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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Les hommes ne portaient que du buffle, mais à toutes les ceintures pendaient les dagues et les haches. Il était impossible de rien lire sur tous ces visages fermés. Silencieux, disciplinés comme une machine de guerre bien huilée, ils montaient d'un même pas vers les murailles d'instant en instant plus proches. L'ombre d'une tour polygonale s'étendit sur eux, les protégea.
    Catherine pensait que cette belle nuit claire et bleue était un étrange décor pour un meurtre. Elle l'eût préférée bien noire, bien opaque et un peu brumeuse, mais une joie orgueilleuse l'habitait malgré tout.
    C'était elle qui avait mis en marche ces hommes. S'ils étaient là, lancés dans cette chasse mortelle où chacun jouait sa tête, c'était parce qu'elle l'avait voulu, avec acharnement. Dans quelques instants, elle serait victorieuse ou vaincue sans recours et, tout à l'heure, en quittant l'auberge, elle avait, avec ses dernières recommandations, fait ses adieux à Sara.
    — Si je ne reviens pas, tu rentreras à Montsalvy et tu iras dire à mon époux que je suis morte pour lui. Et puis, tu veilleras sur Michel.
    — Inutile, avait dit Sara calmement. Tu reviendras.
    — Qu'en sais-tu ?
    — Ton heure n'est pas venue. Je le sens.
    Mais, à mesure qu'elle approchait du château, Catherine pensait que Sara pouvait avoir tort, pour une fois. La troupe qui lui avait paru formidable au départ semblait s'amenuiser à mesure que grandissaient les courtines neuves sous leurs hourds brillants d'ardoises bleues. Elle laissa échapper un soupir angoissé, et, aussitôt, la main de Pierre de Brézé, qui marchait auprès d'elle, voulut prendre la sienne. Mais elle la retira brusquement... L'heure n'était pas aux douceurs de l'amour et, à cet instant, elle ne voulait être pour ces hommes qu'un compagnon d'armes.
    — Catherine, reprocha le jeune homme. Pourquoi me fuyez-vous ?
    Elle n'eut pas à répondre. Ce fut Coétivy qui s'en chargea.
    — Silence ! ordonna-t-il. Nous approchons.
    Ils arrivaient en effet au sommet du coteau, au pied de la muraille sur laquelle on pouvait distinguer les gardes. Aucune lumière ne brillait dans le château. Dans le logis royal, le Roi dormait sans doute dans son large lit, auprès de la reine Marie qui, elle, devait avoir les yeux bien ouverts. Elle avait promis de veiller pour calmer son époux en cas d'alerte. Et puis comment aurait-elle pu dormir, sachant ce qui allait se passer ?

    Sur un geste impérieux de Bueil, toute la troupe se plaqua contre la muraille et devint invisible des chemins de ronde tandis que le jeune capitaine s'avançait, seul, vers la poterne close. Malgré elle, Catherine retint sa respiration. À ses pieds, elle pouvait voir la ville et ses toits pointus, luisants sous la lune, serrés comme un grand fagot bleu dans la ceinture de pierre des remparts, soulignant la coulée brillante de la rivière. La voix profonde de Marie Javelle sonnant minuit la fit tressaillir.
    Derrière cette haute porte close, Gaucourt et Frétard devaient être au rendez-vous.
    — On ouvre ! chuchota quelqu'un.
    En effet, une tremblante lumière jaune coula par l'entrebâillement.
    Celui qui ouvrait portait une lanterne. Catherine aperçut deux silhouettes vêtues de fer. Le gouverneur et son lieutenant qui, eux, n'avaient pas besoin de se cacher et pouvaient porter l'armure. L'un après l'autre, les conjurés se glissèrent dans le passage que Frétard tenait ouvert. Catherine passa après Brézé qui, nerveux, l'avait saisie par le bras et tirée derrière lui. Agacée, elle se dégagea d'un geste brusque. Elle se retrouva dans la cour du Coudray, de l'autre côté de cette tour du Moulin, la plus occidentale de l'ensemble fortifié.
    Devant elle, à quelques toises, se dressaient la gigantesque tour ronde où dormait son ennemi, le donjon derrière lequel on apercevait la chapelle Saint-Martin... Le but enfin !
    L'un après l'autre, Gaucourt dévisageait les hommes qui passaient devant lui, levant sa lanterne, les comptant. Quand le dernier fut passé, la poterne se referma aussi silencieusement qu'elle s'était ouverte, puis le gouverneur se mit à la tête de la troupe. Il désigna de son gantelet le donjon silencieux. Au-dessus de sa tête, Catherine pouvait entendre le pas lent et cadencé des sentinelles sur le rempart.
    Aucune ne s'arrêta. L'opération s'effectuait dans un silence impressionnant. Bueil et Loré se dirigeaient vers une des tours tandis que Coétivy et Tristan, à

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