Emile Zola
contraire, que s'agrandir et s'embellir.
C'est à Médan que Zola a passé les meilleurs moments de sa vie. C'est là qu'il a composé la plupart de ses romans à grand succès, notamment Nana, Germinal, la Terre. Son logis, par sa position même, lui inspira le sujet d'un roman : des fenêtres de sa maison, resserrée entre la route et la voie ferrée, Zola voyait filer les trains, et, dans la nuit, les signaux dardaient sur lui leurs gros yeux rouges. D'où l'idée d'écrire un roman sur les Chemins de fer, comme il en avait donné un sur les Halles, sur les Grands Magasins, et ce fut la genèse de la Bête Humaine, cette vision des convois glissant sur les rails, sous ses yeux, et se perdant sous l'horizon ou s'enfonçant dans la nuit, avec un fracas prolongé et des sifflements stridents.
Médan, outre le séjour de Zola, appartient à l'histoire littéraire et à la bibliographie du XIXe siècle : là, se réunirent les Cinq : Guy de Maupassant, Léon Hennique, Paul Alexis, Céard et Huysmans.
De leur réunion, et de leur accord, sortit le livre les Soirées de Médan, recueil précieux, qui contient Boule-de-Suif et l'Attaque du moulin, pique-nique littéraire savoureux où chacun apporta son plat de haut goût.
Enfin, grâce à la libéralité de la veuve de Zola, et par une touchante et noble pensée, la maison du grand historien des maladifs, des faibles, des déshérités et des pauvres, est devenue celle de l'Enfance débile et vouée, faute de secours, à l'anémie et à la mort. C'est la réalisation du rêve bienfaisant de Pauline Quenu.
Comme, dans la maison de Bonneville, fouettée du vent et assaillie par les flots, les lamentables enfants de ces pêcheurs normands, abrutis par le calvados et décimés par la misère, trouvaient des soins, des dons, des secours immédiats, les minables petits êtres confiés à l'Assistance publique, déchet urbain, scories vivotantes rejetées hors du creuset parisien, ont désormais, à Médan, sous un climat moins tempêtueux et dans un paysage plus riant, encadré de minces peupliers et d'ormes trapus, un asile agréable, une maison, une famille, avec des soins et un régime fortifiant leur faiblesse, arrêtant leur dégénérescence. Ces enfants, n'étant pas atteints de maladies aiguës ou contagieuses, mais seulement de débilité générale, due aux troubles de la nutrition, et aussi aux conditions fâcheuses de leur hérédité, de leur milieu, avaient besoin d'être séparés des véritables malades. C'est donc une maison de convalescence et de régénération physique et morale pour les pauvres déshérités. Grâce à Émile Zola et à la générosité de sa femme, ces chétifs rejetons de parents épuisés par le travail, par la misère, par l'avarie et l'alcool, reprendront vigueur et santé.
Ce sont des rescapés du puits noir de l'enfer social : ils pourront plus tard être utiles à la société, au lieu de lui être à charge, et ils connaîtront, ce qui semblait leur être fatalement interdit, la joie de vivre !
C'est le 29 septembre 1907, jour anniversaire de la mort d'Émile Zola, et date du pèlerinage anniversaire à la maison de l'écrivain, que l'Assistance publique a pris officieliement possession de la propriété de Médan et de la Fondation Zola. La cérémonie a été simple et digne.
Le directeur de l'Assistance publique, le secrétaire général de cette administration, le président du Conseil municipal, le préfet de la Seine, le chef du cabinet du président du Conseil, le ministre de la Guerre, les autorités municipales de Médan, M. Maurice Berleaux, ancien ministre, député de la circonscription, ont présidé à cette cérémonie, à laquelle assistaient quelques écrivains et artistes, amis personnels du glorieux écrivain : Alfred Bruneau, Paul Brulat, Saint-Georges de Bouhélier, Maurice Leblond, Léon Frapié, le graveur Fernand Desmoulin, et enfin le docteur Méry et la doctoresse Javinska, à qui est confiée la direction de l'asile.
Mme Émile Zola avait reçu les personnages officiels et les amis de son mari, ayant à ses côtés les deux enfants laissés par l'écrivain. Tout auréolée de bonté vraie, sans ostentation de résignation, sans l'emphase du sacrifice public, entre ses deux enfants d'élection, dans cette demeure désormais consacrée à l'enfance malheureuse, cette bienfaisante femme personnifiait, avec une discrète abnégation, l'admirable Pauline de la Joie de vivre, secourable aux
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