour le mieux. La victoire exauce tour à tour les guerriers. Mais attends que je revête mes armes belliqueuses, ou précède-moi, je vais te suivre.
Il parla ainsi, et Hektôr ne lui répondit rien ; et Hélénè dit à Hektôr ces douces paroles :
- Mon frère, frère d'une misérable chienne de malheur, et horrible ! Pl˚t aux dieux qu'au jour même o˘ ma mère m'enfanta un furieux souffle de vent m'e˚t emportée sur une montagne ou abîmée dans la mer tumultueuse, et que l'onde m'e˚t engloutie, avant que ces choses fussent arrivées ! Mais, puisque les Dieux avaient résolu ces maux, je voudrais être la femme d'un meilleur guerrier, et qui souffrît au moins de l'indignation et des exécrations des hommes. Mais celui-ci n'a point un coeur inébranlable, et il ne l'aura jamais, et je pense qu'il en portera bientôt la peine. Viens, mon frère, entre et prends ce siège, car ton ‚me est pleine d'un lourd souci, gr‚ce à moi, chienne que je suis, et gr‚ce au crime d'Alexandros.
Zeus nous a fait à tous deux une mauvaise destinée, afin que nous soyons célèbres par là chez les hommes qui naîtront dans l'avenir.
Et le grand Hektôr au casque mouvant lui répondit :
- Ne me fais point asseoir, Hélénè, bien que tu m'aimes, car tu ne me persuaderas point. Mon coeur est plein du désir de secourir les Troiens qui regrettent vivement mon absence. Mais excite P‚ris, et qu'il se h‚te de me suivre, tandis que je serai encore dans la Ville. Je vais, dans ma demeure, revoir mes serviteurs, ma femme bien-aimée et mon petit enfant. Je ne sais s'il me sera permis de les revoir jamais plus, ou si les Dieux me dompteront par les mains des Akhaiens.
Ayant ainsi parlé, Hektôr au casque mouvant sortit et parvint bientôt à ses demeures, et il n'y trouva point Andromakhè aux bras blancs, car elle était sortie avec son fils et une servante au beau péplos, et elle se tenait sur la tour, pleurant et gémissant. Hektôr, n'ayant point trouvé dans ses demeures sa femme irréprochable, s'arrêta sur le seuil et parla ainsi aux servantes :
- Venez, servantes, et dites-moi la vérité. O˘ est allée, hors des demeures, Andromakhè aux bras blancs ? Est-ce chez mes soeurs, ou chez mes belles-soeurs au beau péplos, ou dans le temple d'Athènè avec les autres Troiennes qui apaisent la puissante Déesse à la belle chevelure ?
Et la vigilante Intendante lui répondit :
- Hektôr, puisque tu veux que nous disions la vérité, elle n'est point allée chez tes soeurs, ni chez tes bellessoeurs au beau péplos, ni dans le temple d'Athènè avec les autres Troiennes qui apaisent la puissante Déesse à la belle chevelure ; mais elle est au faîte de la vaste tour d'Ilios, ayant appris une grande victoire des Akhaiens sur les Troiens. Et, pleine d'égarement, elle s'est h‚tée de courir aux murailles, et la nourrice, auprès d'elle, portait l'enfant.
Et la femme intendante parla ainsi. Hektôr, étant sorti de ses demeures, reprit son chemin à travers les rues magnifiquement construites et populeuses, et, traversant la grande Ville, il arriva aux portes Skaies par o˘ il devait sortir dans la plaine. Et sa femme, qui lui apporta une riche dot, accourut au-devant de lui, Andromakhè, fille du magnanime étiôn qui habita sous le Plakos couvert de forêts, dans mèbè Hypoplakienne, et qui commanda aux Kilikiens. Et sa fille était la femme de Hektôr au casque d'airain. Et quand elle vint au-devant de lui, une servante l'accompagnait qui portait sur le sein son jeune fils, petit enfant encore, le Hektoréide bien-aimé,
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