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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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loupe.
     
    — D'où est-ce que
ça sort?
     
    — Je l'ai
empruntée au magasin de la compagnie.
     
    — Pourquoi?
     
    — Parce que j'ai
de la misère à lire quand c'est écrit trop petit, si tu veux le savoir, lui
expliqua Gérard d'une voix impatiente. Dis donc, toi, travailles-tu pour la
police ?
     
    — C'est nouveau,
ça. Avant, t'as jamais eu besoin d'une loupe pour lire.
     
    — Il faut croire
que ma vue faiblit.
     
    — T'as peut-être
besoin de lunettes, lui fit remarquer Laurette, refusant d'abandonner le sujet.
     
    — Ben non ! Mon
père a commencé à en avoir besoin il y a seulement trois ans. Je viens juste
d'avoir trente-six ans...
     
    — Peut-être, mais
t'as toujours le nez fourré dans tes maudits journaux où c'est écrit tout
petit, rétorqua Laurette.
     
    Pour moi, tu t'es
usé la vue avec ces affaires-là. De toute façon, t'es tout de même pas pour
traîner une loupe tout le temps pour lire. Tu vas avoir l'air d'un petit vieux.
     
    Cette dernière
remarque fit mouche. L'orgueil avait toujours été le point faible du magasinier
de la Dominion Rubber. Pour lui, bien paraître et avoir une mise soignée étaient
des priorités. En cela, il ressemblait à sa mère et à sa sœur Colombe. Chez les
Morin, «on savait se tenir», comme le répétait Lucille en se rengorgeant.
     
    — Des lunettes...
     
    — Ben oui, des
lunettes, reprit sa femme. C'est pas la fin du monde. Remarque que c'est pas
encore sûr que t'en aies besoin, mais si c'est nécessaire, t'as pas le choix.
Il y a juste que j'ai pas la moindre idée de ce que ça peut ben coûter, cette
affaire-là.
     
    — Je pense avoir
entendu mon père dire que ça lui avait coûté une trentaine de piastres.
     
    Laurette esquissa
une grimace en entendant la somme. Elle se mit à calculer mentalement, se
demandant comment elle allait pouvoir boucler son budget du mois prochain s'il
fallait faire un tel déboursé.
     
    Durant quelques
minutes, les deux époux ne dirent rien. Pendant que Gérard continuait à -lire
son journal à l'aide de sa loupe, sa femme écoutait les cris des enfants en
train de se poursuivre dans la grande cour en essayant de reconnaître les voix
de Richard et de Gilles. A un certain moment, elle tourna la tête vers
l'intérieur de la maison. Elle aperçut le dos de Jean-Louis, assis sur le pas
de la porte d'entrée, à l'autre bout du couloir.
     
    — Demain soir, on
fera garder Denise et on va aller te faire examiner la vue, déclara-t-elle sur
un ton décidé.
     
    — J'ai pas besoin
de toi pour ça, protesta son mari. Je suis capable d'y aller tout seul.
     
    — Aie ! Je te
connais. Tu serais ben capable de pas y aller pantoute et d'essayer de me faire
accroire que t'en as pas besoin.
     
    — Est-ce que
c'est ben nécessaire que j'aille là?
     
    — Bonyeu, Gérard
! Ils peuvent tout de même pas te faire des lunettes à peu près. Il faut au
moins qu'ils t'examinent les yeux pour savoir.
     
    Le lendemain
soir, le père de famille revint de son travail et se garda bien de mentionner
la visite prévue chez l'optométriste, en espérant secrètement que sa femme
avait x oublié toute l'affaire. C'était vraiment mal la connaître. Dès qu'il
pénétra dans la cuisine, Laurette lui servit son souper.
     
    — On mange de bonne
heure. T'as un rendez-vous à sept heures pour ton examen de la vue.
     
    — Comment ça ?
     
    — Madame Gravel
m'a dit que Talbot, sur la rue Saint-Hubert, est pas trop cher. C'est lui qui a
fait, les lunettes de son mari. Ça fait que j'ai traversé chez Brodeur pour
téléphoner et il nous attend.
     
    — Ça pressait pas
comme un coup de couteau, cette affaire-là, protesta mollement son mari.
     
    — Peut-être, mais
ça sert à rien de traîner non plus. Gérard ne tenta même pas de s'opposer à ce
que
     
    Laurette l'accompagne
chez l'optométriste, sachant le combat perdu d'avance. Un peu avant sept
heures, le couple pénétra au rez-de-chaussée d'une maison en pierre de la rue
Saint-Hubert dont l'unique vitrine présentait une immense paire de lunettes
sous laquelle était écrit le nom du spécialiste.
     
    La réceptionniste
prit bonne note de leur arrivée et les pria de s'asseoir dans la petite salle
d'attente déserte. Un peu plus tard, Emile Talbot invita Gérard à pénétrer dans
son bureau. Quelques minutes suffirent pour procéder à
     
    l'examen. Le
spécialiste sortit de la pièce derrière son patient et tendit sa prescription à
la jeune

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