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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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dans les yeux de Cadet Bernard s'éteignit. Il vint à elle et, posant un genou sur le coussin qui supportait les pieds de la jeune femme :
    — La paix, belle Catherine, est l'inaccessible désir de tous ceux de notre temps sans pitié. Comment souhaiter la paix quand l'Anglais est si près de nous, quand il tient encore Rochefort-en-Montagne, et Besse, et Tournoel, quand les léopards d'Angleterre flottent sur quelques terres d'Auvergne ? Vous ne seriez pas en sûreté ici. Bien plus, votre présence mettrait le village et l'abbaye en danger, en grand danger puisqu'ils n'ont plus le moyen de se défendre. Carlat est vétusté, mais son roc est imprenable. Il refermera ses murs sur vous comme les doigts d'un poing solide et saura vous garder...
    Il avait pris la main de Catherine et, doucement, y posait ses lèvres.
    C'est, je crois bien, le poète Bernard de Ventadour qui a écrit je ne sais plus où : « Celui-là est bien mort qui ne sent au cœur quelque douce saveur d'amour». Vous serez cette saveur d'amour au cœur des vieilles montagnes qui ne vivaient plus, vous serez le trésor que gardera Carlat et vous ne saurez jamais combien je l'envie.
    Par-dessus le dos courbé de Bernard, Catherine rencontra le regard d'Arnaud et crut le voir s'assombrir. Mais ce ne fut qu'une impression. Déjà Montsalvy tournait les talons et, les mains nouées derrière le dos, s'en allait contempler les flammes. Les yeux de Catherine s'attardèrent rêveusement sur les larges épaules de son époux. Au fond de son imagination elle voyait surgir un château de rêve, très lointain, très élevé mais brillant d'une intense lumière intérieure, une demeure inondée de soleil qui serait enfin le foyer où s'abriterait leur amour.
    — Peut-être avez-vous raison, sire Bernard, dit-elle rêveusement, peut-être serai-je heureuse à Carlat...
    Sans lâcher la main de la jeune femme, Bernard se relevait, se tournait vers son ami.
    — Tu ne m'as pas répondu. Veux-tu défendre Carlat pour la maison d'Armagnac ?
    — Contre qui ? demanda Montsalvy sèchement sans se retourner.
    Cadet Bernard sourit et, entre ses paupières rapprochées, Catherine vit filtrer l'éclair moqueur de son regard.
    — Contre tout assaillant, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne, de Saint-Flour, de Ventadour... ou de Bourges !
    Arnaud ne bougea pas. Il y eut un bref silence, puis il demanda :
    — De Bourges ? Contre... le roi Charles VII ?
    La main brune de Bernard serra plus fort les doigts de Catherine. Sur son visage, le sourire s'effaça pour faire place à une implacable résolution.
    Même contre le Roi ! articula-t-il durement. Tant que La Trémoille régnera, nous, les Armagnacs, ne reconnaîtrons d'autres seigneurs que nous-mêmes, d'autre volonté que la nôtre ! Si le Roi en personne venait te demander Carlat, frère Arnaud, tu refuserais Carlat !
    Arnaud, lentement, se retourna. Sa haute silhouette se découpait en noir sur le fond ardent des flammes qui lui prêtaient quelque chose de redoutable. Dans l'ombre, Catherine vit briller les dents blanches de son époux et la conscience aiguë de son amour pour lui l'envahit jusqu'à la douleur. Quel homme pourrait jamais prendre la place qu'il occupait dans son cœur ? Quel homme pourrait jamais lui inspirer amour plus grand, plus fort ? Elle aimait tout de lui, sa beauté virile bien sûr, mais aussi cette force ardente, cette vitalité indomptable qu'il portait, jusqu'à son caractère abrupt mais droit et fier... Il était le seul maître qu'elle accepterait jamais... et, doucement, elle retira sa main de celle de Bernard.
    En trois pas rapides, Arnaud avait rejoint son ami.
    — Je suis ton homme, Bernard ! Donne-moi Carlat et va en paix ! Mais, à une condition.
    — Laquelle ?
    — Je veux être là quand le connétable de Riche- mont abattra La Trémoille !
    — Tu as ma parole ! Tu participeras à la curée !

    Bernard ouvrit les bras. Ses deux mains se posèrent
    lourdement sur les épaules de Montsalvy qu'elles étreignirent.
    — Prends patience et fais bonne garde, frère Arnaud ! Tu recouvreras tes terres, tes biens et, un jour, le château de Montsalvy revivra de ses cendres.
    Les deux hommes s'embrassèrent avec une rude tendresse. Une vague jalousie se glissa dans l'âme de Catherine. Elle comprenait qu'à cette minute tous deux l'avaient oubliée, rejetant la femme hors de leur univers à eux, les hommes, cet univers incompréhensible où la violence et la guerre tenaient une place

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