Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
interminable, et Alexandre fit de nouveau char ger la Pointe en lançant un hurlement sauvage et en éperon nant Bucéphale. Sensible à la fougue de son cavalier, le brave animal se cabra dans un hennissement et, prenant appui sur ses puissants jarrets, se propulsa vers l'avant.
Désormais, le char de Darius était à moins de cent pieds de distance, ce qui eut pour effet de décupler les forces d'Alexandre qui se fraya un chemin en abattant à coups d'épée ceux qui tentaient de l'arrêter.
Soudain, comme halluciné par ses efforts, le souverain macédonien tomba nez à nez avec son adversaire, et les deux rois se regardèrent un moment dans les yeux. C'est alors qu~Alexandre ressentit une douleur lancinante à
la cuisse et vit qu'une flèche s'était plantée au-dessus de son genou, sur le côté. Il serra les dents et arracha le projectile en dépit de sa souffrance, mais quand il releva les yeux, Darius n'était plus là: son aurige fouettait sauvagement ses chevaux en direction des collines, sur le sentier qui menait aux Portes arnaniennes~
Perdiccas, Ptolémée et Léonnatos entourèrent le roi blessé et firent le vide autour de lui, tandis qu'Alexandre criait
" Darius s'enfuit I Suivez-le ! Suivez-le ! "
Victimes d'une attaque concentrique des escadrons adverses les Perses vacillèrent et prirent la fuite. Seuls les Immortels demeurèrent sur le champ de bataille, formant un carré et répondant coup pour coup à leurs ennemis.
Alexandre déchira un morceau de son manteau, se banda la cuisse et se lança de nouveau à la poursuite des Perses Mais un cavalier de la garde royale se dressa bientôt devant lui, sabre au poing. Le roi s'empara alors de sa hache à double tranchant, fixée à son étrier, et brisa en deux l'arme de son adversaire, le laissant bouche bée. Alors que le souverain macédonien brandissait une nouvelle fois son arme, le soleil couchant éclaira brusquement le visage du Perse. Dans cet étrange jeu de lumières, Alexandre reconnut son adver saire.
Il reconnut le visage brun et la barbe noire d'un archer gigantesque qui avait tué d'un seul trait, à cent pas de dis tance, la lionne qui s'était jetée sur lui, de nombreuses années plus tôt. En un jour lointain, en un jour de chasse et de fête dans la plaine fleurie de l'…ordée.
Le Perse le reconnut également et le dévisagea sans mot dire, comme s'il venait d'être frappé par la foudre.
" que personne ne touche à cet homme ! ", s'écria Alexandre, avant de s'élancer au galop derrière ses compagnons.
La poursuite de Darius dura de nombreuses heures. Le quadrige du roi surgissait parfois au loin, puis s'évanouiSsait dans la végétation qui recouvrait la cime des collines et dissi mulait les sentiers. Alexandre et ses amis finirent par retrou ver le char au détour d'un chemin. Mais il était abandonné, tout comme la robe, le carquois d'or, la lance et l'arc du Grand Roi.
" Inutile de continuer, observa Ptolémée. Il fait nuit désor mais, et Darius a pris la fuite sur un cheval frais ® nous n'arri verons jamais à le capturer. Et puis, tu es blessé, aiouta-t-i en examinant la cuisse ensanglantée d'Alexandre. Rentrons: les dieux ont été assez généreux avec nous au cours de cette journée. "
50
exandre regagna le camp au coeur de la nuit, couvert de g et de boue, après avoir traversé la plaine parsemée de fe x, de cadavres et de charognes. Un même mélange de boue et de sang avait séché sur le corps de Bucéphale, lui donnant la couleur spectrale d'une apparition cauchemardesque.
,. Ses compagnons chevauchaient à ses côtés en traînant le c~ar du Grand Roi, qu'ils avaient fixé au harnachement de
rs étalons.
Le camp perse avait été pillé et saccagé par les soldats l acédoniens, mais les pavillons royaux étaient encore i acts: ils appartenaient de droit à Alexandre.
a tente de Darius--gigantesque--était faite de cuir ouvragé et pourvue de tentures de pourpre et d'or. Les pieux de soutènement avaient été
taillés dans du cèdre puis sculptés et gainés de lames d'or pur. Il y avait sur le sol des tapis d'une valeur inestimable. A l'intérieur, de lourds rideaux de soie blanche, rouge et bleue, divisaient l'espace en plusieurs pièces, comme s'il s'agissait de véritables quartiers fixes: la salle du trône pour les audiences, la salle à manger, la chambre royale, o˘ se trouvait un lit à baldaquin monumen tal, et la salle de bains.
Alexandre balayait la tente du regard comme
Weitere Kostenlose Bücher