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George Sand

George Sand

Titel: George Sand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elme Caro
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LES ANNÉES D'ENFANCE ET DE JEUNESSE DE GEORGE SAND - LES ORIGINES ET LA FORMATION DE SON ESPRIT
    «On ne lit plus George Sand», nous dit-on. Soit ; mais, ne fût-ce que pour l'honneur de la langue française, on reviendra, nous le croyons, sinon à toute l'oeuvre, du moins à une partie de cette oeuvre épurée par le temps, triée avec soin par le goût public, supérieure aux vicissitudes et aux caprices de l'opinion. Quand on nous a demandé de rassembler nos souvenirs sur cet auteur et de les faire revivre dans ce temps si étrangement dédaigneux et si vite oublieux, on est allé au-devant d'un secret désir que nous avions de faire appel, un jour ou l'autre, à nos impressions d'autrefois, de les ranimer par une nouvelle lecture, de les produire à la lumière en les rectifiant et les tempérant par l'expérience acquise et la comparaison. Sand ! cette syllabe magique résumait pour nous des journées de rêveries délicieuses et de discussions passionnées. Elle représente tant de passions généreuses, tant d'aspirations confuses, de témérités de pensée, de découragements profonds, d'espérances surhumaines mêlées à l'élégante torture du doute ! c'était en une seule conscience, en une seule imagination, une partie d'une génération qui se tourmentait vaguement au milieu d'un état de choses prospère et tranquille en apparence, aux approches de 1848, comme si la tranquillité un peu monotone des événements était une excitation à désirer autre chose, à souhaiter l'émotion, à se précipiter dans l'inconnu des faits ou des idées : génération heureuse, en somme, bien que déjà remuée par des pressentiments obscurs. Une vague idée de réforme ou de rénovation sociale, plus ardente que précise, planait dans beaucoup d'esprits, agités sans trop savoir pourquoi. C'était le temps où un jeune homme «ayant le tourment des choses divines», comme disait George Sand, pouvait se donner la joie d'entendre, dans la même journée, les appels splendides de Lacordaire à Notre-Dame, et, le soir, l'émouvante voix de Mlle Rachel au Théâtre-Français dans quelque grande tragédie, ou bien encore s'enivrer de la prose exquise et presque rythmée d'Alfred de Musset, révélé sur la même scène.
    On lisait quelque grande et profonde poésie de Victor Hugo sur la mort récente de sa fille ; on discutait sur tel ou tel portrait des Girondins de Lamartine ; on dévorait la Mare au Diable, ce petit chef-d'oeuvre de poésie rustique qui rachetait par son charme l'erreur prolixe du Meunier d'Angibault.
C'était un temps saturé d'idées et d'émotions, singulièrement caractérisé par un de ces grands poètes qui disait alors : «La France s'ennuie», et, chose plus singulière, qui le lui faisait croire, confondant l'ennui avec la secrète fermentation des esprits, mécontents du présent qui ne leur donnait pas assez d'émotions.
Je prends les années déjà lointaines de 1846 et 1847, parce qu'elles marquent l'apogée d'influence et de gloire où s'éleva le nom de George Sand, une gloire formée dans la tempête. On n'a pas perdu le souvenir des polémiques exaltées dont George Sand était alors l'occasion ou le prétexte. Doit-on s'étonner, si l'on y réfléchit, que cette renommée brillante et orageuse oscillât, au souffle des opinions contraires, entre l'admiration et l'anathème ? Bien peu d'esprits gardaient la mesure à son égard. C'étaient tantôt des fureurs justicières et vengeresses contre une réformatrice audacieuse, tantôt une idolâtrie lyrique comme les oeuvres qui en étaient l'objet, une acclamation bruyante en l'honneur des idées et des principes confondus, dans une sorte d'apothéose déréglée, avec la puissance de l'inspiration et la beauté du style. Toutes ces passions sont bien tombées aujourd'hui. Il y a place maintenant, à ce qu'il semble, au milieu d'une indifférence réelle ou affectée, pour un jugement plus impartial, peut-être pour une admiration mieux raisonnée et plus libre.
    En tout cas, s'il est vrai que ce soit l'oubli qui ait fait disparaître également les deux partis, celui de l'injure et celui de la louange à outrance, s'il est vrai qu'on ne lise plus même les oeuvres qui ont été le prétexte enflammé de tant de jugements contradictoires, notre étude aura un mérite, celui d'une exploration dans des régions devenues inconnues, quelque chose comme un voyage de découvertes.
De cette année de 1847 remontons de quelque quinze

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