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Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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bien, magnifique seigneur, répondit le
médecin dont la voix profonde laissa percer une note sarcastique. Je suis venu
céans porté par la foule indignée, dont tu peux encore entendre d’ici les
clameurs. (En effet, des bruits montaient du dehors prouvant que la cohue
stationnait toujours devant le palais Beltrami.) Il se trouve que j’étais au
Mercato Nuovo quand messer Beltrami a été frappé et j’ai voulu lui donner mes
soins malheureusement inutiles car il est mort sur le coup. Enfin...
    – Peut-être
serait-il bon que nous t’entendions ? coupa Petrucchi. Tu es un témoin
précieux...
    – Mais
qui ne pourra t’en dire plus que tous ceux qui étaient présents. Enfin,
disais-je, j’ai pensé que monseigneur Lorenzo serait heureux qu’un de ses amis
se trouvât là pour porter, sur-le-champ, un peu de réconfort à celle qu’un
crime vient de rendre orpheline et dont la douleur force le respect. A cette
heure, donna Fiora a besoin d’amis plus que de magistrats.
    Petrucchi
devint aussi rouge que sa robe sous ce double rappel aux convenances et à la
puissance du Médicis. Il marmotta quelques vagues paroles de condoléances et se
retira avec un grand air de dignité. Son pas, qui se voulait la solennité de la
loi, résonna dans la galerie puis s’éteignit. Alors Fiora qui avait envie d’être
seule, se tourna vers Lascaris :
    – Merci !
dit-elle, sincère. Je ne sais pas pourquoi tu t’intéresses ainsi à moi mais je
t’en suis reconnaissante... comme de ce que tu as dit à ce vaniteux personnage,
    – Tu
ne veux toujours pas suivre mon conseil ?
    – Je
ne le peux, ni ne le veux. Il adviendra de moi ce qu’il plaira à Dieu...
    – Je
sais depuis longtemps qu’on ne peut aller contre son destin et qu’il est plus
difficile encore de retenir l’homme sur la pente qu’il a choisie. Quant à la
femme... Souviens-toi cependant de ce que je t’ai dit : appelle-moi quand
tu ne sauras plus de quel côté te tourner...
    Il
salua et disparut comme une ombre, laissant Fiora désorientée. En vérité, elle
ne savait que penser. Cet homme semblait posséder le don de lire dans l’avenir
mais sans en distinguer les détails. En outre, la jeune femme n’arrivait pas à
comprendre quel but il poursuivait en s’attachant ainsi à elle, jeune
Florentine parmi beaucoup d’autres. Enfin, elle ne parvenait pas à faire tout à
fait confiance à ce personnage bizarre ni d’ailleurs à éprouver pour lui une
vraie sympathie. Il y avait en Démétrios quelque chose qui l’attirait et la
repoussait à la fois. Mais quoi ?
    Léonarde,
qui était sortie pour donner quelques ordres, revint et la trouva seule
contemplant douloureusement la longue forme immobile, si pâle sur la pourpre du
lit, cette apparence qui avait été, deux heures plus tôt, un homme plein d’intelligence
et de vie, un homme qui voulait lutter pour le bonheur de celle qu’il avait
élue pour fille. Elle la prit doucement par le bras.
    – Venez,
mon enfant, il faut me laisser vaquer, avec les serviteurs, à la toilette de
votre père. Vous-même devez vous préparer car la journée sera longue et
pénible, comme celle de demain et celle d’après-demain. J’ai disposé dans votre
chambre où Khatoun vous attend ce qu’il vous faut... Mais reposez-vous un peu !
Vous allez en avoir besoin.
    Une
heure plus tard, Fiora, habillée jusqu’au menton de noir mat, un voile sur ses
cheveux sévèrement tressés, attendait auprès de son père dans la chambre que l’on
avait tendue de noir, la visite annoncée du maître de Florence.
    Selon
la coutume de la République qui voulait tous ses citoyens égaux devant la mort,
le corps de Francesco Beltrami avait été habillé de simple étamine blanche
fourrée de taffetas et coiffé d’un bonnet sans aucun ornement. Pas de bijoux,
pas le moindre signe de richesse. On avait glissé sous lui la paillasse
obligatoire mais cette paillasse était posée sur le grand lit pourpre qui, dans
le décor funèbre, éclatait comme une énorme tache de sang dont la blancheur du
défunt figurait le reflet. Deux cierges seulement, mais très gros, brûlaient de
chaque côté du lit devenu catafalque. Ils brûleraient ainsi jusqu’à l’heure des
funérailles où le corps, uniquement recouvert d’un drap blanc, serait porté à
sa sépulture. Seule dérogation à la loi qui faisait du charnier communal le
lieu du dernier repos, Beltrami, le plus puissant de ceux de l’art de

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