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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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qui, déjà accusé de jansénisme et d'hérésie, n'aurait voulu pour rien favoriser les hérétiques.
    Dans l'ordre civil et financier, la grande réforme proposée dès Colbert était la taille proportionnelle , la vraie égalité qui doit être inégale, c'est-à-dire peser sur le riche. Mais quel était le riche? le clergé, la noblesse. Il s'agissait de les mettre à la taille, de lesrendre taillables ! Horrible affront dans les idées du temps. Tel était le but, la portée de cette réforme (V. la proposition de 1665, dans nos notes). Le Régent et Noailles accueillirent les plans qu'on présenta, en ordonnèrent l'essai. Partout on trouva des obstacles, et dans qui? dans le peuple aveugle et ignorant, que les privilégiés ameutaient contre tout changement.
    Il eût fallu pour réussir un gouvernement fort, très-fortement assis. Imaginez ce que c'était que de mettre à la taille un prince archevêque de Cambrai, un archevêque de Rohan, un Villeroi, vrai roi de Lyon, qui ne souffrait pas que le roi se mêlât pour la moindre chose de la seconde ville du royaume,—ce Villeroi, qui avait dans les mains l'enfant royal, qui faisait parler cet enfant, et pouvait, dès demain, le faire parler pour la régence d'Espagne et du duc du Maine.
    On ne pouvait faire un seul pas, dans la réforme religieuse ou civile, sans trouver cette pierre sur le chemin, s'y heurter, s'y briser. J'entends la concurrence du roi d'Espagne, j'entends les Jésuites et les évêques (presque tous jésuitisés), le grand parti dévot, une masse de seigneurs et de nobles bouffis, gâtés, absurdes, dont le roi naturel était Philippe V.
    Jugeons-en par le plus honnête, Saint-Simon [2] , crevantde vain orgueil, sans lumières, malgré son talent, si arriéré, si imbu de l'idée que l'État est un bien de famille. Le régent légitime pour lui, c'est l' oncle (Philippe V), et non le cousin (Orléans). Quelque ami, serviteur, qu'il soit de celui-ci, il n'hésite pas à lui dire à lui-même que, si Philippe rentrait en France, lui, Saint-Simon, quitterait le Régent avec larmes, mais enfin le quitterait.
    Trois mois d'essai montrèrent que toute grande réforme politique était impossible. On dut rentrer dans le fangeux ruisseau de Chamillart et Desmarets, dans les banqueroutes partielles. On avoua le vide, la ruine; on déclara que le dernier roi avait mangé l'avenir même (7 décembre). On fit, comme Desmarets, de lafausse monnaie; au moins on donna à celle qu'on frappa une valeur fictive. On annonça l'examen solennel, non-seulement de ce qu'on appelait les affaires extraordinaires, mais de tous les titres publics. Il y avait lieu d'examiner certainement. Les traitants avaient agi avec le dernier roi comme avec un fils de famille à peu près perdu; ils lui prêtaient à 400 pour 100. Ce n'est pas tout. La comptabilité était si mal tenue, qu'il y avait une infinité de doubles emplois, des titres doubles. Les receveurs généraux, sous prétexte d'avances (exagérées et mal prouvées), ne rendaient plus rien au Trésor, agiotaient avec l'argent des recettes; ils faisaient circuler un nombre infini de billets, et, sous noms supposés, prêtaient au roi son propre argent.
    Noailles avait proposé de les supprimer, de les remplacer, Saint-Simon de faire venir un à un ces rois de la finance, à petit bruit, et de les étrangler entre deux portes, je veux dire de les faire dégorger, de les rançonner à la turque. Le Régent y répugna et se contenta d'abord de demander aux receveurs qu'ils payassent au moins la solde des troupes (chose si nécessaire dans les périls où l'on était). Ils promirent, ne tinrent pas, espérant que le soldat, ne recevant rien, se révolterait. Le grand parti de l'argent, dans ces bons sentiments, sournoisement employait son arme ordinaire en révolution, n'achetant rien, augmentant la misère, mettant le marchand, l'ouvrier, au désespoir.
    Ainsi exaspéré, le plus doux des gouvernements n'eut de ressources que dans les moyens de terreur. Le 12 mars 1716, on établit une chambre de justice contre les traitants usuriers, les comptables agioteurs,les munitionnaires engraissés du jeûne de nos armées, etc. Grand bruit, force menaces. On montre la torture; on parle d'échafaud. On prétend faire payer 200 millions à 4,000 personnes. Mais ces sévérités n'étaient pas de ce temps. Nombre de seigneurs charitables, des femmes spirituelles et charmantes, s'intéressent pour les financiers. On entoure le

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