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Piège pour Catherine

Piège pour Catherine

Titel: Piège pour Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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obéissance. Avez- vous donc oublié les pouvoirs que confère l'épée aux fleurs de lys ? Il est de mon devoir de Roi de maintenir, en les soutenant, toutes les prérogatives de mon chef de guerre.
    Devoir ! Maintenir ! Quels mots dans la bouche de Charles VII !
    Plus étonnée encore que désolée, Catherine regardait le Roi et ne le reconnaissait pas. Que lui était-il donc arrivé ?
    Certes, il avait toujours le même physique ingrat, fait d'un visage blême aux lignes tout en longueur, d'un grand nez tombant et d'yeux globuleux. Mais ces yeux- là, jadis ternes et timides, se posaient maintenant sur elle avec-assurance et sévérité. Les lignes du visage semblaient moins molles, plus fermement dessinées sous le grand chapeau de feutre noir, ceint d'une couronne d'or dont les bords se relevaient pour montrer les broderies d'or du revers. On avait même l'impression que le Roi avait grandi. Peut-être parce qu'il se tenait moins mal, beaucoup plus droit, s'étant enfin décidé à abandonner cette contenance inquiète et contrainte qui, si longtemps, lui avait été familière. Il n'était jusqu'à ses épaules, étroites et maigres, qui, sous le pourpoint garni de mahoitres piquées1, semblaient larges et vigoureuses.
    Debout devant son trône surmonté d'un dais bleu et or, il redressait la tête avec autorité tout en offrant les doigts aux caresses d'un grand lévrier de Karamanie, blanc comme neige, qui se tenait debout auprès de lui.
    Catherine, le cœur serré, comprit qu'elle avait, devant elle, un tout autre homme. Mais elle était venue pour lutter et elle entendait aller jusqu'au bout.
    — Que puis-je faire alors, Sire ? demanda-t-elle. Vous voyez mon chagrin, ma détresse... donnez-moi au moins un conseil...
    Charles VII parut marquer une légère hésitation qui rappela à Catherine le prince d'autrefois. Le beau visage désolé qui se levait vers lui semblait l'émouvoir... Se décidant, il descendit les trois marches qui surélevaient le trône, vint jusqu'à la suppliante et l'aida doucement à se relever.

    — Il vous faut retourner vers le Connétable, ma chère, et le prier aussi doucement que vous pourrez. À l'heure présente, ses hommes ont dû reprendre le fugitif... et peut-être est-il trop tard.
    1 Rembourrage qui était alors à la mode.
    Non !... Je n'en crois rien. Vous voulez dire, Sire, que mon époux pourrait déjà, à cette heure, avoir cessé de vivre ? C'est impossible !
    Le Connétable, je le sais, j'en suis sûre, ne fera pas tomber la tête d'Arnaud de Montsalvy sans avoir eu votre avis à ce sujet. Messire Tristan l'Hermite, son Prévôt des maréchaux, m'en a donné la certitude.
    — Je connais ce Tristan ! C'est un homme grave et qui ne parle point à la légère. Hé bien donc, suivez mon conseil et regagnez Paris, priez Richemont et peut-être..
    — Mais, Sire, songez que je ne suis qu'une femme, que je tourne depuis des jours dans un cercle vicieux. Si la grâce doit venir de Monseigneur de Richemont, donnez-moi au moins quelques lignes de votre main qui lui conseillent... Je dis bien conseillent, pas ordonnent, de se montrer clément ! Sinon, il me renverra vers vous, peut-être... et alors, que deviendrai-je ? Je suis seule ici, sans appui. Madame la reine Yolande, en qui j'avais mis tous mes espoirs, n'est point encore revenue de Provence où l'on dit qu'elle est souffrante. Mes amis les plus chers sont auprès d'elle ou bien guerroient en Picardie et en Normandie. Je n'ai personne... personne que vous !
    — Il est vrai que ma bonne mère était fort malade ces derniers temps mais, depuis hier, les nouvelles sont meilleures et annoncent qu'elle se serait mise en route pour assister aux noces de son petits-fils
    ! Vous la verrez bientôt...
    Puis, tout à coup, criant presque, repris par son ancienne nervosité encore sans doute assez proche de sa nature nouvelle :
    — ...Non, je vous en prie, ne pleurez plus ! Vous me mettez au supplice, Catherine ! Vous savez tout le bien que je vous ai toujours voulu ! Vous savez le pouvoir de vos larmes... et vous en profitez pour me forcer la main...
    Cette main, Catherine, sentant qu'il fléchissait, que peut-être la victoire était proche, voulut la saisir pour y poser ses lèvres mais, du fond de la salle, une voix se fit entendre, une voix douce et fraîche, une voix ravissante qui, cependant, disait des choses terribles.

    — Nul ne doit forcer la main du Roi, Sire... c'est crime de lèse-majesté ! Avez-vous

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