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Traité du Gouvernement civil

Traité du Gouvernement civil

Titel: Traité du Gouvernement civil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: John LOCKE
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d'où cette doctrine découle, et qui est, qu'un Roi abuse étran­gement de la confiance qu'on avait mise en lui, et de l'autorité qu'on lui avait remise, lorsqu'il ne conserve pas la forme de gouvernement dont on était convenu, et qu'il ne tend pas à la fin du gouvernement même, laquelle n'est autre que le bien public et la conservation de ce qui appartient en propre. Quand un Roi s'est détrôné lui-même, et s'est mis dans l'état de guerre avec son peuple, qu'est-ce qui peut empêcher le peuple de poursuivre un homme qui n'est point Roi, comme il serait en droit de poursuivre tout autre homme qui se serait mis en état de guerre avec lui? Que Barclay et ceux qui sont de son opinion, nous satisfassent sur ce point.
    (Aussi, il me semble qu'on peut remarquer ici ce que Barclay dit, que « le peuple peut prévenir le mal dont il est menacé avant qu'il soit arrivé ». En quoi il admet la résistance, quand la tyrannie n'est encore qu'intentionnelle. « Dès qu'un Roi médite un tel dessein, et le poursuit sérieusement, il est censé abandonner toute considération et égard pour le bien public. » De sorte que, selon lui, la simple négligence du bien public peut être considérée comme preuve d'un tel dessein, et au moins pour une cause suffisante de résistance ; il en donne la raison en disant, parce qu'il a voulu trahir ou violenter son peuple, dont il devait soigneusement maintenir la liberté. Ce qu'il ajoute, « sous le pouvoir, ou la domination d'une nation étrangère » ne signifie rien, le crime consistant dans la perte de cette liberté, dont la conservation lui était confiée, et non dans la destruction des personnes sous la domination desquelles il serait assujetti. Le droit du peuple est également envahi et sa liberté perdue, soit qu'il devienne esclave de ceux de leur propre nation, ou d'une étrangère, et en cela consiste l'injustice, contre laquelle seulement il a droit de se soulever; et l'histoire de toutes les nations fournit des preuves que cette injustice ne consiste point dans le changement de nation ou de personne dans leur gouverneur, mais d'un changement dans la constitution du gouvernement  *. )
    Bilson, évêque d'Angleterre, très ardent pour le pouvoir et la prérogative des Princes, reconnaît, si je ne me trompe, dans son traité de la Soumission chrétienne, que les Princes peuvent perdre leur autorité et le droit qu'ils ont de se faire obéir de leurs sujets. Que s'il était nécessaire d'un grand nombre de témoignages et d'autorités pour persuader une doctrine si bien fondée, si raisonnable, et si convaincante d'elle-même, je pourrais renvoyer mon lecteur à Bracton, à Forteseue, à l'auteur du Mirror, et à d'autres écrivains qu'on ne peut soupçonner d'ignorer la nature et la forme du gouvernement d'Angleterre, ou d'en être les ennemis. Mais je pense que Hooker seul peut suffire à ceux qui suivent ses sentiments touchant la politique ecclésiastique, et qui pourtant, je ne sais par quelle fatalité, se portent à nier et à rejeter les principes sur lesquels il l'a fondée. je ne veux pas les accuser d'être des instruments de certains habiles ouvriers qui avaient formé de terribles desseins. Mais je suis sûr que leur politique civile est si nouvelle, si dangereuse, et si fatale aux Princes et aux Peuples, qu'on n'aurait osé, dans les siècles précédents, la proposer et la soutenir. C'est pourquoi il faut espérer que ceux qui se trouvent délivrés des impositions des Égyp­tiens, auront en horreur la mémoire de ces flatteurs, de ces âmes basses et serviles, qui, parce que cela servait à leur fortune et à leur avancement, ne reconnaissaient pour gouvernement légitime, que la tyrannie absolue, et voulaient rendre tout le monde esclave.
     
    240. On ne manquera point, sans doute, de proposer ici cette question si com­mune : Qui jugera si le Prince, ou la puissance législative, passe l'étendue de son pou­voir et de son autorité? Des gens mal intentionnés et séditieux, se peuvent glisser parmi le peuple, lui faire accroire que ceux qui gouvernent pratiquent des choses pour lesquelles ils n'ont reçu nulle autorité, quoiqu'ils fassent un bon usage de leur prérogative. je réponds, que c'est le peuple qui doit juger de cela. En effet, qui est-ce qui pourra mieux juger si l'on s'acquitte bien d'une commission, que celui qui l'a donnée, et qui par la même autorité, par laquelle il a donné cette commission, peut désapprouver ce qu'aura

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