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Aux armes, citoyens !

Aux armes, citoyens !

Titel: Aux armes, citoyens ! Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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de
même avec la Constitution française ?
    Lorsqu’il rencontre Barras, quelques jours plus tard, il dit
que « le régime directorial ne peut durer. Il est blessé à mort depuis le
coup d’État du 18 fructidor. La majorité de la nation, Jacobins et royalistes, le
rejette. »
    Il faudrait, a-t-il osé dire à Barras, que le Directoire l’accueille
parmi ses Directeurs, lui, Bonaparte, général pacificateur, que la foule
acclame. Lui seul pourrait redonner confiance en un régime décrié.
    Barras s’est cabré, a tonné :
    « Tu veux renverser la Constitution, Bonaparte ? Tu
n’y réussiras pas et ne détruiras que toi-même. »
     
    Porte fermée devant Bonaparte. La « poire n’est pas
mûre » ; le pouvoir ne cédera pas, n’offrira pas un siège à Bonaparte.
    On cherchera donc à l’éliminer. Peut-être en l’empoisonnant.
Des lettres anonymes l’avertissent. On veut le tuer.
    Au banquet de huit cents couverts organisé par les deux
Conseils – quatre services, huit cents laquais, trente-deux maîtres d’hôtel, et
du vin du Cap, du tokay, des carpes du Rhin et toutes sortes de primeurs –, Bonaparte
a son propre serviteur, qui change ses couverts et lui présente des œufs à la
coque.
    Bonaparte ne se laissera pas empoisonner, ni séduire.
     
    Il est de nouveau invité par Talleyrand qui donne en son
honneur, le 3 janvier 1798, une fête fastueuse à l’hôtel de Galliffet, et on y
joue une contredanse appelée La Bonaparte.
    On y chante un refrain qui célèbre Joséphine, celle qui doit,
au nom de la France, « prendre soin du bonheur du guerrier, du héros
vainqueur ». Et Bonaparte est élu, à la place de Carnot, membre de l’institut,
dans la « classe de sciences physiques et mathématiques, section des Arts
mécaniques ».
    Et c’est seulement au titre de membre de l’institut qu’il
assiste, parmi ses collègues savants, à la cérémonie qui, le
    21 janvier 1798 place Saint-Sulpice, commémore la mort de
Louis XVI. Barras, au nom de tous les participants, prête le serment de « haine
à la royauté et à l’anarchie ».
    Les chœurs chantent le Serment républicain, musique
de Gossec, paroles de Chénier :
    Si quelque usurpateur veut asservir la
France
    Qu’il éprouve aussitôt la publique vengeance
    Qu’il tombe sous le fer, que ses membres
sanglants
    Soient livrés dans la plaine aux vautours
dévorants.
    Bonaparte, habile, a été présent à ce qu’il appelle une « cérémonie
anthropophage » sans y jouer aucun rôle. Car il ne veut apparaître ni partisan
des « régicides », se coupant ainsi des royalistes, ni favorable à
une restauration, devenant dès lors l’ennemi des républicains.
    Il veut être au-dessus des factions. Mais l’inaction lui
pèse.
    « Il semblait que la terre lui brûlait les pieds »,
note La Révellière-Lépeaux.
    Et son impatience est d’autant plus grande que le peuple
continue de l’acclamer.
    S’il se rend au Théâtre des Arts, les spectateurs se lèvent
dès qu’ils l’aperçoivent dans une loge. Mais le risque existe aussi qu’après
quelques mois passés à Paris, l’attention ne se détourne de lui. Car les armées
du Directoire continuent d’agir sans lui.
    Le général Joubert a fructidorisé la Hollande, en
imposant un régime républicain centralisé, en créant une République sœur, batave,
une et indivisible.
    Les troupes françaises sont entrées à Rome, et Berthier en a
chassé le pape Pie VI.
    Le général Brune a occupé Berne et Fribourg. La République
suisse est née.
    Le Directeur Reubell, né à Colmar, n’a eu de cesse que de
réussir à annexer Mulhouse.
    Et chaque fois qu’est créée une République sœur, le
Directoire puise dans ses caisses pour alimenter le Trésor national.
     
    Comment dans ces conditions rester l’ Unique, illuminé
par la gloire, et apparaître comme celui qui peut arracher le pouvoir des mains
de ces Directeurs corrompus ?
    Bonaparte s’interroge.
    Il a parcouru les côtes de la Manche, découvert que l’armée
d’Angleterre, qu’il commande, ne pourra jamais briser le blocus de la flotte
anglaise. Tenter de le faire « est un coup de dés trop chanceux, dit
Bonaparte. Je ne veux pas jouer ainsi le sort de cette belle France. »
    Et le sien.
     
    Il rentre à Paris, étudie ce rapport que Talleyrand a soumis
au Directoire.
    Le ministre préconise la conquête de l’Égypte, moyen de
tourner l’Angleterre « sous les rapports du commerce

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