Oeuvres de Napoléon Bonaparte, TOME III.
donné au général Bonaparte un gage éclatant de la reconnaissance nationale.].
Le gouvernement est vivement touché des sentimens que vous manifestez au nom du tribunat.
Cette justice que vous rendez à ses opérations est le prix le plus doux de ses efforts. Il y reconnaît le résultat de ces communications plus intimes qui vous mettent en état de mieux apprécier la pureté de ses vues et de ses pensées.
Pour moi je reçois avec la plus sensible reconnaissance le voeu émis par le tribunat.
Je ne désire d'autre gloire que celle d'avoir rempli toute entière la tâche qui m'est imposée. Je n'ambitionne d'autre récompense que l'affection de mes concitoyens ; heureux s'ils sont bien convaincus que tous les maux qu'ils pourraient éprouver seraient toujours pour moi les maux les plus sensibles ; que la vie ne m'est chère que par les services que je puis rendre à la patrie ; que la mort même n'aura point d'amertume pour moi, si mes derniers regards peuvent voir le bonheur de la république aussi assuré que sa gloire.
Le premier consul, BONAPARTE.
Paris, le 19 floréal an 10 (9 mai 1802).
Au sénat conservateur [Le sénat venait de rendre un sénatus-consulte portant réélection de Bonaparte au consulat pour dix années à ajouter aux dix années qui lui étaient déjà dévolues par l'article 39 de la constitution.].
Sénateurs,
La preuve honorable d'estime consignée dans votre délibération du 18, sera toujours gravée dans mon coeur.
Le suffrage du peuple m'a investi de la suprême magistrature. Je ne me croirais pas assuré de sa confiance, si l'acte qui m'y retiendrait n'était encore sanctionné par son suffrage.
Dans les trois années qui viennent de s'écouler, la fortune a souri à la république ; mais la fortune est inconstante, et combien d'hommes qu'elle avait comblés de ses faveurs, ont vécu trop de quelques années [Napoléon Bonaparte à l'île Sainte-Hélène en est un nouvel et terrible exemple.].
L'intérêt de ma gloire et celui de mon bonheur sembleraient avoir marqué le terme de ma vie publique, au moment où la paix du monde est proclamée.
Mais la gloire et le bonheur du citoyen doivent se taire, quand l'intérêt de l'état et la bienveillance publique l'appellent.
Vous jugez que je dois au peuple un nouveau sacrifice ; je le ferai si le voeu du peuple me commande ce que votre suffrage autorise.
BONAPARTE.
Paris, le 24 floréal an 10 (14 mai 1802).
Réponse du premier consul à une députation du corps législatif [L'ambition de Bonaparte n'était pas encore satisfaite des dix années ajoutées à sa magistrature par le sénatus-consulte cité plus haut. Les deux autres consuls, sans doute d'après son impulsion, arrêtèrent le 20 floréal (10 mai) que le peuple français serait consulté sur cette question : Napoléon Bonaparte sera-t-il consul à vie ? Cet arrêté fut converti en loi par le corps législatif, et une députation de cent dix membres fut chargée d'en instruire Bonaparte. C'est à cette députation que Bonaparte va répondre.].
Les sentimens que vous venez d'exprimer et cette députation solennelle sont pour le gouvernement un gage précieux de l'estime du corps législatif.
J'ai été appelé à la magistrature suprême dans des circonstances telles, que le peuple n'a pu peser dans le calme de la réflexion le mérite de son choix.
Alors la république était déchirée par la guerre civile ; l'ennemi menaçait les frontières ; il n'y avait plus ni sécurité ni gouvernement. Dans une telle crise, ce choix a pu ne paraître que le produit indélibéré de ses alarmes.
Aujourd'hui la paix est rétablie avec toutes les puissances de l'Europe ; les citoyens n'offrent plus que l'image d'une famille réunie, et l'expérience qu'ils ont faite de leur gouvernement les a éclairés sur la valeur de leur premier choix. Qu'ils manifestent leur volonté dans toute sa franchise et dans toute son indépendance ; elle sera obéie : quelle que soit ma destinée, consul ou citoyen, je n'existerai que pour la grandeur et la félicité de la France.
Le premier consul, BONAPARTE.
Réponse à la députation du tribunat, envoyée pour le même objet.
Ce témoignage de l'affection du tribunat est précieux au gouvernement. L'union de tous les corps de l'état est pour la nation une garantie de stabilité et de bonheur. La marche du gouvernement sera constamment dirigée dans l'intérêt du peuple, d'où dérivent tous les pouvoirs, et pour qui seul travaillent
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