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Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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me paraît guère en état de le faire. Je reconnais pourtant qu’il faudra le surveiller et ne pas s’en approcher sans armes tant qu’on n’en saura pas plus sur ses réactions.
    — Pongo s’en charger ! déclara l’Indien qui, agenouillé auprès de l’homme, était en train d’ôter le pansement de fortune qu’il avait composé avec la chemise de Gilles pour permettre au capitaine d’examiner la blessure.
    Celle-ci ne saignait presque plus mais le Noir devait avoir perdu beaucoup de sang car sa peau, d’un ébène si profond et si luisant tout à l’heure, en dépit des marques encore mal cicatrisées que le fouet avait laissées sur le dos, avait pris une curieuse teinte grisâtre. Le capitaine hocha la tête.
    — Il a de la veine. L’artère n’a pas l’air atteinte. On va cautériser tout ça. Faites chauffer la poix.
    Mais Pongo s’interposa :
    — Capitaine vouloir brûler blessure ?
    — Naturellement. C’est la seule façon d’être sûr que le sang ne coulera plus…
    — Peut-être mais brûlure mauvaise. Faire dégâts plus graves que blessure, parfois. Chez nous jamais faire ça.
    — Il faut tout de même bien mettre quelque chose, grogna Malavoine, vexé.
    — Herbes trempées dans vin ou dans huile. Pongo avoir herbes dans sac-médecine.
    Le dialogue fut interrompu par des coups violents frappés à la porte menant aux cabines. On entendit la voix de Judith qui exigeait qu’on lui ouvrît. Le capitaine Malavoine se gratta la tête.
    — Dois-je ouvrir à votre femme, monsieur le chevalier ? demanda-t-il.
    — Pourquoi ? Vous l’aviez enfermée ?
    — J’avais enfermé toutes les dames. Je pensais que ce qui vient de se passer sur la Santa Engracia n’était pas un spectacle pour elles. Grâce au ciel, Mme de Tournemine n’a pas la vue sur bâbord.
    — Vous avez eu tout à fait raison mais à présent vous pouvez lui ouvrir.
    — C’est que… cet homme non plus n’est pas un spectacle pour une dame étant donné son absence totale de costume.
    Gilles se mit à rire.
    — Le moindre morceau de toile à voile fera l’affaire et ne gênera pas Pongo pendant qu’il appliquera ses herbes.
    L’instant suivant, Judith, robe de toile rose et blanc, un grand chapeau de paille retenu par une écharpe rose posé avec élégance sur ses cheveux, faisait irruption sur le pont, se plaignant violemment d’avoir dû étouffer durant tout ce temps. Pour la faire taire, Gilles, en quelques mots, la mit au courant de ce qui venait de se passer, désignant, pour finir, la Santa Engracia qui avait repris sa route vers la Floride et recréait, dans le lointain, l’image de pure beauté qu’elle avait offerte à l’aube.
    — Il s’éloigne à présent et nous aussi avons repris notre route. N’en veuillez pas au capitaine Malavoine qui a seulement voulu préserver votre sensibilité. À présent, je vous conseille de regagner votre cabine jusqu’à ce que nous ayons installé ce malheureux dans un hamac.
    Le regard que lui lança la jeune femme appartenait tout entier à l’ancienne Judith, fière et toujours prête au défi.
    — Me croyez-vous faite du même bois que votre précieuse Madalen qui gît actuellement sur sa couchette, à demi inconsciente, pendant que sa mère lui tape dans les mains et lui fait respirer des sels ? Je ne crains pas, moi, la vue d’un blessé ni même d’un mort et la puanteur de votre négrier ne m’aurait pas fléchie. Dois-je vous rappeler – ou bien suis-je dans l’erreur ? – que « Haute-Savane » est une plantation, que sur cette plantation vivent quelque deux cents esclaves ? Il va bien falloir que je m’habitue à rencontrer des nègres, morts ou vivants, malades, ou sains. Autant commencer tout de suite. Laissez-moi passer !
    Il s’écarta pour lui livrer passage et retint de justesse une riposte peut-être maladroite. Mais c’était la première fois que sa femme, parlant de Madalen, employait ce ton acrimonieux. Où avait-elle pu prendre, sinon auprès de Fanchon, que la jeune fille lui était « précieuse » ? Il se promit en conséquence de veiller au grain sérieusement… Cependant, de son pas léger et dansant, Judith allait rejoindre Pongo, s’agenouillait auprès de lui sans souci de souiller sa robe fraîche et lui ôtait des mains le tampon de charpie avec lequel il s’apprêtait à procéder à un nettoyage de la plaie avec un peu d’huile de noix.
    — Allez préparer votre emplâtre,

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