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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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raison, dit Catherine gravement. C'est un joli nom.
    Les yeux de Catherine s'accoutumèrent assez rapidement à l'obscurité de son cachot. Si mince que fût le soupirail, il permettait au moins de séparer le jour de la nuit et de distinguer les choses qui l'entouraient. La prisonnière remercia le ciel de n'avoir pas été jetée dans l'un de ces in-pace situés si profondément au-dessous du sol qu'aucune lumière n'y pénètre jamais, tel celui qu'elle avait connu à Rouen.
    Assise sur la paille pourrie de sa prison, elle laissa les heures couler sur elle. Ses mains enchaînées lui permettaient tout de même tous les mouvements malgré le poids des bracelets et elle s'aperçut bientôt qu'elle pourrait peut-être, en forçant un peu, les faire glisser de ses poignets. Ses mains étaient si menues, si minces... Mieux valait pourtant, pour le moment, ne pas essayer car ce ne pourrait être qu'au prix d'une douleur qui ne permettrait sans doute pas de réintégrer les fers.
    Autre sujet de satisfaction, elle n'avait pas été fouillée et la dague était toujours là, rassurante et solide au creux de sa gorge. Béni soit Dieu qui l'avait empêchée de la tirer tout à l'heure. On la lui aurait arrachée et elle ne l'aurait plus jamais retrouvée. Grâce à elle, Catherine était sûre d'échapper aux tourments que la comtesse devait méditer pour elle. Un coup rapide et tout serait dit. Elle ne hurlerait pas de souffrance sous l'œil moqueur de son ennemie... Pourtant, elle ne pouvait chasser l'angoisse qui lui étreignait la gorge ; qu'allait-il réellement advenir d'elle ? Les bruits du château lui parvenaient à peine, assourdis qu'ils étaient par la profondeur et l'épaisseur des murs
    ; pourtant il lui sembla entendre, à certain moment, une sorte de plainte lointaine, lugubre et déchirante. Elle devina que c'était la clameur de la tribu devant le corps torturé de son chef. Elle imagina les cris des femmes, leurs longs cheveux dénoués et couverts de poussières, les doigts griffant les visages en pleurs, les chants monotones, psalmodiés par la douleur d'un peuple, les malédictions, peut-être, qui montaient vers celle pour qui Fero était mort.
    — Mon Dieu, pria-t-elle tout bas, faites qu'ils comprennent, qu'ils me pardonnent, surtout Tereina. Elle va avoir si mal... Ayez pitié d'elle
    !...
    Auraient-ils seulement le temps de confier le cadavre au fleuve avec le cérémonial qu'elle avait vu l'autre nuit ? La dame avait ordonné qu'on les chasse et La Trémoille n'avait rien objecté. Il lui sembla entendre les ordres rugis par les sergents du Roi, le claquement des fouets des hommes d'armes chargés d'expulser les errants... Une voix pourtant chantait, une voix de femme profonde et belle. Et Catherine avait déjà entendu ce chant mystérieux et déchiré...

    Brusquement, elle se rendit compte que la voix ne chantait pas dans son imagination, mais bien dans la réalité... et si près d'elle. De l'autre côté du mur exactement. Alors, elle comprit et, emportée par une bouffée de joie, elle voulut s'élancer vers le mur d'où venait le chant.
    Mais les chaînes qu'elle avait oubliées se tendirent brutalement et, freinant son élan, la rejetèrent sur le sol, les poignets meurtris, les larmes aux yeux. Les entraves, pourtant, ne purent retenir sa voix qui jaillit, instinctivement, de son corps prisonnier.
    — Sara ! Sara ! Tu es là ? C'est moi...
    Elle se mordit la langue. Dans sa joie, elle avait failli crier : « C'est moi, Catherine. » Elle eut assez de présence d'esprit pour se rattraper :
    « Moi, Tchalaï... » Puis, de tout son cœur, elle écouta. On avait cessé de chanter dans la geôle voisine. Alors, elle cria encore : « Sara ? Je suis là ! »
    Il y eut encore un instant de silence... Enfin, avec un soulagement inexprimable, elle entendit :
    — Dieu soit loué !
    La voix était plus faible que dans le chant et Catherine comprit qu'il ne serait pas facile de parler. Puisqu'il fallait hurler pour être entendue, ce serait dangereux, mais tant pis. C'était déjà une grande joie de savoir Sara si près d'elle. Et puis, Tristan n'avait-il pas dit qu'il veillait sur Sara ? Déjà, tout à l'heure, il avait suivi Catherine des yeux quand elle accompagnait la dame de La Trémoille à la prison. Il avait dû s'étonner de la voir ressortir sans Catherine et en tirer des conclusions.
    Un peu rassérénée, Catherine se releva et retourna s'asseoir sur sa litière. Si la comtesse ne

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