Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
s'élevaient au-dessus des maisons, mais plus haut qu'elles toutes la masse imposante de la Médersa, l'université islamique, luttait avec le lourd bâtiment du grand hôpital, le Maristan, sans doute, à cette heure, le mieux équipé d'Europe.
    C'était l'heure du lever du soleil, l'heure où de chacun de ces minarets s'élevait la voix perçante des muezzins appelant les Croyants à la prière.
    Le chemin montagneux, à cet endroit, formait une sorte de balcon d'où la vue embrassait tout le prodigieux pays. Catherine vint s'asseoir sur une pierre tout près du bord et, devinant ce qu'elle éprouvait, les deux autres s'écartèrent pour la laisser méditer en paix et allèrent s'installer un peu plus loin, au coude de la route.
    Catherine ne pouvait détacher ses yeux du fabuleux paysage étalé à ses pieds. C'était là le but lointain de son voyage insensé, entrepris à l'encontre de toute saine raison, et elle se sentait émue aux larmes à le trouver si beau. N'était-ce pas là le pays même des songes et de l'amour ? Et pouvait-on vivre ici autrement que dans la joie et le bonheur ?
    Elle avait peiné, elle avait souffert, elle avait tremblé, versé des larmes et du sang, mais elle était arrivée. Arrivée ! C'en était fini des routes interminables, des horizons qui semblaient ne jamais devoir cesser de se succéder. Finies les nuits de doute, passées à se demander si elle atteindrait jamais ce lieu, que, parfois, dans ses minutes de découragement, elle s'était surprise à croire imaginaire. Grenade était devant elle, couchée à ses pieds comme une bête caressante, et sa joie était si grande de la découvrir enfin qu'elle en oublia un instant les dangers qui pouvaient l'y attendre. Arnaud, maintenant, n'était plus qu'à quelques pas d'elle et sa demeure devait être ce fabuleux palais si bien gardé.
    Si bien gardé !... Trop bien gardé ! L'idée, en l'atteignant, doucha sa joie. Ces jardins de rêves poussaient sur une forteresse. Sous leurs palmes vertes, sous leurs feuillages foisonnant et leurs roses, il y avait des soldats, des armes. Et cette femme, elle-même, cette femme qu'elle haïssait sans la connaître, devait avoir tous les moyens de se défendre et de garder sa proie. Comment atteindre les portes du palais, comment les forcer ? Comment trouver Arnaud dans ce fouillis de ruelles, dans ce monde cependant réduit ?
    Il aurait fallu des armées pour venir à bout de cette ville et Catherine savait bien que celles du farouche connétable de Castille s'y cassaient les dents depuis des années. Nul ne pouvait se vanter d'avoir violenté les frontières de Grenade et d'avoir vécu longtemps ensuite pour s'en glorifier.
    Parce qu'elle sentait le besoin pressant de lutter contre le découragement qui suivait de si près la joie du triomphe, Catherine se laissa glisser à genoux dans la poussière, joignit les mains et ferma les yeux. Durant de longues minutes, aussi ardemment qu'au pied de l'étrange petite vierge noire du Puy, elle pria, elle supplia le ciel d'avoir enfin pitié d'elle, de lui rendre l'homme qui, avec son enfant, constituait son seul bien sur la terre. « Tu ne permettras pas, Seigneur, que je n'aie touché enfin à cette rive lointaine que pour me rejeter au péril de la mer. Tu ne voudras pas que mes douleurs aient été vaines et que je ne sois venue ici que pour y perdre à jamais mon cœur et mon amour, parce que tu es la justice ! Et même si j'ai souvent mérité ton courroux, tu ne le permettras pas davantage parce que tu es aussi la Miséricorde et parce que je t'implore. »
    Une main, touchant doucement son épaule, fit rouvrir les yeux de la jeune femme. Elle vit Josse qui, penché sur elle, essayait doucement de la relever.
    — Prier en plein vent, dame Catherine, quelle imprudence !
    Oubliez-vous que nous sommes ici en pays infidèle ? Il n'y a, vous le voyez, pas la moindre maison de Dieu, rien que les mosquées où ces mécréants prient leur Dieu à eux. Levez-vous vite ! Si quelqu'un vous voyait...
    Avec plus d'énergie que de douceur, il la remettait sur ses pieds.
    Elle lui sourit derrière le voile noir.
    — Pardonnez-moi ! Je crois bien que je l'avais oublié. Tout est si beau ici ! Est-ce que ce pays n'est pas le Paradis lui-même ? Et c'est bien là ce qui m'épouvante, ami Josse. Quand on vit au milieu de tant de splendeur, tout doit s'effacer. On ne doit plus pouvoir respirer loin de ces montagnes, de ces eaux fraîches, de ces jardins. Et mon

Weitere Kostenlose Bücher