Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome IV.
1806.
Vingt-troisième bulletin de la grande armée.
Le duc de Weimar est parvenu à passer l'Elbe à Havelberg. Le général Soult s'est porté le 9 à Rathnau, et le 30 à Wertenhausen.
Le 29, la colonne du duc de Weimar était à Rhinsberg, et le maréchal prince de Ponte-Corvo à Furstemberg. Il n'y a pas de doute que ces quatorze mille hommes ne soient tombés ou ne tombent, dans ce moment, au pouvoir de l'armée française. D'un autre côté, le général Blucher, avec sept mille hommes, quittait Rhinsberg, le 29 au matin, pour se porter sur Stettin, le maréchal Lannes et le grand-duc de Berg avaient trois journées de marche d'avance sur lui. Cette colonne est tombée en notre pouvoir, ou y tombera sous quarante-huit heures.
Nous avons rendu compte, dans le dernier bulletin, qu'à l'affaire de Prentzlow, le grand-duc de Berg avait fait mettre bas les armes au prince de Hohenlohe et à ses dix-sept mille hommes. Le 29, une colonne ennemie de six mille hommes a capitulé dans les mains du général Milhaud à Passewalk. Cela nous donne encore deux mille chevaux sellés et bridés, avec les sabres. Voilà plus de six mille chevaux que l'empereur a ainsi à Spandau, après avoir monté toute sa cavalerie.
Le maréchal Soult, arrivé à Rathnau, a rencontré cinq escadrons de cavalerie saxonne qui ont demandé à capituler. Il leur a fait signer une capitulation. C'est encore cinq cents chevaux pour l'armée.
Le maréchal Davoust a passé l'Oder à Francfort. Les alliés bavarois et wurtembergeois, sous les ordres du prince Jérôme, sont en marche de Dresde sur Francfort.
Le roi de Prusse a quitté l'Oder, et a passé la Vistule ; il est à Graudentz.
Les places de la Silésie sont sans garnison et sans approvisionnemens. Il est probable que la place de Stettin ne tardera pas à tomber en notre pouvoir. Le roi de Prusse est sans armée, sans artillerie, sans fusils. C'est beaucoup que d'évaluer à douze ou quinze mille hommes ce qu'il aura pu réunir sur la Vistule. Rien n'est curieux comme les mouvemens actuels. C'est une espèce de chasse où la cavalerie légère, qui va aux aguets des corps d'armée, est sans cesse détournée par des colonnes ennemies qui sont coupées.
Jusqu'à cette heure, nous avons cent cinquante drapeaux, parmi lesquels sont ceux brodés des mains de la belle reine, beauté aussi funeste aux peuples de Prusse, que le fut Hélène aux Troyens.
Les gendarmes de la garde ont traversé Berlin pour se rendre prisonniers à Spandau. Le peuple, qui les avait vus si arrogans il y a peu de semaines, les a vus dans toute leur humiliation.
L'empereur a fait aujourd'hui une grande parade, qui a duré depuis onze heures du matin, jusqu'à six heures du soir. Il a vu en détail toute sa garde à pied et à cheval, et les beaux régimens des carabiniers et des cuirassiers de la division Nansouty ; il a fait différentes promotions, en se faisant rendre compte de tout dans le plus grand détail.
Le général Savary, avec deux régimens de cavalerie, a déjà atteint le corps du duc de Weimar, et sert de communication pour transmettre des renseignemens au grand-duc de Berg, au prince de Ponte-Corvo et au maréchal Soult.
On a pris possession des états du duc de Brunswick. On croit que ce duc s'est réfugié en Angleterre. Toutes ses troupes ont été désarmées.
Si ce prince a mérité, à juste titre, l'animadversion du peuple français, il a aussi encouru celle du peuple et de l'armée prussienne ; du peuple qui lui reproche d'être l'un des auteurs de la guerre ; de l'armée ; qui se plaint de ses manoeuvres et de sa conduite militaire. Les faux calculs des jeunes gendarmes sont pardonnables ; mais la conduite de ce vieux prince, âgé de soixante-douze ans, est un excès de délire dont la catastrophe ne saurait exciter de regrets. Qu'aura donc de respectable la vieillesse, si, au défaut de son âge, elle joint la fanfaronnade et l'inconsidération de la jeunesse ?
Berlin, le 31 octobre 1806.
Vingt-quatrième bulletin de la grande armée.
Stettin est en notre pouvoir. Pendant que la gauche du grand-duc de Berg, commandée par le général Milhaud, faisait mettre bas les armes, à une colonne de six mille hommes à Passewalk, la droite, commandée par le général Lasalle, sommait la ville de Stettin, et l'obligeait à capituler. Stettin est une place en bon état, bien armée et bien palissadée : cent-soixante pièces de canon, des magasins considérables, une garnison de six mille
Weitere Kostenlose Bücher