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Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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dit-elle.
Pourquoi ne viendriez-vous pas vivre quelque temps auprès de moi ? Nous ne
nous sommes jamais beaucoup parlé mais j’aimerais que vous voyiez en moi une
sœur aînée ou tout au moins une véritable amie...
    Fiora
lui rendit son baiser avec sincérité et même un peu de honte. Comme elle avait
détesté cette merveilleuse jeune femme en qui elle s’obstinait à voir une
rivale deux mois plus tôt ! ... ou deux siècles plus tôt ! En vérité,
rien n’empêchait plus l’épouse, même dédaignée, de Philippe de Selongey de
devenir l’amie de Simonetta. Et elle éprouva soudain un grand chagrin au
souvenir de la prédiction du Grec, souhaitant de tout son cœur qu’elle fût
erronée...
    Marco
Vespucci appuya l’invitation de sa femme mais le cousin Amerigo, toujours à
mi-chemin des étoiles, causa une légère perturbation en tournant le dos à Fiora
pour baiser dévotement la main de Léonarde qui étouffa de son mieux un éclat de
rire. Simonetta, levant vers le plafond un regard accablé, sauva la situation
en entraînant l’étourdi hors de la chambre mortuaire au pas de charge.
    Chiara,
que son oncle avait emmenée tôt le matin à sa vigne de San Gervasio, arriva
comme une bombe, remorquant après elle la grosse Colomba et un valet chargé d’un
coffre à vêtements.
    – Je
ne te quitte plus ! déclara-t-elle à Fiora en l’embrassant. Je m’installe
auprès de toi jusqu’à ce que tu en aies assez. Et n’essaie pas de m’en
empêcher. Quelque chose me dit que tu pourrais bien avoir besoin de secours
avant qu’il ne soit longtemps.
    Sans
attendre de réponse, elle alla s’agenouiller auprès du lit et, les mains sur
son visage, s’absorba dans une profonde prière. Le cœur réchauffé par cette
tendresse spontanée, Fiora la regarda prier un instant puis revint à l’épuisant
devoir qui l’obligeait à accueillir tous ceux qui se présentaient en dépit d’une
lassitude grandissante. Elle savait néanmoins que le plus dur allait venir, qu’à
moins d’un miracle, il lui faudrait tout à l’heure recevoir l’odieuse Hieronyma
dont elle était persuadée qu’elle avait fait assassiner son père... Son seul
espoir résidait dans le fait qu’au milieu de tout ce deuil la dame n’oserait
pas réclamer la réponse à la scandaleuse offre de mariage qu’elle avait
formulée la veille. Mais c’était mal la connaître...
    Elle
vint avec le soir et les échos du palais s’emplirent des clameurs et des
sanglots d’une bruyante douleur qui hérissa l’épiderme de Fiora. Sortant de la
chambre où, depuis une grande heure, le peintre Sandro Botticelli, assis dans
un coin, crayonnait, silencieux, et les yeux brouillés de larmes, l’ultime
effigie d’un homme qui croyait depuis toujours à son génie, elle alla attendre,
dans la galerie, l’arrivée de son ennemie. Son intention était de lui interdire
l’accès de cette pièce où reposait son père.
    La vue
de Hieronyma, emballée de draperies funèbres comme une matrone de la Rome
antique et le visage ruisselant de larmes, lui souleva le cœur. Elle allait
crier, ordonner que l’on jetât dehors ce monstre d’hypocrisie mais Chiara la
retint :
    – Même
si tu as raison de croire ce que tu crois, tu dois la recevoir.
    – Je
ne veux pas qu’elle approche mon père !
    – Tu
ne peux pas l’en empêcher. Elle est de la famille. Tu ne dois donner prise à
aucune critique.
    Silencieuse
mais rongeant son frein, Fiora salua d’une inclination de tête et ouvrit
elle-même devant la visiteuse, la porte de la chambre où celle-ci s’élança en
criant :
    – Où
es-tu, Francesco ! Mon cousin fraternel... mon frère ! Tu ne sauras
jamais à quel point tu m’étais cher, à quel point...
    – Je
crois qu’au contraire, là où il est, mon père sait parfaitement à quoi s’en
tenir sur les sentiments de chacun ! dit sèchement Fiora, incapable de se
taire plus longtemps. Mets, je t’en prie, un frein à l’expression de... ta
douleur, cousine ! Mon père n’aimait pas que l’on extériorise ses
sentiments.
    – Tu
parles de ce que tu ignores ! Nous autres Florentins aimons donner libre
cours à nos joies comme à nos douleurs. Mais, pour nous comprendre, il faut
être de notre sang...
    Elle
alla s’agenouiller à la tête du lit, cachant ainsi à Botticelli la tête du
défunt. Avec un soupir, le peintre s’arrêta. Il dut attendre de la sorte un
grand quart d’heure. L’oraison de Hieronyma,

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