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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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devait être présenté aux Chambres, et son affaire lancée. En mars (on pouvait l'espérer), au jour fatal du dividende, Law, incapable de tenir ses imprudentes promesses, allait être précipité. Sa terrible culbute, un coup d'énorme baisse, faisant fuir tous les capitaux, les renverrait à Londres et ferait la hausse de Blount.
    Le premier point était de discréditer le Mississipi, de détruire ce vaste mirage qui avait fait monter si haut les actions. On annonce à Londres à grand bruit que de vives représentations vont être faites aux Chambres sur ces établissements français «qui empiètent sur les Carolines.» Ici, Dubois écrit et dit qu'on a tort d'attendre des denrées tropicales de la Louisiane, que cegrand pays inondé ne sera jamais qu'une espèce de Hollande, tout au plus bonne à nourrir des bestiaux.
    Ce n'étaient point des attaques personnelles, mais d'autant plus efficacement de pareilles confidences minaient le crédit. On savait bien aussi que Law, tout en promettant de ne pas augmenter le nombre des billets de banque, ne pouvait faire face aux besoins qu'en en fabriquant de nouveaux (de février en mai, près de quatorze cent millions!). Dès le 28 janvier, il leur donna un cours forcé, obligea de les recevoir comme monnaie. En même temps, la monnaie métallique était persécutée et par les variations qu'on lui faisait subir, et par le rappel qu'on fit des anciennes monnaies décriées. On en fit des recherches, des poursuites, des confiscations chez les particuliers et dans les couvents même.
    Un état si violent ne pouvait durer guère. Peu avant le payement du dividende de mars, on dut prendre un parti. Il s'en présentait deux: on pouvait sauver l'une ou l'autre des deux institutions, ou la Compagnie ou la Banque, soutenir ou l'action ou le billet. «Mais (on l'a très-bien dit) la plupart des possesseurs d'actions étaient des gens qui avaient librement spéculé. Les porteurs de billets, au contraire, les avaient reçus forcément, en vertu des édits, comme monnaie obligatoire, sans chance de fortune; leur droit était sacré. Donc on devait plutôt laisser tomber l'action, non le billet, sauver la Banque plutôt que la Compagnie.»—Seulement, en sacrifiant celle-ci, on fermait l'espérance, on sacrifiait la colonisation et le commerce renaissant.
    Le 22 février, on associa, on fondit les deux établissements. La Banque devint Caissière de la Compagnie, et celle-ci caution de la Banque . Ce fut le plus fragile, le plus ruineux des deux établissements qui prétendit soutenir l'autre.
    En Angleterre, la Banque, vieille, puissante corporation et fort indépendante, ne voulut nullement s'associer aux périlleuses destinées de la Compagnie du Sud. Celle-ci même ne le désira pas, sentant que la pesante sagesse de la Banque alourdirait ses ailes dans le vol hardi qu'elle méditait. Ces deux puissances financières restèrent donc séparées, et la ruine de la Compagnie n'entraîna pas la Banque.
    Ici, la Compagnie des Indes, ayant l'honneur d'avoir des princes pour gouverneurs et hauts actionnaires, sans difficulté associa à son péril la Banque plus solide.
    Leurs destinées, leurs fonds se mêlèrent fraternellement. Mesure agréable aux voleurs.
    Pour décorer ce mariage par un grand air d'austérité, il est dit qu'on ne fera plus de billets , sinon avec beaucoup de formes, sur proposition de la Compagnie, et par arrêt du Conseil. Il est dit que le roi renonce à ce qu'il a d'actions (il arrête le cours de ses largesses illimitées), qu'il ne tirera rien de la caisse qu'en proportion des fonds qu'il y dépose, comme tout autre actionnaire.
    Une chose frappe: à la grande assemblée des actionnaires où tout cela passa, et où le Régent, les banquiers, courtiers, agents de change et tout le peuple financier siégea, vota, signa, les deux princes quidevaient le plus profiter de l'arrangement, Bourbon, Conti, ne parurent pas (22 février).
    On poussait âprement la persécution de l'argent. Tout ce qu'on essayait d'exporter était confisqué. On pinça ainsi Duverney, qui tâchait de sauver sept millions en Lorraine. On pinça un Anglais, dit-on, pour vingt-quatre millions. Le 27 février, défense d'avoir chez soi plus de cinq cents livres. Rigoureuses saisies. Nulle sûreté. Le dénonciateur avait moitié de la confiscation. Un fils trahit son père. Nombre de gens timides aiment mieux sortir d'inquiétudes, et viennent docilement changer leurs espèces en billets.

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