Aux armes, citoyens !
retroussée à la hauteur du mollet. »
Et la foule autour du palais du Luxembourg s’écarte pour
laisser passer le carrosse rouge de Thérésa, ci-devant épouse Tallien, et
désormais favorite de Barras.
Elle règne, souvent accompagnée de la générale Bonaparte.
Le mari de Joséphine, Napoléon Bonaparte, glorieux, est
devenu, en même temps que général en chef de l’armée d’Italie, chef de l’armée
des Alpes après que Kellermann a été privé de son commandement.
Hoche est mort de tuberculose et le général Augereau
commande toutes les armées situées à l’est et regroupées sous le nom d’armée d’Allemagne.
Augereau, l’homme « prêté » par Bonaparte au
Directoire.
Donc, le général en chef de l’armée d’Italie contrôle en
fait toutes les armées de la République.
NEUVIÈME PARTIE
Fructidor an V – Floréal an VI
Septembre 1797 – Mai 1798
« Voilà
donc une paix à la Bonaparte »
« Voilà donc une paix à
la Bonaparte.
Le Directoire est content, le
public enchanté.
Tout est au mieux. On aura
peut-être quelques criailleries d’italiens ;
mais c’est égal. Adieu, général
pacificateur ! Adieu, amitié,
admiration, respect, reconnaissance :
on ne sait où s’arrêter dans
rémunération. »
Lettre de Talleyrand à Bonaparte
brumaire an VI (novembre 1797)
« Je ne sais plus obéir.
Ces avocats de Paris qu’on
a mis au Directoire n’entendent rien
au gouvernement, ce sont de
petits esprits…
Je doute fort que nous
puissions nous entendre
et rester longtemps d’accord…
Mon parti est pris, si je ne puis
être le maître, je
quitterai la France, je ne veux pas avoir fait tant
de choses pour la donner à
des avocats. »
B ONAPARTE à M iot de
Mélito, ambassadeur de France à Turin
27 brumaire an VI (17
novembre 1797)
31.
C’est l’automne de l’an VI.
Le vent et la pluie, et même de brusques et violentes
bourrasques, balaient toute la France. Et durant ces mois de fructidor, de
vendémiaire, de brumaire – septembre, octobre, novembre 1797 –, une terreur
masquée s’étend sur le pays.
Les vainqueurs du coup d’État du 18 fructidor traquent les
suspects de royalisme, les émigrés, les prêtres réfractaires que des lois
avaient absous, et que de nouvelles dispositions permettent d’arrêter, de
fusiller, de proscrire sans jugement.
« Les patriotes n’avaient marché jusqu’alors que sur
des ronces », écrit Joseph Fouché.
L’ancien terroriste de l’an II hante maintenant les couloirs
du Directoire. On se croise lors des réceptions que donne Barras au palais du
Luxembourg.
Fouché avait fait tirer à la mitraille sur les royalistes
lyonnais en 1793.
Il poursuit :
« Il était temps que l’ombre de la liberté portât des
fruits plus doux pour qui devait les cueillir et les savourer. »
On a nommé, pour remplacer Carnot et Barthélémy dans leurs
fonctions de Directeurs, Merlin de Douai et François de Neufchâteau, l’un
chargé de la Justice et l’autre de l’intérieur. Ce sont des républicains
déterminés.
Le public enchanté. Tout est au mieux. On aura peut-être
quelques criailleries d’italiens ; mais c’est égal. Adieu, général
pacificateur ! Adieu, amitié, admiration, respect, reconnaissance : on
ne sait où s’arrêter dans l’énumération… »
« Ils m’envient, je le sais, bien qu’ils m’encensent »,
murmure Napoléon Bonaparte.
Et quand son aide de camp, La Valette, lui dit :
« À Paris, ce sera pour vous un triomphe. On se pressera dans les rues que
vous emprunterez »,
Bonaparte hausse les épaules : « Bah, le peuple se
porterait avec autant d’empressement sur mon passage, si j’allais à l’échafaud. »
Ce réalisme, ce cynisme, sont partagés par une grande partie
des Français.
Trop d’événements depuis près d’une décennie ! Trop d’illusions
qui se sont dissipées comme des mirages.
Et cela touche toutes les catégories de la population, et
chacune d’elles réagit à sa manière, en fonction de ses conditions de vie.
Les citoyens des faubourgs sont affamés, misérables. Ils
entrent dans l’hiver sans bois de chauffage, sans vêtements chauds. Amers, désespérés,
ils crachent quand passent les voitures des « ventres dorés », des « ventres
pourris », des « nouveaux riches », des « fripons », ces
députés, ces Directeurs, ces financiers, tous charognards qui se nourrissent de
la guerre.
Et
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