Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
rencontra l'ennemi retranché à Pufero, l'attaqua, lui prit deux pièces de canon, et lui fit une centaine de prisonniers, et le poursuivit dans les gorges de Caporeto à la Chiusa autrichienne, en laissant le champ de bataille couvert d'Autrichiens.
Cependant le général Masséna, avec sa division, est à Tarwis ; j'ai donc lieu d'espérer que les deux mille hommes que le général Guieux a poussés devant lui tomberont dans les mains de la division Masséna.
Le général de division Dugua est entré hier soir dans Trieste.
BONAPARTE.
Au directoire exécutif.
M. Pezar, sage grand de la république de Venise, a été envoyé ici, accompagné d'un sage de terre-ferme ; il est revenu relativement aux événemens de Brescia et de Bergame.
Les peuples de ces deux villes ont désarmé la garnison vénitienne, et chassé les provéditeurs de la république de Venise. Un germe d'insurrection gagne toutes les têtes de cette république. Je vous envoie une lettre que m'avait écrite précédemment M. Battaglia, provéditeur de la république de Venise, et la réponse que je lui ai faite. Ma conduite avec M. Pezaro était assez délicate : ce n'est pas dans un moment où Palma-Nova n'est pas encore approvisionné et armé, où nous avons besoin de tous les secours du Frioul, et de toute la bonne volonté des gouvernemens vénitiens pour nous approvisionner dans les défilés de l'Allemagne, qu'il fallait nous brouiller. Il ne fallait pas non plus qu'ils pussent envoyer quatre ou cinq mille hommes, et écraser les personnes qui, à Brescia et à Bergame, nous sont attachées, quoique je n'approuve pas leur conduite, et que je croie que leur insurrection nous est, dans le moment, très-nuisible ; mais le parti ennemi de la France est, dans ces différentes villes, si acharné contre nous, que, s'il prenait le dessus, il faudrait être en guerre ouverte avec toute la population. J'ai dit à M. Pezaro que le directoire exécutif n'oubliait pas que la république de Venise était l'ancienne alliée de la France ; que nous avions un désir bien formé de la protéger de tout notre pouvoir. J'ai demandé seulement d'épargner l'effusion du sang, et de ne pas faire un crime aux citoyens vénitiens qui avaient plus d'inclination pour l'armée française que pour l'armée impériale ; que nous ne soutenions pas les insurgés, qu'au contraire je favoriserais les démarches que ferait le gouvernement ; mais que je croyais que, comme ils avaient envoyé un courrier au directoire exécutif, il serait bon peut-être d'en attendre le retour, parce que je croyais que la seule intervention de la France dans ces affaires pourrait ramener les esprits sans avoir besoin de recourir aux armes.
Nous nous sommes quittés bons amis, il m'a paru fort content. Le grand point, dans tout ceci, est de gagner du temps. Je vous prie, pour ma règle, de me donner une instruction détaillée.
Les villes d'Ancone, du duché d'Urbin, de la province de Macerata, m'accablent de députations pour me demander à ne pas retourner sous l'autorité papale. La révolution gagne véritablement toutes les têtes en Italie ; mais il faudrait encore bien du temps pour que les peuples de ces pays pussent devenir guerriers et offrir un spectacle sérieux.
Je vous envoie un exemplaire de la constitution de la république cispadane.
Les Lombards sont très-impatiens ; ils voudraient qu'on déclarât leur liberté, et qu'on leur permît également de se faire une constitution ; ils soudoient, dans ce moment, quinze cents Polonais et deux mille hommes de la légion lombarde. L'un et l'autre de ces corps commencent à s'organiser assez Bien.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Goritz, le 5 germinal an 5 (25 mars 1797).
Au directoire exécutif.
Citoyens directeurs,
Je vous ai rendu compte, par mon dernier courrier, qu'une colonne de l'armée du prince Charles était cernée entre la division du général Masséna, qui était à Tarwis, et celle du général Guieux, qui, arrivé à Caporeto, le poussait devant lui dans les gorges.
Combat de Tarwis.
Le général Masséna, arrivé à Tarwis, fut attaqué par une division ennemie, partie de Clagenfurth, et qui venait au secours de la division qui était cernée. Après un combat extrêmement opiniâtre, il la mit en déroute, lui fit une grande quantité de prisonniers, parmi lesquels trois généraux. Les cuirassiers de l'empereur, arrivant du Rhin, ont extrêmement souffert.
Affaire de la Chiusa.—Prise de ce
Weitere Kostenlose Bücher