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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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intervînt pour qu’il acceptât de frotter sa joue à celle du laideron. Dans le fond de la salle, l’un de ses compagnons de jeux, le bâtard Jean d’Orléans 1 , cachait un sourire derrière sa main.
    Peu après, informée de la visite à son fils de Madame Yolande, la reine Isabeau arrivait, soutenue aux aisselles par deux valets, et se laissait tomber dans un fauteuil. Après que les enfants se furent retirés dans le jardin, Yolande dit à Isabeau :
    – Ma bonne, ces enfants ont l’air de se plaire. Quelque chose me dit qu’ils feront un beau couple.
    – Parler de couple est prématuré, bougonna Isabeau. De plus, ce projet me semble singulier. Pourquoi n’avoir pas porté votre choix sur l’un des aînés de Charles : Louis ou Jean ? Auriez-vous distingué en leur cadet celui qui sera appelé à régner ? Avez-vous été renseignée par les astres ou les médecins ?
    – Il m’arrive fréquemment, dit Yolande d’un air gêné, de me fier à mon instinct. Il me dit que votre petit Charles régnera et aura une longue vie, après bien des troubles. Nous autres femmes savons que l’instinct est plus sûr que les astres et les médecins.
    Isabeau réclama des fruits confits et s’enferma dans son silence en mâchonnant ces friandises. Les prédictions de sa cousine lui faisaient froid dans le dos : elles jetaient avec désinvolture aux oubliettes ses deux aînés auxquels, il est vrai, la Faculté ne prêtait pas une longue existence. Charles, ce greluchon, roi de France ! Il y avait de quoi rire. Elle avait plutôt envie de pleurer.
    De la fenêtre, Yolande faisait des signes aux enfants qui jouaient sur un parterre avec des chiens. Elle se retourna et demanda à Isabeau la permission d’emmener Charles avec elle à Saumur lorsqu’elle y retournerait.
    – Il y serait plus en sécurité qu’ici, dit-elle, et le grand air lui ferait du bien. Je le trouve un peu chétif.
    – Soit, soupira Isabeau, mais prenez une bonne escorte pour vous accompagner.
     
    Il a plu toute la matinée sur le Val de Loire et la fin du jour s’annonce maussade. Soudain, alors qu’on ne l’attendait plus, un gros soleil blafard a percé et fait courir sur le fleuve et les frondaisons du parc de Saumur des ondes crépitantes.
    – Suis-moi, dit Marie. Nous allons faire une promenade à cheval jusqu’à Saint-Florent, chez la dame d’Alençon.
    – Pas envie, dit Charles d’un ton boudeur. Trop loin et trop dangereux.
    Il se replonge dans la lecture de l’ Imitation que son précepteur a fait rédiger par les moines de Marmoutier. Cette lecture ne lui procure qu’un plaisir morose, mais elle le change des parties de cartes, du jeu de paume et de la chasse.
    Du bout de l’index Marie gratte l’extrémité de son nez où la chaleur a fait s’épanouir un bouton. Elle frotte ses joues creuses, ses lourdes paupières, tourne le dos et soupire : impossible de faire sortir ce nigaud de son apathie ! Elle s’apprêtait à descendre jouer dans le parc lorsqu’elle a vu entrer sa mère, l’air soucieux.
    La reine s’approche de Charles, referme le livre d’un geste sec.
    – Mon enfant, dit-elle, j’ai à vous apprendre une terrible nouvelle : le roi d’Angleterre vient d’écraser notre armée à Azincourt, dans le nord du pays. Les chevaliers qui n’ont pas été pris à rançon ont été massacrés. Mon beau-frère Charles d’Orléans est parmi les captifs. Il sera conduit à Londres...
    Elle secoue l’épaule de Charles, s’écrie :
    – Cela ne semble guère vous émouvoir, monseigneur ! Et pourtant cette défaite pourrait en annoncer d’autres. Dois-je vous rappeler que votre frère Louis vient de mourir et que Jean ne peut espérer vivre longtemps. Et alors, le dauphin, ce sera vous, Charles. M’entendez-vous ? Ce sera à vous de tenir tête aux Anglais. Ne comptez ni sur votre père et encore moins sur votre mère pour prendre les décisions qui s’imposeront.
    Elle ajoute :
    – Retrouvez-moi ce soir dans mon oratoire avec Marie. Nous unirons nos prières pour votre salut et celui du royaume qui sera le vôtre plus tôt peut-être que vous ne le pensez. Demain, je vous demanderai de présider mon Conseil. Ce sera pour vous une expérience enrichissante.
    – Mais, madame, bredouille Charles, jamais je ne pourrai...
    – J’insiste, monseigneur ! Il faut déjà faire votre apprentissage de roi.
    1 - Plus tard, Dunois, compagnon de Jeanne.

2
    Le château dans l’île

Domrémy, 1423-1424
    On

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