En ce sang versé
petite femme qui tenait à bout de bras un des plus importants monastères de femmes du royaume, par sa capacité à distinguer le juste de l’injuste, quitte à bafouer l’autorité placée au-dessus d’elle, il s’inclina bas, murmurant :
— Le merci, madame ma mère. Pas seulement pour vos révélations, la confiance que vous avez placée en moi et dont je me montrerai digne, sur mon honneur. Toutefois… peu d’êtres éblouissent de leur lumière.
Un léger sourire flotta sur les lèvres de Mme de Gausbert. Elle murmura à son tour :
— Savez-vous, bourreau, que Dieu semble tout particulièrement aimer les étranges créatures qu’Il a placées sur Terre ?
Hardouin cadet-Venelle reprit la route de Nogent-le-Rotrou. Il se défendit contre l’espèce de mélancolie qu’il ressentait depuis sa conversation avec Mme Constance de Gausbert. Déroutant et désagréable sentiment de songer qu’il allait devoir garder un affreux secret afin de ne pas ajouter à la peine immense de Tisans. Une ignoble délatrice en plus d’une impardonnable meurtrière. Henriette conspirait, seule avec sa vile âme, sachant le sort que réserverait l’Inquisition à certaines de ses sœurs par elle désignées comme impies, parjures à leurs vœux.
Marie, Mahaut, les deux visages parfaits, si similaires, se confondirent dans son esprit, le soulageant d’une détestable pesanteur. La pureté comme unique remède à la hideur de certains êtres. Il allait se battre afin de sauver la pureté.
Il lui fallait rejoindre cet aesculapius, ce Jehan Fauvel.
Brève annexe historique
ABBAYE DE FEMMES DES CLAIRETS , Orne : Située en bordure de forêt des Clairets, sur le territoire de la paroisse de Masle, sa construction, décidée par charte en juillet 1204 par Geoffroy III, comte du Perche et son épouse Mathilde de Brunswick, sœur de l’empereur Othon IV, dura sept ans, pour se terminer en 1212. Sa dédicace fut cosignée par un commandeur templier, Guillaume d’Arville, dont on ne sait pas grand-chose. L’abbaye était réservée aux moniales de l’ordre de Cîteaux, les Bernardines, qui avaient droit de Haute, Moyenne et Basse Justices.
ARTHUR II DE BRETAGNE (1261-1312) : Duc de Bretagne et comte de Richmond, fils de Jean II et de Béatrice d’Angleterre. Il succéda à son père en novembre 1305, après la mort accidentelle de celui-ci, écrasé par un mur à Lyon, alors qu’il menait la mule du pape Clément V. Il fut d’abord marié à Marie de Limoges, puis à Yolande de Dreux, reine douairière d’Écosse, deux unions dont naquirent neuf enfants. Ces alliances permirent à la couronne ducale de récupérer la vicomté de Limoges ainsi que le comté de Montfort-l’Amaury. Le règne d’Arthur II fut assez bref et paisible. Entre autres choses, la Bretagne lui dut de mettre un terme à l’interminable querelle dite du tierçage. Le clergé paroissial breton exigeait que lui soit remis un tiers des biens meubles de chaque paroissien à son décès. Après d’âpres négociations avec les émissaires de Clément V, Arthur II parvint à faire diminuer ce prélèvement à un neuvième, d’où son nom de neume, dont furent exemptés les plus pauvres.
BONIFACE VIII (Benedetto Caetani) (vers 1235-1303). Cardinal et légat en France, il devint pape sous le nom de Boniface VIII. Il fut le virulent défenseur de la théocratie pontificale, laquelle s’opposait au droit moderne de l’État. Il fut également l’auteur de lois anti-femme et fut soupçonné, sans qu’il existe de preuve, de pratiquer la sorcellerie et l’alchimie afin de préserver son pouvoir. L’hostilité ouverte qui l’opposa à Philippe le Bel commença dès 1296. L’escalade ne faiblit pas, même après sa mort, la France tentant de faire ouvrir un procès contre sa mémoire.
BOURREAU : Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les bourreaux de métier n’ont pas toujours existé. On « s’arrangeait » auparavant en désignant un individu qui devait exécuter les sentences (le seigneur, le juge, ou, parfois même le dernier marié ou le dernier arrivé en ville, etc). Puisque chacun pouvait être mis à contribution, qu’il s’agissait d’une tâche occasionnelle, ceux qui en étaient chargés n’étaient pas frappés d’ostracisme comme ce fut le cas plus tard. C’est au XIII e , et peut-être même au XII e siècle, qu’une seule personne fut chargée de l’application de toutes les
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