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Par ce signe tu vaincras

Par ce signe tu vaincras

Titel: Par ce signe tu vaincras Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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parce que ce qui les réunissait, huguenots et catholiques français, c’était la haine de l’Espagne et de l’empire !
    Charles IX et Catherine de Médicis continuaient l’infernale politique de François I er , l’allié de Soliman le Magnifique.
    — Dieu sait combien nous avons souffert dans nos chairs ! concluait-il en me fixant.
    Je n’avais pas oublié Mathilde de Mons, ni les chiourmes, ni les bagnes des Barbaresques, ni Dragut-le-Cruel dont on ne savait s’il avait été tué lors du siège de Malte ou s’il continuait, avec Ali Pacha et Lala Mustapha, de commander les flottes ottomanes et barbaresques.
    J’imaginais qu’il avait survécu, tant, ces dernières semaines, les musulmans avaient montré de cruauté.
    J’avais tremblé d’effroi et de colère en écoutant le récit que m’avait fait Michele Spriano de la conquête de Chypre.
    Pourtant, ç’avait d’abord été la joie des retrouvailles sur ce quai de Messine, devant la passerelle de la Marchesa.
    J’avais vu cet homme voûté aux cheveux gris qui s’avançait lentement comme s’il avait eu besoin de reprendre souffle à chaque pas.
    Il était vêtu d’un pourpoint et d’un pantalon bouffant de velours noir. Aucune dentelle blanche, aucun tissu de couleur vive ne venait relever le noir du tissu, le gris de la peau et des cheveux.
    Il m’avait paru troublé. Je ne réussissais pas à mettre un nom sur ce visage qui ne m’était pourtant pas inconnu.
    J’avais imaginé un instant qu’il s’agissait de l’un de ces capucins qui allaient embarquer avec nous. Puis l’homme s’était redressé et avait murmuré quelques vers, ceux qui marquent l’entrée dans l’Enfer :
    Per mè si va nella città dolente
    Per me si va nel eterno dolore
    Per me si va tra la perduta gente.
    Je me suis mis à trembler ; les larmes ont envahi mes yeux et j’ai serré contre moi Michele Spriano.
    Je pleurais de joie, je bénissais Dieu d’avoir protégé Michele que j’interrogeai avec avidité.
    Il a commencé à parler lentement, sans me regarder, comme s’il évoquait pour lui-même ce qu’il avait vécu, ce bagne d’Alger que je connaissais si bien.
    Il y avait occupé des fonctions presque officielles, servant d’intermédiaire et de traducteur entre marchands chrétiens et barbaresques.
    Il s’était interrompu, avait hoché la tête.
    — J’ai vu, j’ai entendu, avait-il repris. Je sais, maintenant.
    Il avait baissé la voix.
    — Je vais te blesser, avait-il murmuré. Surtout ici, alors que tu t’apprêtes à combattre.
    Il avait haussé les épaules.
    — Mais les choses sont ainsi. Dieu, la religion, l’Église ne sont pour la plupart des hommes que des masques. Derrière leurs Livres saints, qu’il s’agisse du Coran, de l’Ancien ou du Nouveau Testament, ils cachent leurs livres de comptes. Ce ne sont pas les grains d’un chapelet qu’ils égrènent, mais un boulier de marchand qu’ils manipulent. Les ducats, l’or, les intérêts, l’achat d’épices, la vente de draps, voilà ce pour quoi ils vivent.
    Il avait posé la main sur mon épaule.
    — J’ai traduit leurs propos. J’ai été au courant de tous leurs secrets. En même temps qu’ils prêchent la croisade, les Vénitiens négocient avec le sultan. Cette Sainte Ligue n’est qu’une forme de leur négociation. Et le grand vizir, Sokolly, est au mieux avec l’ambassadeur de Venise à Constantinople. Je le sais. Le reste – il avait montré les galères dans la rade –, c’est le grand théâtre. Mais, Bernard, ceux qui combattent au nom de Dieu ne sont que des cartes à jouer que d’autres, banquiers, marchands, princes et rois, jettent sur la table au gré de leurs intérêts et pour gagner leur grande partie, celle dont ils tirent leur gloire et leurs profits.
    J’ai plaqué la main sur sa bouche, brutalement. Qu’il se taise !
    Puis je l’ai pris contre moi.
    — Tu es vivant, ai-je répété. Remercions Dieu ! Raconte-moi…
    J’ai retiré ma main. Il avait les lèvres tremblantes.
    — J’ai dit ce qu’un homme doit savoir. Que la plupart d’entre nous sommes voués à l’enfer. Ma Divine…
    J’ai frappé ma poitrine pour lui montrer qu’elle était là, en moi, contre moi, sous mon pourpoint, que ce livre qui ne me quittait jamais était ma cuirasse.
    Il a ri, et je l’ai enfin un instant retrouvé tel que je l’avais connu, puis il a repris son récit.
    Après avoir connu tant de secrets liant chrétiens et

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