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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977
Autoren: Michèle Cotta
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de ma conversation des Deux-Magots, je lui avais fait part de ma certitude d’une candidature Mitterrand à l’automne. Jean-Jacques est certain que Mitterrand ne s’est pas encore décidé et qu’il lui faudra de longs jours avant de le faire.

    9 septembre
    Mitterrand, ce matin. Il me prévient qu’il déclarera sa candidature dans l’après-midi. Mais le général de Gaulle ne doit-il pas précisément prononcer à 15 heures une allocution attendue de tous ? « Je le sais, figurez-vous, me dit Mitterrand. Justement, c’est un très bon moment pour parler de ma candidature. Cela m’étonnerait qu’elle passe inaperçue ! »
    Il me demande de lui donner le numéro de téléphone de Claude Estier, sans doute pour peaufiner le texte de la dépêche qu’il destine à l’AFP, puis me quitte, pressé. Il doit rejoindre sa petite équipede campagne, Georges Dayan et André Rousselet, bien sûr, Hernu, évidemment, et donc, maintenant, Claude Estier. (Et Dumas peut-être ? Je ne le sais pas.) Il déjeune avec eux au restaurant La Palette, à Montparnasse.
    Dans l’après-midi, nous sommes tous devant la télévision, dans le salon du dernier étage de L’Express , avec J-J S-S et Françoise Giroud. Je n’ai pas voulu trahir le scoop de la candidature de Mitterrand dès le matin. Mais, en début d’après-midi, à quelques minutes de l’événement, je veux faire la maligne : « François Mitterrand se présente aujourd’hui », dis-je à Jean-Jacques et à Françoise vers deux heures trois quarts. Jean-Jacques me regarde avec commisération : « Pendant que de Gaulle parle ? Vous n’y êtes pas ! »
    Vers 16 h 15, ou 30, à quelques minutes près, je quitte la pièce où toute la rédaction de L’Express écoute l’allocution de De Gaulle et je vais monter la garde devant le téléscripteur. J’attends. Et je remonte, pas peu fière, quelques minutes après, pendant que de Gaulle continue de parler, avec la dépêche de l’AFP, dont je reproduis ici les passages les plus importants :
    « L’essentiel de ce qui a été dit souligne encore une fois l’incompatibilité d’humeur qui existe entre le général de Gaulle et la démocratie.
    « Je suis convaincu pour ma part qu’il convient d’aller plus loin dans la protestation. C’est pourquoi j’ai l’honneur de faire la déclaration suivante :
    « À moins de trois mois de l’élection présidentielle, les républicains résolus à combattre le pouvoir personnel sont dans l’incertitude. J’ai approuvé et soutenu la candidature de Gaston Defferre. Il n’est pas possible, après son retrait, de laisser plus longtemps se prolonger une situation qui fait le jeu du système actuel. J’ai donc décidé de solliciter les suffrages des Français et des Françaises le 5 décembre prochain. »
    Jean-Jacques lit la dépêche. Il est interloqué. Françoise, elle, instinctivement, avait eu davantage tendance à me croire lorsque je leur en avais parlé à tous deux en début d’après-midi. Elle fait meilleure figure.
    Je ne suis pas sûre que J-J S-S me pardonne d’avoir été au courant avant lui. Il risque de le prendre mal. Et aussi d’en vouloir à Mitterrand pour avoir caché ses intentions lors du dîner chez Clermont-Tonnerre.
    Il n’empêche : je rigole.

    Début septembre (écrit entre le 9 et le 15)
    Je reviens sur la semaine qui a précédé la candidature de François Mitterrand après diverses conversations avec lui, avec Claude Estier et avec tous les interlocuteurs – ou presque – de Mitterrand lui-même. Mais je n’ai pas souhaité prendre de notes verbatim sur le moment pour ne pas avoir l’air de vouloir exploiter illico leurs confidences. J’écris donc ces lignes à la fin de cette semaine décisive.
    C’est le 8 que Mitterrand a commencé ses consultations politiques. Il est d’abord allé chez Gaston Defferre, qu’il n’a trouvé ni chaud ni froid.
    Puis, à 21 heures, chez Daniel Mayer 6 , qui avait affirmé quelques heures auparavant devant la presse qu’il envisageait d’être le candidat unique de la gauche. Mitterrand démontre en somme au vieux leader socialiste, adversaire de toujours de Guy Mollet et président de la Ligue des droits de l’homme, qu’il est mieux placé que lui pour être candidat à la présidence de la République. Il a déjà, lui explique Mitterrand, l’appui des socialistes. « Et les radicaux ? » lui demande Daniel Mayer. « Les radicaux, lui
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